Dans l’atelier de tissage de gants de filet de soie, des rires et des chants s’élevaient de temps à autre, mais la contremaîtresse n’y voyait pas malice, tant que l’ouvrage était effectué.
Les quatre jeunes filles, dont faisait partie
Angélique Cottin, et qui avaient le même âge, travaillaient ensemble depuis
bien longtemps. Plus tout à fait des enfants, pas encore des femmes, elles
prenaient la vie comme elle venait avec le plus d’optimiste possible malgré les
difficultés qu’elles voyaient au quotidien dans leur entourage.
Dehors, il faisait déjà nuit, une nuit sans lune ni
étoile en ce début d’hiver.
Huit heures du soir. La fatigue se faisait
lourdement sentir. Les yeux commençaient à brûler. Les doigts devenaient
gourds.
Alors toutes les quatre s’encourageaient, la journée
n’était pas encore tout à fait terminée.
Tout à coup, le guéridon en chêne, commun aux quatre
ouvrières, servant à fixer l’extrémité de la trame du tissu qu’elles étaient
occupées à filer, s’agita et se déplaça.
Effrayées, les tiseuses se mirent à crier en
s’éloignant.
Remises de leur effroi, trois d’entre elles
revinrent à leur poste. Angélique attendit un peu avant de s’asseoir à nouveau
devant son métier, mais aussitôt en place, le guéridon s’agita de nouveau,
repoussé violemment par une force inconnue, avant de se renverser, entraînant
dans sa chute la jeune Angélique.
Malgré l’étrangeté du phénomène, il n’était plus
l’heure de se poser des questions. Le travail cessa.
On verrait demain matin.
Angélique passa une nuit très calme et dormit d’un
trait, aussi fut-elle reposée le lendemain à son réveil, lorsqu’elle se remit à son ouvrage.
Mais.....
Aussitôt assise, le phénomène se reproduisit.
Angélique fut donc séparée de ses compagnes et pour
éviter un autre « renversement », l’extrémité du gant sur lequel la
jeune fille œuvrait fut attachée au moyen d’un petit clou à une huche à pain pesant
pas moins de soixante-quinze kilogrammes.
La huche, pourtant très lourde, se souleva à
plusieurs reprises.
Stupéfaction générale.
Que se passait-il ?
Le diable avait-il investi l’atelier, ensorcelant la
pauvre Angélique ?
Et voilà que le bruit s’enfla, sortant de l’atelier
et parcourant le village.
Angélique était ensorcelée !!
On alla quérir monsieur le Curé pour qu’il fasse des
prières et pourquoi pas aussi un exorcisme, mais celui-ci refusa tout d’un bloc,
renvoyant la jeune fille aux médecins.
Que dirent ces hommes de science confrontés à ces
faits dépassant l’entendement ?