mercredi 20 novembre 2024

La famille Demandolx de la Palud - chapitre 2

 


Louis-Jean-Baptiste Gaufridy était donc devenu un proche de la famille Demandolx de la Palud, d’autant plus qu’il était le directeur spirituel de la maîtresse de maison et de ses trois filles.

Madame Demandolx de la Palud, née Françoise Louise de Glandeves Gréoux avait épousé, le 21 mai 1587 à Marseille, Antoine de Demandolx La Palud. 

Le jeune curé avait pris, notamment, en charge l’éducation de la plus jeune, Madeleine. Après la communion de la jeune fille, il avait convaincu ses parents de la placer chez les Ursulines.

 

Madeleine, née à Rians, le 29 août 1591, comme toutes les jeunes filles de son âge, rêvait de fêtes, de toilettes et d’un mariage d’amour.

Son caractère romantique voyait dans le jeune curé au visage aimable un possible prétendant.

Oui, elle était attirée par ce jeune homme qui s’était aussi amouraché d’elle.

 

Ce fut contre son gré que Madeleine se plia à la volonté de ses parents en acceptant d’entrer comme novice au couvent des Ursulines. Cette décision fut adoucie lorsqu’elle apprit que Louis-Jean-Baptiste Gaufridy enseignait, dans l’établissement religieux, à un groupe de jeunes filles dont elle ferait partie. N’aurait-elle pas quelques privilèges, comme celui de se retrouver parfois seule avec lui ?

 

Mais  que se passa-t-il au fil des jours au couvent des Ursulines pour que, peu à peu, Madeleine perde l’appétit, sombre dans un silence inquiétant. Le regard absent, les yeux cernés, les joues pâles, elle dépérissait.

Devant cet état dépressif, la mère supérieure des Ursulines, Catherine de Gaumer, renvoya la jeune novice de dix-sept ans chez ses parents, avant de décréter, quelques mois plus tard, avoir perçu les signes de la présence de démons chez Madeleine....

Délire et hallucinations ?

 



Allez, je poursuis mon délire !!

 

Vers le vert pré,  allons un ver dans un verre, chaussés de vair, en déclinant des vers....

 

Un réel nœud de « ver » !

 

·         Vers                     : préposition désignant une direction.

·         Vert                     : couleur obtenue en mélangeant du jaune et du bleu.

·         Un ver                 : un ver de terre ou lombric.

·         Un verre              : petit récipient servant principalement à boire.

·         Du vair               : fourrure de l’écureuil petit-gris. Cendrillon portait des                                              pantoufles de vair, celles-ci, avec le temps, sont devenues                                        des pantoufles de verre – plus  glamour, mais moins confortables !!

·         Des vers              unité de base d'un poème. Suite de mots présentant une certaine longueur,                                     un rythme et une musicalité ...



 

Je vous laisse imaginer la scène, pittoresque à souhait, mais n’essayez pas d’y trouver un quelconque enseignement. Laissez-vous simplement porter par votre imagination.

mercredi 13 novembre 2024

Quel délire !

 

Après avoir évoqué les aventures des « so », avançons dans les homonymes...

Bien entendu, vous connaissez tous la comptine :

 

Il était une fois,
Une marchande de foie,
Qui vendait du foie,
Dans la ville de Foix...
Elle se dit ma foi,
C'est la première fois
Et la dernière fois,
Que je vends du foie,
Dans la ville de Foix.

 

Je n’en ai pas trouvé d’autres aussi complètes.

 

Il va donc me falloir les composer moi-même.

 


Que pensez-vous de :

Un thon en poche, ton tonton tond ! Tout à coup, le ton monte entre tonton et le thon.

 

Il est facile d’imaginer un enfant (garçon ou fille, rien ne le précise), neveu ou nièce du tonton qui tond (oncle maternel ou paternel, tondant une pelouse) et qui est avec une autre personne qui lui répond sans doute à une question telle que : « Que fait tonton ? ». Ce tonton a dans sa poche un thon (quelle drôle d’idée ! mais pourquoi pas !!).

Une querelle entre le thon et le tonton. Le thon ne se sentant assurément pas bien hors de son milieu naturel. Il est certain que pour le thon ce n’était pas de bon ton.

Enfin, ce n’est qu’une interprétation !

Quelle est la vôtre ?

Que peut comprendre une personne ne maîtrisant pas bien la langue française ?

 

·         Un thon :           Grand poisson bleu argenté, vivant en banc.

·         Ton :                    adjectif possessif

·         Tonton :             mot familier désignant un oncle.

·         Tond :                  du verbe tondre – 3ème groupe – 3ème personne du présent : couper à ras.

·         Le ton :               qualité de la voix en intensité, timbre et hauteur caractérisant les sentiments.     

                            Si le ton monte, la querelle n’est pas loin.

 

 

mercredi 6 novembre 2024

Quelle phrase !!!

 


Puisque je vous ai entraîné (e)s dans le délire des homonymes, je vais vous soumettre une phrase qui me vient tout droit de mon papa qui la tenait lui-même d’un de ses instituteurs.

