mercredi 17 avril 2024

Agression au Carmel

 

 


Sœur Saint-Barthélemy, devant les deux hommes à l’attitude fort peu amène,  chercha à fuir en se réfugiant dans la buanderie, mais ils la suivirent.

Semelaigne tendit une lettre à la carmélite qui lui prit des mains en le suppliant :

« Laissez-moi ! »

Mais, en lui montrant le couteau qu’il tenait dans sa main, Semelaigne répliqua :

« Si tu t’en vas, je te tue ! »

Le couteau brillait dans la main du malfaiteur.

Cette arme n’avait-elle pas été affûtée dans la matinée par un rémouleur rencontré sur le chemin ?

Ainsi remis à neuf, le couteau s’avérerait être d’une grande efficacité.

 

Tremblante, sœur Saint-Barthélemy, vit par la petite fenêtre de la buanderie approchée sœur Saint-Joseph qui inquiète de son absence prolongée venait à sa rencontre. Désirant la prévenir du danger, elle lui fit un signe qui, malheureusement, ne fut pas compris.

Lorsque sœur Saint-Joseph arriva près de la porte de la buanderie, Le Roy qui s’était muni d’une bûche, lui en asséna un coup violent à la tête. La pauvre femme s’effondra sous le choc.

Sœur Saint-Barthélemy voulut se précipiter pour lui porter secours, mais elle fut interceptée par Semelaigne qui la saisit par le bras, lui mettant la pointe de son couteau sur le cœur.

« Fais ta prière ! hurla-t-il.

     Oui, répondit calmement sœur Saint-Barthélemy, reprenant un peu de détermination, je vais prier le Bon Dieu pour vous. Seulement, laissez-moi ! 

 

Le couteau changea de main, car Le Roy l’avait arraché de la main de son complice et aussitôt en sa possession, il renversa la sœur et, la maintenant au sol à l’aide d’un de ses genoux, abattit la lame sur la religieuse qui essayait de parer autant qu’elle le pouvait les coups, les bras en avant. Blessée, elle se sentit défaillir et perdit connaissance, alors que chancelante, sœur Saint-Joseph se relevait, la tête ensanglantée.

 

Par miracle, Gendron, un des jardiniers employé au Carmel, alerté par des bruits de voix et de bagarre arriva sur les lieux. Il ne perdit pas son sang-froid, et malgré son grand âge, empoigna Semelaigne, le renversa violemment, avant d’attraper Le Roy au collet.

Devant la force décuplée par la colère du vieil homme, les deux voyous demandèrent grâce et s’enfuirent par où ils étaient arrivés.

Gendron venait de sauver les deux carmélites, laissant filer les voleurs, n’ayant plus l’âge de les poursuivre.

N’était-il pas préférable de porter secours aux deux blessées ?

Lui-même avait une plaie à un bras, œuvre de la lame du couteau utilisée par Le Roy et terriblement bien affûtée par le rémouleur qui avait assurément fait, hélas, de la belle ouvrage.


Le docteur Bidaut, appelé d’urgence constata que sœur Saint-Barthélemy présentait six entailles aux bras. Une chance que la carmélite avait eu la présence d’esprit de se protéger à l’aide de ses bras, car si la lame avait atteint la poitrine, elle n’aurait pas survécu.

L’état de sœur Saint-Joseph était plus inquiétant en raison du coup violent qu’elle avait reçu à la tête et qui l’obligea à garder le lit plusieurs. Vertiges et douleurs l’assaillaient sans répit.

 

Aussitôt prévenu de l’agression au Carmel, Monseigneur l’Evêque d’Evreux se rendit immédiatement sur place.

 

Quant aux deux brigands, ils avaient filé, mais pas bien loin. La police ne mit pas longtemps à les retrouver dans un des cabarets du faubourg Saint-Léger. Ils n’opposèrent aucune résistance face aux forces de l’ordre, car Semelaigne et Le Roy étaient fin saouls.

Direction la prison d’Evreux où ils purent dessoûler au calme et au frais dans une cellule.

Un héraut ou un héros, lequel choisir ?

 


Chrétien de Troyes écrivaient : un hyraut d’armes.

Mais quelle est l’origine de ce mot, héraut ?

Il est issu du francique Heriwald = chef d’armée.

·         Hari : armée

·         Wald : qui règne

 

On retrouve le mot dans le langage gallo-romain sous la forme : heriwald

Et aussi :

·         En italien            : araldo

·         En espagnol      : heraldo

·         En allemand      : herold

·         En anglais           : herald

 

Au moyen-âge, un héraut était un officier chargé de transmettre des messages importants, de régler les cérémonies et de s’occuper des blasons.

Au XVème siècle, ce hérault prit une toute autre fonction. Il était seulement chargé d’annoncer la venue de quelqu’un, notamment dans les grandes cérémonies.

 

De héraut découle une hérauderie, mot qui n’est plus de tout usité.



