lundi 30 octobre 2017

HISTOIRE DE RIRE - Chez le docteur

Chez le docteur

C’est l’hiver.
Dehors la neige voltige en flocons joufflus qui se déposent sur le sol en un tapis moelleux.
Au rez-de-chaussée d’un immeuble, la salle d’attente du cabinet du Docteur Keugémal est pleine à craquer de personnes éternuant, toussant et grelottant de fièvre.


Le médecin fait entrer un premier malade dans son bureau et lui demande de s’asseoir.         

« Alors ? Qu’est-ce qui vous amène ? demande le médecin en réajustant ses lunettes.
-          C’est que je ne vais pas très bien, répond la malade, une femme légèrement enrobée, d’une voix très faible
-          Je me doute, autrement, vous ne seriez pas là ! Mais encore ?
-          J’ai de la fièvre et j’ai le rouge-gorge.
-          Voyons cela !
           
Le médecin s’approche du malade, muni d’un abaisse-langue.
« Ouvrez la bouche et faite « Ah ! ».
La malade ouvre grandement la bouche en tirant la langue. Le médecin observe, attentif, les amygdales congestionnées et la luette qui vibre  au « Ah ! » peu sonore de la patiente.
« Je vois, je vois ....... dit le médecin en hochant la tête.
-          Vous voyez quoi ? C’est grave, docteur ? s’inquiète la dame.
-          Est-ce que ça vous grattouille ou est-ce que ça vous chatouille ? demande le praticien en se grattant la tête.
-          Bah ! C’est que ....., répond la maladie un peu perplexe.
-          C’est que quoi ?
-          Bah ! Ni l’un ni l’autre, Docteur !
-          Ni l’un ni l’autre ? s’exclame le médecin.
-          Bah non ! Je dirai plutôt que ça me picote !
-          ça vous picote ? Curieux, curieux....

Visiblement le médecin n’arrive pas à faire un diagnostic.
Est-ce donc si grave ? C’est ce que se demande la malade qui commence à pâlir, mais qui arrive tout de même à articuler :
« C’est donc si grave, docteur ?
-          Grave ? réplique le docteur Keugémal, toujours opinant du chef. Peut-être.... je n’en sais  absolument rien..... car....si ça vous picote.....  cela dépasse toutes mes compétences.

La malade se lève alors,  plus abattue qu’à son arrivée, sans avoir obtenu la moindre ordonnance, ni le nom du spécialiste qui pourrait, lui, diagnostiquer sur les « picotements » en question.

Le médecin fait entrer le malade suivant, un pauvre homme se déplaçant difficilement, appuyé sur des béquilles.
Le médecin Keugémal, l’aide à s’asseoir, puis demande :
« Alors ? Qu’est-ce qui vous amène ?
-          C’est que je ne vais pas très bien, répond le blessé avec une grimace de douleur.
-          Je me doute, autrement, vous ne seriez pas là ! répond le médecin, avec logique.
-          J’ai très mal à la jambe gauche.
-          Voyons cela !

Le médecin palpe la jambe gauche. Le malade crie de douleur. Visiblement, en effet, cet homme souffre !
Le médecin se redresse, hoche la tête et déclare :
« Je vois !  Je vois !
-          C’est grave, docteur ? s’inquiète le patient.

Sans répondre à la question de l’homme, le praticien se renseigne sur les circonstances de la blessure :
« C’est un accident ?
-          Oui, en quelque sorte, pourquoi ? répond l’homme.
-          Pour la déclaration à l’assurance maladie, réplique le docteur en sortant un feuillet du tiroir de son bureau.
-          Ah ! fait le blessé qui, lui, souhaite surtout être soigné.
-          Vous avez une fracture du tibia. Vous revenez des sports d’hiver ?
-          Non, du tout, je suis tombé dans l’escalier que la concierge avait ciré.

Le médecin se gratte le sommet du crâne et lance :
« Je vois ! Je vois...... Nous pouvons donc dire que c’est un accident d’excès de zèle !
-          D’excès de zèle ?
-          Je me comprends..... Je vais mettre un plâtre pour maintenir votre jambe. Vous le garderez plusieurs semaines.