La voilà :

Un sot portant un sceau dans un seau fit un saut et les trois « so » tombèrent.

 

Je ne vais pas décliner l’origine de tous ces « so », seulement vous réécrire la même phrase avec des synonymes.

 

Un  sot :  idiot – borné – ignorant ....

                                        Portant un sceau : cachet, empreinte,                                                                                  griffe,    marque,                                                                                      signature....

                                        Dans un seau : récipient avec une  anse....

                                        Fit un saut : bond – soubresaut - écart.....

 Et les trois « so » tombèrent : dans ce dernier cas, on écrit le son phonétiquement.

 

À vous, maintenant, de réécrire la phrase selon votre bon vouloir !!!

 

Un petit village tranquille.




 

Beauvezer[1], signifiant « Beau à voir », petit village de montagne méritait bien son nom.

Niché à 1 150 mètres d’altitude dans la haute vallée du Verdon, ce lieu subissait les neiges l’hiver et les débordements intempestifs du Verdun au printemps, mais il y faisait bon vivre. Entre l’élevage et le produit de la laine que filaient les femmes le soir auprès de l’âtre, entre les fêtes religieuses et villageoises, le temps s’écoulait doucement, calmement.



 

Ce fut en cet endroit que naquit, en 1572, Louis Jean Baptiste Gaufridy dont le père était berger.

Il fut donné à l’enfant, comme parrain, son oncle, Christophe Gaufridy, curé de la paroisse de Pourrières[2].

En sa qualité de parrain, Christophe Gaufridy prit en charge l’éducation et l’instruction de son filleul.

Les parents, pauvres et non instruits, ne pouvant donner à leur enfant qu’un avenir aussi misérable que le leur, il ne fut donc pas difficile de convaincre ceux-ci de faire entrer Louis Jean Baptiste dans les ordres.

Leur fils aurait ainsi un toit et de quoi manger, car dans les petits villages où le mènerait l’exercice de la prêtrise, ses paroissiens ne le laisseraient pas dans le besoin.

L’enfant apprit à lire, à écrire, à compter, puis aussi quelques rudiments de latin, sans oublier le rituel liturgique et l’administration des sacrements.

À dix-huit ans, il partit à Arles pour d’autres études, celles de théologie qui devaient le mener à la prêtrise.

 


Ordonné prêtre, rattaché à l’abbaye de Saint-Victor de Marseille, il célébra sa première messe dans son village natal, en présence de ses parents emplis d’une immense fierté envers ce fils devenu savant et respecté.

 

Jeune prêtre, il desservit de nombreuses paroisses et devint curé des Accoules dans le vieux Marseille sur la rive nord du Vieux-port, au sud du quartier du panier.

Une belle situation qu’il dut à la famille Demandolx de la Palud, originaire tout comme lui de Beauvezer dont il était devenu un familier.

À Marseille, très vite, il quitta le monastère pour prendre un petit « chez-soi » plus confortable.

 

Louis-Jean-Baptiste Gaufridy était un homme enjoué, aimant la bonne chair. Très vite, il eut ses entrées dans la haute société qui appréciait sa compagnie et il avait table ouverte, notamment, chez les  Demandolx de la Palud.


                                                                                                                           ..................   à suivre

[1] Beauvezer comptait en 1471, 52 feux si on compte une moyenne de 5 à 6 personnes par feux (foyers), cela donne environ une population entre 350 et 400 personnes. En 1765, soit un peu moins de deux siècles plus tard, le recensement de la commune affichait : 629 habitants.

[2] Pourrières, village sur un éperon rocheux, dernière vigie romaine du flanc sud-est de la Montagne Sainte-Victoire. En 1568 fut fondé le couvent des Minimes, contigu à l’antique église de Notre-Dame du Bois, doté pour douze religieux. Ce monastère cessa toute activité en 1770. La grande peste de 1720 épargna le village. La famille paternelle du peintre, Paul Cézanne, de Pourrières.

jeudi 31 octobre 2024

Un chaland regarde un chat lent sur un chaland.

  

Que comprendrait un étranger, maîtrisant mal la langue française, en entendant la phrase suivante ?

 


Un chaland regarde un chat lent sur un chaland.

 

Premier « chaland » :

Nom masculin, ayant pour féminin une chalande. Une chalande, pas très courant !! D’ailleurs le chaland ainsi que la chalande prennent leur temps...

Le mot chaland connut évidemment différentes orthographes :

·         Chalant – 1174.

·         Chaulant – 1250/1300.

·         Chalan – XIVème siècle.

Chaland est le participe présent du verbe chaloir (importer – commercer).

 

Issu du latin calere = être chaud

Qui au sens figuré prit la signification de : être sur des charbons – s’inquiéter.

 

Un chaland,

·         celui qui s’inquiète pour..

·         qui trouve un intérêt à ...

Mais qui fut aussi employé pour :

·         Un ami – un compagnon (1250-1300).

·         Un amoureux (1771).

