L’activité
sur les ports maritimes ou fluviaux était intense.
Aussitôt
qu’un navire accostait, il fallait décharger les marchandises et les acheminer
au plus vite vers les points de ventes.
Les
ports embauchaient donc un grand nombre de personnes, souvent payées à la
journée.
Le
port du Havre était un grand port. Mais les navires ne pouvaient pas tous
remonter le cours de la Seine jusqu’à Rouen, voire Paris. Les marchandises
étaient donc transbordées sur des barges.
Il
fallut attendre presque le milieu du XIXème siècle, après
aménagement des berges de la Seine et la suppression d’un nombre considérable de petites iles, pour que des bateaux de
tonnage plus important accèdent dans les terres par le fleuve.
De
quelles nationalités étaient les bateaux arrivant au Havre et quelles étaient
leurs cargaisons ?
1763
- 21 janvier
Des
navires sont arrivés au Havre : l’annonce était faite par voie de presse,
décrivant provenance et cargaison.
« Le
3 janvier, le navire hollandois, la Dame Elisabeth, Capitaine Dorus Cruger,
venant de Bilbao, chargé de laine
Le
14 janvier, six navires anglois, sont entrés dans le même port chargés de
farine
Le
15 janvier, un anglois chargé de dito
Le
17 janvier, un hollandois chargé de chanvre et de mâts de navire »
Et
puis, le 4 février 1763, il était annoncé :
« Le 20 janvier, le capitaine
Kersis Teunis Klein, venant de Marseille, chargé de savon, huile, coton, alun,
sumac, raisons, sucs de réglisse, galles, amandes et fruits de Carême, tartres,
manne, vin, câpres, anchois …..
Le 21 janvier, Antoine de Réveilla,
Espagnol, de Bilbao, chargé de laine. »
Que
contenait le navire du Capitaine Kersis Teunis Klein
De
l’alun : minéral
utilisé en teinture, en mégisserie et en thérapeutique pour ses propriétés
toniques et astringentes.
Du
sumac : plante de la
famille des térébinthacées. Cet arbuste aux nombreuses variétés donne une gomme
résine utilisée en tannerie pour la fabrication de vernis et de laques.
Des
sucs de réglisse : cette plante
était utilisée en pharmacie et pour confectionner des boissons rafraichissantes.
Des
galles : ou noix de
galle, excroissance produite sur les tiges et les feuilles de certains
végétaux, provoquée par des insectes parasites.
Des
fruits de carême : raisins
secs – figues sèches – amandes et noisettes.
De
la manne : sucs de
certains végétaux qui s’écoulent naturellement ou après incision.
1763
– 11 mars
« Depuis
le 22 février, il est entré dans notre Port (il s’agit du port de Rouen) 26
navires François, venant de différens
(écrit ainsi dans le texte) endroits, chargés de toutes sortes de
marchandises. »
1763
- 7 janvier
Et
puis, si toutes ces voiles déployées vous ont donné l’envie de prendre la mer,
lisez attentivement l’offre suivante :
« Le samedi 15 du présent
mois, heure de Bourse de cette ville, il sera procédé à la vente du navire
hollandois, le Thérèse, capitaine C. Royckman, actuellement en ce Port, au plus
offrant et dernier enchérisseur. En l’état qu’il se trouve.
S’adresser au capitaine en son Bord
ou à Messieurs Le Bourg Frères, Négociants rue Saint-Denis, qui donneront les
connaissances nécessaires. »
Vendu
« en l’état où il se trouve » !! Espérons qu’il ne prend pas
l’eau …….
-=-=-=-=-=-
1763
- 21 janvier
Janvier,
période de froidure hivernale, aussi voilà un petit conseil.
« Nous sommes dans la saison
des engelures et tout le monde prétend avoir quelque spécifique pour ce mal. Le
remède suédois est fort simple et parait être le plus sûr. Ce n’est autre chose
que l’Esprit de Sel, dont on arrose à plusieurs reprises les parties malades.
Il faut avoir l’attention de le faire avant que ces parties soient ouvertes, ou
après que les crevasses ont cessé. Ce remède vient d’un très-grand Médecin, de
M. Linoeus, le Dioscoride du Nord. »
Assurément
ce médecin possède bien des qualités pour être comparé à Pedanius
Dioscoride qui fut un éminent médecin ayant laissé un écrit, le « Materia Medica » qui
fut longtemps une référence.
Dioscoride,
né entre les années 20 et 40 ap. J.-C., à Anazarbe en Cilicie (Turquie) et
décédé vers 90 ap. J.-C.