Après avoir achevé de remplir le formulaire de l’assurance maladie, le médecin se lève et effectue les soins nécessaires, afin de maintenir l’os. Lorsque ceux-ci sont achevés, le sieur Keugémal précise :
« Vous allez voir, votre jambe, ainsi maintenue, ne vous fera plus souffrir.

Le malade regarde, perplexe, sa jambe plâtrée. C’est lui, à présent, qui hoche la tête. Mais, il émet un doute :
« J’en suis certain, docteur, sauf que .....
-          Sauf que quoi ? Qu’est-ce qui vous inquiète ? réplique le docteur avec un soupir de lassitude.
-          C’est qu’en fait.... vous avez plâtré la jambe droite.
-          Et alors ? rétorque le praticien d’un ton quelque peu exaspéré.
-          C’est de la jambe gauche que je souffre.......
L’infirmière qui rangeait les pansements, dans la pièce contigüe, jeta un regard dans le bureau du docteur. 
Ce qu’elle vit !
Le malade confus, ne sachant comment réagir, face au médecin au bord de la crise de nerfs !

Dans la salle d’attente du cabinet du Docteur Keugémal, pleine à craquer, on pouvait entendre  des personnes éternuant, toussant et grelottant de fièvre.


mercredi 25 octobre 2017

HISTOIRE DE VILLAGE - Feu Nicolas Taurin

Feu Nicolas Taurin

Les articulations douloureuses, Nicolas Taurin vaquait à ses occupations.
Depuis son veuvage, en plus des travaux de sa petite ferme, il devait s’occuper des soins du ménage. Bien sûr, sa belle-fille l’aidait de son mieux et surtout, il y avait « le p’tiot », comme il l’appelait avec affection, un brave gosse, un gaillard qui promettait malgré ses presque quinze ans.
Ce jour-là, comme quasiment la quasi-totalité des jours de la semaine, « le p’tiot », Désiré Champion, était venu pour effectuer quelques travaux chez son grand-père et avait partagé avec lui le repas du midi.
Levé à l’aube, il était coutumier de s’octroyer une « petite sieste digestive » avant de se remettre à la tâche jusqu’au souper.

« j’va aller un peu dans la grange ! déclara Désiré en se levant de table.
-          Va, mon gars ! répondit le vieux, en rangeant les gobelets et la carafe de vin et ramassant les miettes de pain éparses sur la table.

Nicolas Taurin, lui, se reposait un peu, assis près de la cheminée.
«  A mon âge, disait-il souvent, comme pour se justifier de ce besoin de chaleur, les os se refroidissent bien vite. »
Il se savait vieillissant, fatigué et un peu diminué physiquement, mais sa fierté masculine refusait de l’avouer ouvertement à ses proches. Et puis, la présence de sa femme, Marie Madeleine Huet, lui manquait terriblement.
Pensez-donc ! Ils avaient vécu tellement d’années l’un près de l’autre depuis le jour de leur mariage, le 30 octobre 1753 dans l’église de Saint-Aubin-d’Escroville.

Afin de ranimer  les braises, Nicolas Taurin fourragea  le foyer avec le tisonnier.
Légèrement penché, il fut pris d’un vertige, sa vue se troubla. Déséquilibré et prêt à tomber, il voulut se rattraper au manteau de la cheminée. Evaluant mal la distance, en raison de son malaise, sa main ripa et il bascula tout prés du foyer, tombant de tout son poids, alors que le feu reprenait de la vigueur.  
Dans sa demi-inconscience, en une fraction de seconde, il pensa :
« Bah ! Me v’là ben, et le p’tiot qu’est pas là ! »
Puis, il sentit une horrible douleur à la jambe droite qui lui bloqua le souffle et contracta sa poitrine.