·         Ou encore, au XIIIème siècle, un compagnon exerçant le même métier qu’un autre.

·         Puis aussi, une personne qui achète habituellement chez le même commerçant, sens que lui attribua Rabelais en 1548, avec une petite nuance de coquin....

 

En ce qui concerne présentement notre chaland, il est un promeneur sans but, à l’affût d’un événement hors du commun.

Est-il inquiet ?

À vrai dire rien ne le précise.


 




Deuxième « chat lent » :

Un chat, un félin des plus ordinaires, qui est d’une grande lenteur dans les soins qu’il apporte à sa toilette, passant et repassant sa patte derrière son oreille, comme le chat de Marcel Aymé dans « les contes du chat perché ».

Un chat lent... Nonchalant en quelque sorte !

Un chat lent vivant sur un chaland !

 



Troisième chaland :

·         Caland en 1080.

·         Chaland vers 1160.

Un mot dont l’origine remonte au grec byzantin khelandion, terme de marine désignant un grand bateau plat servant à transporter des marchandises.

 

Ce chat lent se trouve donc sur un chaland qui passe nonchalamment sur un cours d’eau.

Le chaland sur le chemin de halage regarde passer le chaland sur lequel le chat lent fait lentement, paresseusement, sa toilette.

 

Une scène paisible, ne trouvez-vous pas ?

 

Pour cette petite histoire autour d’un mot,

Je me suis aidée du

                   « Dictionnaire historique de la langue française » Le Robert

 

Les deux frères

 

 Georges et François Rimy étaient connus pour avoir fait, dans leur jeunesse les quatre cents  coups ! Quatre cents ? Peut-être même bien plus d’ailleurs.

Arrivés à l’âge adulte, ils vivaient tous deux de la fabrication du gruyère.

Dans leur commune, Charmey, ils n’étaient pas les seuls, beaucoup de paysans tout comme eux fabriquaient du fromage à partir du lait de leurs vaches.

Mais voilà ! Les deux frères Rimy faisaient un meilleur profit !

Il n’en fallut pas plus pour que des regards accusateurs se dirigent vers eux, que des langues assassinent les accusent.

Les accusent de quoi ? D’être des Milch-Zieher, des voleurs de lait.

Car si les deux frères avaient plus de lait, c’était bien évidemment parce qu’ils volaient celui de leurs voisins.

Et comme les Rimy n’avaient jamais été pris sur le fait, c’était parce qu’ils utilisaient la magie.

 

La rumeur grossit, s’enfla comme la « grenouille de la fable de La Fontaine », et voilà Georges et François accusés de sorcellerie comparaissant devant les juges.

Ils expliquèrent qu’ils ne volaient pas le lait de leurs voisins, mais que leur production venait tout simplement d’une bonne gestion de leur élevage.

D’abord, ils choisissaient leurs vaches.

« Une vache est toujours une vache, répondit le Juge qui n’en avait jamais fait l’élevage.

        Que non ! certaines sont meilleures laitières que d’autres !

        Et vous les trouvez où ces vaches exceptionnelles ?

        Sur les foires aux bestiaux, pardi ! Il faut choisir des vaches de race « Schwytzer[1] ».

        Et ces vaches produisent plus, dites-vous ? Comme ça ? D’un coup de magie ? Poursuivit le Juge.

        Nulle magie là-dedans, répondirent les frères. Une vache, même très bonne laitière comme la « Schwytzer » doit être bien soignée et bien nourrie.

 

Et voilà Georges et François rivalisant de commentaires, expliquant avec beaucoup de passion leur travail, l’amour de leur troupeau qui les remerciait par une abondance de lait à chaque traite.

 

Les voisins furent toutefois dubitatifs, pour eux, les deux frères utilisaient des sortilèges.

Les juges, malgré de forts soupçons, non convaincus, car n’y connaissant rien en matière de bovidés et de lait, libérèrent les frères Rimy.

 

L’histoire qui se passait au milieu du XVIIème siècle s’arrête là, n’ayant aucune information des suites de l’affaire.

 

Mais, en fouillant, j’ai découvert des accusations similaires.


 


En 1517, un certain Christian Born fut également accusé d’être un « voleur de lait ». Mais un siècle plus tôt, les croyances étaient bien plus ancrées et cet homme qui ne sut se défendre fut brûlé au Guintzet[2] pour sorcellerie.

Sa femme, Collette, fut mise au pilori, accusée uniquement de vol.

 

Le jeune Claude Bernard, âgé de douze ans, subit le même sort en 1651, son exécution eut lieu au Belluard[3].

 

Ils ne furent pas les seuls sorciers ou envoûteurs, nous le verrons bientôt.



[1] Vache de couleur grise de petit format, rustique, qui fournit des quantités respectables de viande et de lait - en moyenne 3 600 kg de lait par période de lactation. Avec son faible poids, elle ménage le sol. Elle est capable de paître même sur des terrains escarpés.

[2] Colline dominant la ville de Fribourg où se dressait le gibet et où le bûcher était élevé pour les exécutions.

[3] Autre lieu de Fribourg.