Historiques

jeudi 11 septembre 2025

Cideville – Une affaire qui a fait la une de beaucoup de journaux – chapitre 16

 


Catherine Hebert[1], épouse d’Antoine Fezier[2], âgée de soixante-quatre ans, fut la suivante à être entendue.

Elle vivait à Yerville et s’occupait des soins de son ménage.

Son mari, Antoine Mezidor Pezier, exerçait le métier de lardier[3].

Elle expliqua qu’étant à Yvetot, M. Fontaine l’envoya chercher par sa servante.

Ce n’était nullement pour lui commander de la marchandise, mais pour lui parler.

Arrivée au domicile de M. Fontaine[4], Catherine Hébert vit le berger Thorel. M. Fontaine, huissier à Cany, demanda à la femme Fezier :

« Avez-vous vous eu connaissance que M. Thorel soit allé demander grâce à M. Tinel à l’occasion d’une messe qui se disait à minuit ? »

Affirmant aussitôt être certain que c’était bien elle qui avait fait courir le bruit, sa propre femme l’en ayant informé.

« Ce n’est pas vrai ! protesta Catherine Hébert. Appelez donc votre épouse pour que nous nous expliquions. »

Mais, l’huissier refusa tout net de faire paraître son épouse ponctuant sa décision par :

«  Faire paraître Mme Fontaine, en présence d’une malheureuse lardière comme vous ! »

La réplique de la « malheureuse lardière » arriva sans tarder :

« Je n’ai sans doute pas autant de fortune que Madame Fontaine, mais les lardières ont autant d’honneur comme les femmes d’huissier. »

Ce fut sur cette phrase bien lancée et fort juste, que la déposition de cette femme s’acheva.

 

Bien évidemment, nous ne savons pas qui a fait courir le bruit, et en quoi il pouvait éclaircir les événements.

Que peut-on déduire de ce témoignage ?

Que les notables, en raison de leur position sociale, méprisaient le « bas peuple » ?

 

Nicolas Appolonius Varin[5] fut le suivant à être entendu.

Né le 17 avril 1814 à Cideville, Nicolas Appolonius, âgé de 37 ans, était marchand épicier dans sa ville natale.

Voilà ce qu’il exposa :

« Le 6 décembre, à Cideville, Félix Thorel est venu chez moi pour acheter du tabac. J’étais à prendre un petit verre avec un nommé Auguste, domestique de Madame Boishebert. Félix Thorel vint se mêler à notre compagnie et parlant des bruits se produisant chez M. Tinel, il dit : 

« M. le Curé n’est pas débarrassé, dans trois semaines il ne le sera pas encore. Il ne faudrait pas que ça vous étonne que dans six semaines il ne le sera pas encore et que le presbytère tombera en démence».

Et il ajouta :

« Vous remarquerez que M. le Curé est attaqué par un homme qui en sait aussi long que lui. Vous savez que celui qu’il est venu débarrasser Amédée Lamure gendre du père Abel s’est trouvé avec M. le Curé et qu’ils ont eu des mots ensemble et que cet homme pourrait se venger parce que M. le Curé n’avait pas raison d’empêcher cet homme de gagner sa vie ».

Je fis alors observer :

« Comment se fait-il que c’est aux enfants que l’on fait du mal et non à M. le Curé ? »

 La réponse fut celle- là : « M. le Curé vit avec les enfants, il en tire un bénéfice ».

 

Les dires de Nicolas Appolonius Varin sont clairs et embrouillés en même temps.

Ils nous renvoient au tout début de l’histoire.

 

Reprenons cette phrase de sa déposition :

Vous savez que celui qu’il est venu débarasser Amédée Lamure gendre du père Abel s’est trouvé avec M. le Curé et qu’ils ont eu des mots ensemble et que cet homme pourrait se venger parce que M. le Curé n’avait pas raison d’empêcher cet homme de gagner sa vie.

 

Cette phrase ne ferait-t-elle pas allusion au moment où le curé Tinel, allant au chevet d’un malade, jeta dehors un certain Girard, guérisseur-sorcier.

Amédée Lamure, dont il est question, serait, selon mes recherches, Arsène Amédée Lamure, né le 16 décembre 1802 à Limesy, mais surtout décédé le 28 février 1849 à Cideville.

Il était en effet le gendre d’Abel Marc, charron, vivant à Cideville.

Céleste Mathilde Marc, la fille d’Abel, avait bien convolé avec Arsène Amédée Lamure.

De la rancune de la part du guérisseur Girard qui ainsi jetait dehors de la maison du mourant n’avait pu gagner sa vie.

 

Quant au curé, le voilà accusé d’être intéressé par l’argent que lui rapportent ses deux étudiants.

 

Oui bien sûr, mais les bruits, les objets volants....

Magie ? Sorcellerie ?

La suite donnera peut-être une explication.

 



[1] Catherine Hebert née le 20 novembre 1787 à Yerville – décédée le 19 Décembre 1864 à Yerville.

[2] Antoine Mezidor né le 23 mars 1795 à Auzouville-l’Esneval – décédé le 18 mars 1860 à Yerville. Catherine Hebert et Antoine Mezidor Pezier s’étaient unis le 25 novembre 1820.

[3] Lardier : marchand spécialisé dans la vente du lard.

[4] Aucune information trouvée sur M. et Mme Fontaine.

[5] Nicolas Appolonius Varin avait épousé Ambroisine Scolastique Bellemare, le 22 décembre 1844 au Mont-de-l’If (76). Ambroisine, née le 24 juin 1823 au Mont-de-l’If, travaillait aussi dans l’épicerie.

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