-=-=-=-=-=-=-

Quand il s’éveilla – ou était-ce pour cette raison qu’il s’était éveillé – Désiré Champion sentit une odeur de brûlé. Une odeur de grillé. Une odeur comme lorsque l’on grillait le verrat le jour des cochonnailles. Il sortit de la grange, des brins de paille encore plein des cheveux, et son regard se posa sur la maison de son grand-père d’où sortait, par la porte ouverte, une épaisse fumée.
Il se précipita alors vers la demeure et s’engouffra dans la cuisine où il avait laissé le vieux Nicolas Taurin environ deux heures plus tôt.
Attrapant une veste en grosse toile quelque peu élimée, pendue à un clou sur le mur près de la porte d’entrée, Désirée Champion la lança sur son grand-père, afin d’éteindre le feu qui consumait le pauvre homme, tout en criant :
« Oh ! Le vieux ! Tu m’entends ?  Réponds ! A l’aide ! Réponds ! Grand-père ! »

Voyant le vieillard inerte, Désiré Champion alla chercher du secours, pensant et surtout espérant : « Il n’est peut-être pas mort ! »

Peut-être, mais pas certain.

Marie-Barbe Lucas, sa tante, arriva en courant, suivie de Toussaint Toutuni, tailleur de son état.
Le constat fut sans appel, Nicolas Taurin était bel et bien mort !

« Faut prévenir le maire, lança  Marie-Barbe Lucas, j’y va tout de suite. Faut faire constater la mort. Pis, j’ va prévenir mon homme et ses frères. »

Sur le chemin Marie Barbe Lucas, femme de Nicolas Taurin fils, essuya quelques larmes du coin de son tablier.
« Pas idée d’mourir ainsi. Pauv’ homme ! I’ méritait point ça ! »
Et elle se mit à marmonner une prière, celle pour les morts, pour le repos de leur âme.
Quand elle arriva à la maison commune de Saint-Aubin-d’Ecrosville, toute essoufflée par sa course, le maire, présent, la reçut et l’écouta conter le triste évènement. Il hochait la tête pendant le récit. Quand Marie-Barbe arrêta de parler, la maire se leva, mit son manteau, coiffa son chapeau et suivit la belle-fille du défunt jusqu’au lieu du drame.
Il réfléchissait, ce maire : « Une mort violente ! Acte criminel ou accident ? Il va falloir prévenir le juge de paix et le sous-préfet. Une enquête va sûrement être diligentée pour connaitre les causes exactes du décès. Quand un vieillard est retrouvé mort, c’est parfois, voir souvent un complot familial pour toucher le pécule de l’héritage. »
Une suspicion qui se révélait, malheureusement, trop souvent véridique.
L’odeur de l’argent fait faire parfois, même aux plus honnêtes, des actes irréparables, et cela surtout dans les familles où les héritages sont une des principales causes de disputes.

De son côté, la femme Taurin pensait, en regardant le maire du coin de l’œil :
« A l’voir ainsi, sûr qu’i’ croit qu’on l’a tué, l’ vieux, Mais, pauv’ bonhomme, c’est point avec son magot, qu’on peut vivre ! »

-=-=-=-=-=-=-

Dans la cuisine, où attendaient le citoyen Toussaint Toutuni et deux autres proches voisins, Nicolas Pesas et Mairie Elisabeth Morice, la femme de Jean Ruault, le bourrelier,  le maire eut un haut-le-cœur en voyant l’état de la victime. Pourtant, il en avait vu des morts, mais celui-là !.....
Le maire ne put que constater le décès, formula des condoléances à la famille et revint à la maison commune, afin de rédiger un rapport que la déclarante et les témoins signèrent avec lui. Ceci fait, il prévint le juge de paix.

Une enquête fut menée au cours de laquelle le voisinage fut interrogé.
« Nicolas le vieux, déclara un voisin, j’ le voyais souvent appuyé au tronc d’ l’arbre, là, just’ d’vant la maison. I’ allait pas ben, mais, i’ voulait point l’admett’.»

Un autre précisa :
« I’ s’ plaignait d’avoir des vertiges parfois. D’ailleurs, i’ disait en riant, qu’i’ tenait plus l’alcool comm’ par l’ passé ! »

Tous furent unanimes lorsque le juge de paix leur demanda si il y avait quelques désaccords au sein de la famille :
«  Comme partout, pardi. Ni plus, ni moins. On peut point êt’ toujours d’accord. Pas vrai ? »

L’autopsie pratiquée fit le constat suivant :
Suite à une chute très près du foyer de la cheminée, les flammes avaient atteint les vêtements puis le corps de Nicolas Taurin le vieux en divers endroits :
De  profondes brûlures à la jambe droite et au genou droit laissant apparaitre les os.
La chair du bras droit entamée par les flammes.
Le visage du pauvre homme totalement roussi.

