Ensuite, vint témoigner Raoul Robert de Saint-Victor[1], le fils de Marie Françoise Radulphine Deschamps de Boishébert. Âgé de trente-trois ans, il était propriétaire et demeurait à Huyleville-sur-Scie.
« Je ne peux expliquer,
commença-t-il, ce qui s’est passé au presbytère. J’ai entendu des coups
frappés, semblables à ceux d’un maillet. Des bruits violents tels que les
enfants n’auraient pas pu produire. Je mis l’oreille contre le lambris, je
sentais très distinctement les vibrations à l’endroit de ces coups. Il est
impossible pour moi que M. le curé put les produire, souvent, il n’était pas
dans le presbytère. Étant dans l’appartement du haut, je vis le pupitre d’un
des enfants arriver vers moi sans qu’aucune force visible l’eût ainsi poussé.
Je suis convaincu que les enfants n’étaient pour rien dans ce fait, étant
immobiles dans la pièce. »
Le juge de paix posa alors cette question :
« Pensez-vous qu’il fut possible
que le berger fût l’auteur de ces faits ?
—
Non, je ne connais pas ce berger.
Athanase Bouffay[2], âgé
de trente ans, vicaire à Saint-Maclou de Rouen succéda à Raoul Robert de
Saint-Victor.
« Je me suis rendu plusieurs fois
au presbytère de Cideville. La première fois, ce bruit était continuel et
uniquement dans les appartements où se trouvaient les enfants, aussi bien à
l’église que dans le presbytère. Ce bruit était intelligent et obéissant. Lors
de ma première visite, le bruit était si fort que j’ai cru que le plancher
allait s’écrouler. Un autre jour, il nous prit l’idée d’enfoncer des clous à
l’endroit où ce bruit frappait et à ce moment, nous entendîmes une voix
plaintive. J’ai vu aussi, en haut et en bas, la table parfaitement isolée se
remuer. J’ai vu aussi une sorte de vapeur, de fantôme, se diriger de la porte
de la cuisine avec une très grande rapidité vers la chambre où se trouvaient
les enfants. »
Après ce récit quelque peu troublant, une autre
personne vint raconter ce qu’elle avait observé d’insolite. Il s’agissait
d’Adalbert Hororé Gobert[3],
trente-et-un ans, lui aussi vicaire de Saint-Maclou de Rouen.
Il affirma ce qui suit :
« J’ai entendu les bruits qui
résonnaient au presbytère. L’abbé Tinel est venu chez moi à Rouen avec ses deux
élèves et, en leur présence, j’entendis dans le plafond et le plancher de mon
appartement des bruits tout à fait analogues. »
Fut entendu ensuite, Louis Aimable Bréard, âgé de
cinquante-quatre ans, exerçant le métier de commis dans une maison de commerce
de Rouen, ville où il demeurait au numéro 12 du boulevard Cauchoise.
Voici ce qu’il déclara :
« Dans le courant de décembre, venu
au presbytère de Cideville, j’y passais deux nuits. La première, j’entendis un
bruit agaçant pendant une partie de la nuit et qui m’empêchait de dormir. Le
lendemain au déjeuner, au moment où j’étais à table en compagnie de M. Tinel et
de l’abbé Bouffay, j’entendis un coup effrayant qui frappa le plancher sous la
table. J’ai la certitude que ce n’était point les enfants qui faisaient ceci,
ni M. Tinel, non plus que le berger que je ne connais pas. »
Dans ces témoignages, il est surtout question du
bruit, tantôt lancinant, tantôt bruyant voire plus encore en intensité car qualifié
de violent. Un bruit qui poursuivait les enfants dans l’église et même à Rouen.
Un bruit nuit et jour.....
Un bruit intelligent et obéissant ! Obéissant,
sauf quand on lui demandait de se taire !
Une nouveauté toutefois, cette vapeur, sorte de fantôme
vaporeux qui suivait les enfants.
Que se passait-il donc à Cideville ?
Qui était l’auteur de cette folie ?
Il reste peu de personnes à être encore entendues. Leurs
dires permettront-ils enfin d’éclaircir le mystère du presbytère ?







