lundi 12 décembre 2016

MONSIEUR PAUL - Chapitre 7



Dans la cour de l’école, au moment de la récréation de dix heures, Antoine ne se venta pas de son exploit nocturne. Il écouta les railleries de ses copains, sans répliquer.
Flora était venue le rejoindre, tenant dans sa petite main l’armoire empruntée, la nuit précédente, au mobilier de la maison de poupée.

« C’est quoi, ça, demanda Clem.
-      C’est un secret ! lança la petite fille, énigmatique.

La sonnerie rappelant les élèves vers leur classe respective, interrompit ce début de conversation, au grand soulagement d’Antoine qui craignait les bavardages intempestifs de sa petite sœur.
Une petite sœur à qui il reconnaissait, à présent, un sacré sang froid. Un « vrai petit chef », cette petite sœur. Il en était devenu très fier.

Mais, à la fin de la journée, Antoine eut un coup au cœur. Il eut une forte envie de fuir, loin, très loin. Devant la grille, se tenait droit et fier, Monsieur Paul. Il jeta un coup d’œil alentour, craignant de voir surgir les gendarmes.

Ce fut, à ce moment précis, que toutes les personnes du village, présentes devant les grilles de l’école, purent assister à une scène très étonnante Flora se précipitant vers Monsieur Paul qui se baissait pour  recevoir cette petite fille qui m’étouffait de gros bisous.
Après ce moment d’affection très démonstratif, Monsieur Paul reposa la petite fille sur le sol.

Antoine, rassuré, se redressa et, fièrement, alla embrasser le vieil homme, comme s’il s’agissait d’une personne familière. Après quoi, il lança à ses copains un regard qui en disait long.

Pantois qu’ils étaient, les copains !

Encadré par les deux enfants, Monsieur Paul se dirigea vers la boulangerie où furent achetées des viennoiseries pour un goûter royal. Après, Monsieur Paul raccompagna ses deux nouveaux amis jusqu’à leur domicile.
Devant la maison paternelle, Antoine eut un regard interrogateur. Monsieur Paul, alors, le rassura :

« Non, ne crains rien, je ne dirai rien de votre petite expédition de l’autre nuit, à vos parents. Cela restera notre secret. Mais, si nous devons nous revoir, je dois les rencontrer. »

Antoine acquiesça d’un signe de tête.

Papa et maman reçurent donc, quelque temps après, Monsieur Paul qui devint rapidement un ami.
Les mercredis se passaient souvent, lorsque le temps le permettait, dans le parc de la grande maison qui avait de nouveau ouvert, en grand, ses fenêtres.
La pièce mystérieuse, au sous-sol, devenait un endroit magique lorsqu’il pleuvait.
Dans cette pièce, trônait toujours la photo de …… De qui, au fait ?

Un mercredi après-midi, au moment du goûter, pris dans la cuisine de la grande maison, Flora reposa la question qui n’avait pas reçu de réponse :

« Dis, c’est qui Suzy ? »

Une ombre passa sur le visage de Monsieur Paul. La seule évocation de ce prénom le poignardait en plein cœur.
Aussitôt, Antoine réprimanda sa sœur :

« Tu ne peux pas la fermer un peu, toi !
-      Non, laisse, répondit Monsieur Paul, je vais vous dire qui est Suzy.

Puis, s’adressant à Flora, il poursuivit :

« Suzy est bien la petite fille qui est sur la photo et c’est vrai que tu lui ressembles beaucoup.
-      Elle est où ? coupa Flora.
-      Elle est décédée, il y a très longtemps.
-      Ah ! fit la fillette, et comment ?
-      Flora, tais-toi un peu, interrompit Antoine.

Comme si il n’avait pas entendu la réflexion du garçon, Monsieur Paul continua sa narration :

« Flora avait à peu près ton âge. A cette époque, au bout de la propriété où nous vivions, il y avait un petit cours d’eau. Un jour, en se promenant, elle a glissé et est tombée dans l’eau. Sa maman, qui était avec elle, voulut la secourir. Toutes les deux se sont noyées.
- Tu as dû être triste, affirma Flora, compatissante.
- Et plus encore, confirma Monsieur Paul d’une voix effacée, perdu dans ses souvenirs.

Après un silence, le vieil homme poursuivit :

« Ta ressemblance avec ma petite Suzy m’a surpris la nuit où vous vous êtes introduits dans le sous-sol. Après, je me suis dit que c’était sans doute la destinée qui vous avait mis sur mon chemin. J’ai donc décidé de mettre fin à ce deuil qui n’a duré que trop longtemps. »

Flora ne comprit pas les dernières paroles de Monsieur Paul, mais elle ressentit une irrésistible envie de le consoler, car il devait avoir un très gros chagrin. Elle décida d’aller se blottir contre lui.

Monsieur Paul sourit et embrassa la petite sur le front. Puis il ajouta :

« J’aimerais savoir la date de vos anniversaires ?
-      Moi, s’exclama Flora, c’est la semaine prochaine. Je vais avoir cinq ans !
-      Alors, conclut Monsieur Paul, il n’y a pas de temps à perdre, nous allons faire une grande fête dans le jardin et inviter tous vos amis.

Puis, se tournant vers Antoine :

« Tu inviteras aussi tes copains, car j’ai cru comprendre que votre expédition nocturne était la conséquence d’un pari. Tu seras donc le vainqueur du jour. »

Comment savait-il cela, Monsieur Paul. Cela ne pouvait venir que de Flora qui comme toujours avait dû cafter.


Dans le village, le jour de l’anniversaire de Flora, tous les habitants étaient étonnés.

Que s’était-il donc passé dans la vie de Monsieur Paul, pour que celui-ci ouvrît toute grande sa demeure ?
Que s’était-il donc passé dans la vie de Monsieur Paul, pour que celui-ci accueillît tous les enfants du village ?

Qu’importait !

A présent, Monsieur Paul était salué, considéré et cela le rendait très heureux.



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