La douleur trop intense avait provoqué un arrêt cardiaque.
Un accident !
Un horrible accident !

Nicolas Taurin avait ainsi, en ce 7 fructidor an VIII de la République Française, rejoint sa chère Marie Madeleine.


Quant au jeune Désiré Champion, il resta hanté jusqu’à la fin de sa vie par la dernière vision de son grand-père qui resurgissait chaque nuit dans ses rêves, et par un  profond sentiment de culpabilité.
Si ce jour-là, il n’était pas allé dormir dans la grange.......


J’ai écrit cette nouvelle après la lecture de la déclaration de
Marie-Barbe Lucas, découverte dans le registre des délibérations
du Conseil Municipal de Saint-Aubin-d’Ecrosville,
en date, justement, du 7 fructidor an VIII de la

République Française.

jeudi 19 octobre 2017

Faut nous l’changer !



Devant la porte close de l’Eglise de Marbeuf, un groupe de femmes. D’abord interloquées, elles commencent à s’agiter mécontentes.

« Il est pas encor là, not’ curé ? Interrogea l’une d’elle.
-          La porte de l’église est fermée ! Lança une autre.
-          Et not’ bedeau ? Vous l’avez vu ? Questionna une troisième
-          Il est point là, non plus !
-          J’ m’ disais b’en qu’ j’avais point entendu les cloches
-          C’est y qui s’rait malade, not’ bedeau ?
-          Et not’ curé alors ?
Et ainsi de suite............

Jusqu’au moment où une petite femme, ronde de partout, s’exclama  avec force :
«  Not’ curé ! C’est point la première fois qui n’ vi’nt pas ! S’i va pas bien, faut nous l’changer !
-          Oui, elle a raison, la Marguerite, faut en mettre un autre de curé !
-          Changer not’ curé ! s’exclama d’une voix timide une jeune femme au visage poupin, comme s’il s’agissait d’un sacrilège.

Les conversations qui prenaient allure de révolte furent interrompues par le bedeau qui, tout essoufflé, arrivait en courant. Il eut, d’ailleurs, bien du mal à reprendre haleine.

« Alors ? Y a pas d’ messe, ce matin, lancèrent, à l’unisson, toutes ces femmes, fort dévotes.
-          Bah ! répondit le bedeau, très gêné. C’est qu’ not’ curé est encore au lit.
-           Au lit ? A c’t’ heure ! lança Marguerite d’un ton de reproche.
Cette réplique déclencha une cascade de rires, surtout lorsque Marguerite ajouta, non sans une pointe d’ironie :
« I’ s’ paye du bon temps not’ curé !
-          C’est qui va pas très bien, précisa timidement le bedeau.
-          ça peut pas durer. ça arrive b’en trop souvent !
Et les femmes s’en retournèrent à leurs occupations, en maudissant le pauvre curé, ce qui, vous en conviendrez, n’était guère charitable de la part de ces pieuses personnes.

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Du fond de son lit, Monsieur le curé, François Antoine Bertrand,  redoublait de prières afin de pouvoir à nouveau exercer son ministère. Mais, il se sentait si las, si misérable avec tous ses maux qui le clouaient sous sa maigre couverture, alors que ses ouailles l’attendaient. Ses ouailles ! Ses enfants,  à vrai dire, car ils les connaissaient tous pour leur avoir administré les sacrements de baptême, de mariage et avoir aidé leurs parents à passer le cap difficile de la vie à la mort.
Alors, vous comprenez, en cette période de Carême, alors que tous attendaient la célébration de Pâques, être cloué au lit, incapable de se lever !
Ah ! Il était loin le temps où jeune prêtre, il cheminait, même la nuit, par tous les temps, pour apporter un peu de réconfort à ceux qui le souhaitaient.


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La maladie du curé et les mécontentements qu’elle entrainait vinrent, bien évidemment, aux oreilles du maire qui en parla à ses conseillers au cours de la séance du 9 avril 1837. Il était évident que ce n’était pas de leur compétence et qu’il valait mieux en informer l’évêché d’Evreux, qui était seul accrédité à remplacer, ou non, le desservant de la commune.