L’Esprit
de Sel n’est autre que de l’acide chlorhydrique étendu d’eau.
Vous
ne risquez pas grand chose à essayer ce traitement. Il est recommandé donc
assurément efficace, d’autant plus que la météo annonce des températures bien
en-dessous de zéro…..
1763
- 28 janvier
« Cet
hiver déjà fameux par sa durée, ne l’a été guère moins jusqu’à présent par sa
rigueur, presque comparable à celle de 1760 où la liqueur du Thermomètre
d’observation descendit le 12 janvier au onzième degré au-dessous du terme de
la congellation (écrit ainsi dans le texte) naturelle de l’eau, demi-degré au
dessous du froid de Paris en 1740. Le dix-neuf de ce mois elle est descendue au
neuvième et depuis six semaines environ elle a rarement atteint le terme de la
glace ; les vents d’est ont toujours dominé et le Mercure s’est
ordinairement soutenu au-dessus de vingt huit pouces. »
L’hiver
1762/1763 a donc commencé très tôt avec des températures très basses et un vent
glacial ……
-=-=-=-=-=-=-
Et
voilà la ville de Rouen endeuillée …….
1763
– février/mars, un homme honorable
Le
25 février.
« M. l’abbé de Germont,
conseiller-clerc de la Grande Chambre du Parlement, est mort hier sur les neuf
heures du soir, âgé de 79 ans. Il avait été reçu en 1709. Sa charité envers les
pauvres, en fit l’ami de l’humanité ; sa pénétration, un grand Magistrat,
sa droiture et sa fermeté, un citoyen toujours enflammé par l’amour du bien
public. Quoiqu’enlevé à la justice et au public, il vivra par les regrets du
Sénat, par les pleurs des Infortunés et par le respect de ses Concitoyens,
tendres admirateurs de ses vertus.»
Quel
bel éloge !
Le
4 mars, nous pouvons encore lire, concernant l’Abbé de Germont.
« Jamais la France n’eut à
regretter un plus zélé défenseur de ses droits et de ses précieuses libertés,
la Province un meilleur Citoyen, la Justice un Ministre plus recommandable, les
pauvres, enfin, un Père plus tendre, plus compatissant et plus généreux.
Pendant le cours d’une longue vie, la vérité et la charité exercèrent
constamment un égal empire sur son cœur : la première de ces vertus le
rendit inaccessible à toute brigue, supérieur à toute épreuve et disposé à tout
sacrifier ; la seconde lui fit oublier ses propres intérêts pour ne
consulter que les besoins de l’humanité. »
Tout
a été dit en quelques lignes, sauf que :
L’Abbé
jacques Christophe de Germont, sieur de Mesmont, était né le 12 février 1684,
dans la paroisse de Saint-Nicaise à Rouen. Son père, Nicolas Germont, était avocat
au Parlement.
Il
entreprit des études de théologie et de droit à la suite desquelles, à partir
de 1709, il exerça des fonctions cléricales et judiciaires. Il fut ensuite reçu
conseiller-clerc en la Grande Chambre du Parlement.
Ses
dons en faveurs d’établissements d’assistance furent très importants. En 1728,
il donna à l’hospice générale 30 000 livres en rente viagère et 14000
livres à l’Hôtel Dieu.
Sensibilisé
par la détresse des enfants pauvres, il s’attacha à promouvoir l’accès des plus
démunis à la connaissance et à l’éducation.
En
1761, il effectua un don de 10 000
livres pour démarrer la construction d’un établissement où furent élevés
avec le lait des animaux, les enfants de l’hospice.
Deux
en plus tard, il consacra 60 000 livres à la fondation de crèches
destinées aux enfants exposés au tour.
Quelques
mois avant son décès, sa générosité n’avait pas faiblit car il fit rédiger un
testament léguant tous ses biens en faveur des plus démunis. Le journal de
Rouen ne manqua pas d’en faire état :
« L’ouverture de son testament
faite le 25 au matin, aprit (ainsi dans le texte) qu’au mois de juillet dernier
il avait disposé en faveur de l’hôpital général de ses meubles meublans (ainsi
dans le texte), chevaux, bestiaux, grains, boissons harnois et de la terre de
Grainville qu’il faisoit valoir ; effets que l’on estime à plus 20000 livres. »
L’abbé
de Germont décéda donc le 24 février 1763. Un service solennel fut célébré dans
l’église de l’hôpital. Tous les pauvres purent y assister.
Cet
hommage perdure encore à ce jour puisque Rouen possède une rue « de
Germont » qui se situe non loin de la rue Eau de Robec.
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