« Est-ce qu’il y aurait une place à l’hospice du Neubourg ? Questionna un des conseillers présents.

Le maire réfléchit un moment. Il n’avait jamais envisagé de renvoyer ainsi le curé de sa commune, tout simplement parce que, âgé et malade, il ne pouvait plus exercer sa mission.

« L’hospice, serait, en effet, une possibilité, rétorqua le maire, mais je pense que vous serez de mon avis, que nous ne pouvons envoyer notre curé à l’hospice. Depuis toutes ces années, qu’il est parmi nous, il ne serait que justice qu’il finisse ses jours dans la commune. Si bien évidemment, c’est son choix. »

Les avis étaient partagés, mais il fallait aussi prendre en compte l’avis des paroissiens qui étaient très attachés à leur vieux curé. Il y aurait toujours des paroissiens qui profiteraient de cette discorde pour prendre partie contre les élus.

Il fut donc proposé par le maire, et voté par le Conseil Municipal, de ne pas chasser le vieux curé du presbytère où  il logeait depuis des années, mais de lui proposer, si il le souhaitait, de garder son logement actuel en contrepartie d’un petit loyer dont le montant permettrait d’installer son remplaçant.


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Le maire alla faire une visite au desservant qu’il trouva ratatiné dans un vieux fauteuil placé près de la cheminée où crépitait un bon feu de bois, les jambes couvertes d’un châle. Il lui trouva une mine affreuse. Le teint cireux du vieillard, les larges cernes entourant des yeux, les joues creusées ne présageaient rien de bon.
Le curé à la vue du maire sembla s’animer d’un peu de vie. Avec un sourire chaleureux, il proposa au premier magistrat de la commune de prendre une chaise et de s’asseoir près de lui.
Après quelques civilités d’usage et commentaires sur les problèmes que rencontraient certains habitants de la commune, le maire en vint à ce qui l’amenait présentement.

« A bientôt quatre-vingt ans, répondit le curé à la proposition du maire, où voulez-vous que j’aille ? A l’hospice, bien sûr, me direz-vous, beaucoup y vont ! Alors pourquoi pas moi ? Mais, si je peux rester dans ce logement, ce ne serait pas de refus. J’y ai passé tellement d’années ! »

Le pauvre homme de Dieu ne profita pas longtemps de cette retraite, sûrement bien méritée. Il n’eut pas non plus la joie de pouvoir assister à la messe de minuit de la Noël 1837, célébrée par son successeur. Pourtant, il aurait bien aimé. Cette fête avait toujours eu sa préférence. Tous ces chants de joie qui retentissaient dans son église pour célébrer la venue de l’enfant Jésus ! Même les hommes étaient présents cette nuit-là ! Un vrai moment de communion et de partage.

Non, le Dieu qu’il avait honoré et servi toute sa vie ne lui permit pas, car Il le rappela à lui, le 18 décembre 1837, à deux heures après midi.

François Antoine Bertrand, né le 4 novembre 1757 en la commune de Grandchain, Canton de Beaumesnil, fils de Louis Bertrand et de Suzanne Delanoé, curé de la paroisse de Marbeuf, venait de prendre quatre-vingt ans.
Le jour de son inhumation, tout le village était présent pour lui rendre un dernier hommage.



Délibération du conseil municipal

du 9 avril 1837.

lundi 16 octobre 2017

HISTOIRE DE RIRE - Voyage, voyage !

Voyage, voyage !


Deux personnes entrent dans un compartiment, sans fenêtre, qui a tout l’air d’une cabine spatiale et dans laquelle sont disposés, en rangs, plusieurs sièges.
Un jeune homme dégingandé, tatouages dans le cou, marchant au rythme de la musique diffusée par des écouteurs posés sur ses oreilles.
Une vieille dame très distinguée,  toute de noir vêtue, portant chapeau à voilette, un sac pendant à son avant-bras gauche et avançant lentement, appuyée sur une canne.
Une hôtesse, glamour, en tailleur rose bonbon, perchée sur des chaussures aux talons quasi- télescopiques, coiffée en chignon minutieusement tiré et arborant un sourire commercial gracieux, s’approche des deux passagers et les installe sur deux fauteuils contigus au premier rang. 
Le jeune homme se tourne vers la vieille dame et demande :
« Alors grand-mère, on cherche l’aventure ? »
-          Je rêvais de ce voyage depuis des années. C’est un cadeau de mes  enfants, répond la dame avec un charmant sourire.

Avec un peu de vantardise, afin de montrer sa maîtrise en toute circonstance, le jeune homme répond sur un « rythme rappeur » :
« Moi, je veux dépasser mes limites. Alors, j’y ai mis toutes mes économies.

L’hôtesse arrive, toujours perchée sur ses hauts talons quasi télescopiques. Elle  porte un plateau sur lequel se trouve deux verres emplis d’un liquide jaunâtre qu’elle propose aux deux voyageurs.

Une voix, via un haut-parleur, souhaite la bienvenue aux personnes présentes en ces termes :

« Bonjour ! Ici le commandant de bord qui vous parle. Bienvenue dans la capsule spatiale « Tout va bien rien à craindre » en partance pour Vénus. Nous allons amorcer le lancement. Nous vous demandons de bien vouloir boucler votre ceinture. »

L’hôtesse revient, tout sourire, afin de reprendre les verres vides, à présent, et vérifier que les ceintures ont bien été bouclées. Ensuite, elle se retire en tortillant du popotin.

Un bourdonnement se fait entendre et la cabine se met à vibrer doucement, puis de plus en plus fortement. Les deux voyageurs sentent de grandes vibrations.

Le jeune homme, yeux écarquillés, regarde autour de lui. Visiblement, il est pris d’une immense anxiété qui, peu à peu, se transforme en panique.
« C’est quoi ça ? s’exclame-t-il.

La vieille dame, d’un calme olympien, répond avec une implacable logique :
« Nous décollons, jeune homme. »

Devant l’état de son voisin qui a bien du mal à se maîtriser, la vieille dame relève sa voilette, ouvre son sac à main et en sort une petite boite à pilules qu’elle présente à son voisin, après l’avoir ouverte. Dedans de minuscules gélules vertes.
«  Tenez, prenez-en deux ! »

Le jeune homme avale des deux gélules conseillées et demande :
« Vous en avez pris avant d’embarquer ?
-          Moi ! s’exclame la dame. Mais non, je n’en ai pas besoin.

Mais, les médicaments, efficaces selon la vieille passagère, n’ont pas l’air d’avoir beaucoup d’effet sur le jeune homme dont les tremblements augmentent à l’unisson de la capsule spatiale, dans un tutti parfaitement orchestré.

Les vibrations, ainsi que les vrombissements s’apaisent, jusqu’à cesser totalement.

La même voix qu’avant le départ, via les mêmes haut-parleurs, annonce :
 « Ici, le commandant de bord qui vous parle. Nous venons « d’avénussir » sur la planète Vénus. Vous pouvez déboucler vos ceintures. Nous espérons que le voyage vous a plu. »

L’hôtesse, toujours haut perchée, toujours tortillant du popotin, s’approche avec toujours le même sourire gracieux-commercial.

Le jeune homme se lève. Il a l’air très mal en point. Ses dents claquent. Ses genoux s’entrechoquent. Il est secoué de tremblements nerveux.

La dame  âgée se lève également. Elle est en pleine forme ! Le sourire qui illumine son visage le prouve.

Etonné, le jeune homme tremblotant, claquetant, flagellant, la regarde, très étonné.
« Vous avez l’air d’être très en forme ? Ce voyage ne vous a pas  impressionnée ?

Haussant les épaules, la vielle personne, répond d’une voix douce :
« Mais pourquoi, jeune homme, me serais-je fait du souci ? Ce n’était qu’un voyage  dans un simulateur de vol. Un voyage virtuel, comme vous dites, vous les jeunes ! Alors, aucun risque !

Le jeune homme tombe sur son siège, la tête dans les mains. Il manque d’air. Il suffoque, toussote, crachote.
Visiblement, il n’a pas été à la hauteur !

L’hôtesse le ventile avec son plateau, ne sachant quoi faire d’autre pour calmer ce client bien impressionnable.

La dame âgée sort, lentement, appuyée sur sa canne. Ce qu’elle veut voir, maintenant, c’est la représentation de Vénus, un spectacle visuel proposé par l’agence de voyage, avant le voyage de retour.