 

Et le héros alors ?

Ce mot vient

·         Du latin classique, heros      : demi-dieu, homme de grande valeur.

·         Du grec hêrôs                       : chef militaire de la guerre de Troie tels Ulysse,     

                                                    Agamemnon....

 



Et ce nom masculin possède un féminin, une héroïne.

·         Une héroïne est une femme qui s’est distinguée par une grande action (Ronsard – 1578).

·         Un héros est un homme de grande valeur (Ronsard – 1555).

 

Un héros est un homme de grande valeur, digne de l’estime publique, un homme au-dessus du commun ou un personnage principal dans une œuvre littéraire (Scarron – 1651) d’où l’expression : un héros de roman.

 

Par extension, on trouve :

·         Le héros d’une aventure (1734)

·         Le héros de la fête (1734)

·         Le héros du jour (Mallarmé – 1874).

Des valeurs, des qualités qui s’appliquent aussi aux héroïnes.

 

Les héros, êtres d’exception, envahissent les romans, les BD et les films.

 

Si il existe des héros, en 1940, apparaît l’antihéros. En clair, monsieur tout-le-monde.

L’antihéros n’a pas de féminin, normal les femmes sont toutes des héroïnes.

 

1968, les super-héros pullulent, mais aussi les super-héroïnes (superwoman, wonder woman...)

 

   

Le héros a évolué dans ses capacités, devenant de plus en plus invincibles grâce à des pouvoirs surnaturels, alors que le héraut s’est vu attribuer des tâches de moindre importance. Mais pourtant ce héraut dut, un temps, être un véritable héros.

 


Pour cette petite histoire autour d’un mot,

Je me suis aidée du

                   « Dictionnaire historique de la langue française » Le Robert

 

vendredi 12 avril 2024

Intrusion au carmel

 


Le chemin de nos deux compères ne se fit pas sans petites haltes, arrêts nombreux dans divers débits de boissons ou cabarets, où pour quelques sous ils se soûlaient avec du mauvais vin. Les nuits se passaient à la belle étoile, dans des granges ou encore dans quelques maisons de tolérance.

Inutile de préciser que les deux hommes émergés rarement des brumes de l’alcool.

 

À l’approche du Carmel de Gravigny, en fin de matinée du 21 novembre 1883, les deux malfaiteurs se dirent que s’il y avait de l’argent quelque part, c’était bien dans ce lieu. De l’argent et aussi quelques objets précieux à dérober. Mais, il fallait pouvoir pénétrer l’endroit.

Pourquoi ne pas demander l’hospitalité jusqu’au lendemain ?

Ce serait assurément l’idéal, car dans le silence du sommeil des religieuses, Le Roy et Semelaigne auraient tout loisir de se servir sans être dérangés.

Mais à leur demande de rencontrer la Supérieure du Carmel, la sœur-portière refusa de leur ouvrir.

Les deux hommes furent terriblement ulcérés du refus qu’ils venaient de subir.

Un saint lieu ne se devait-il pas être hospitalier ?

 

Alors, ils firent le tour du Carmel et après avoir escaladé un mur, se retrouvèrent dans une cour.

 

Dans le calme de ce début d’après-midi, sœur Saint-Barthélemy s’affairait au lavoir. Entendant des pas derrière elle, elle se retourna pensant que ce ne pouvait être que les ouvriers embauchés pour divers travaux.

La règle imposait qu’aucune sœur ne devait se présenter à quiconque sans voile. Étant tête nue, sœur Saint-Barthélemy s’apprêta à se réfugier dans la buanderie.

Que ne fut pas sa surprise de se retrouver face à deux étrangers au regard menaçant.

mercredi 10 avril 2024

Être girond ou gironde


 

Girond (e) : adjectif argotique apparu en 1815.

Puisant, peut-être, ses origines dans le verbe girer (tourner) du latin gyrare.

 

Du verbe girer découle le verbe gironner : tourner

 

En 1682, une gironde était un médaillon circulaire. Ce qui attesterait le rapprochement avec ronder : tailler en rond.

 

Girer donna girard – giraud dont la définition est très élogieuse : Beau, bien tourné, rond, bien en chair.

 

Une femme gironde est donc une belle femme aux formes avantageuses, répondant à des critères de beauté d’une certaine époque.

D’ailleurs, dans un motet du XVIIIème siècle, un des personnages principaux est une femme prénommée Girondelle. Je pense que celle-ci devait être bien replète....

 

 

Tous ceux qui ont pour nom de famille Girard ou Giraud devaient, assurément, avoir dans les temps reculés un ancêtre (homme ou femme) à la belle prestance et peut-être particulièrement beau ou belle.

Alors consultez votre arbre généalogique et essayez de dégotter des photos !!

Bon courage !!

 

 

Pour cette petite histoire autour d’un mot,

Je me suis aidée du

                   « Dictionnaire historique de la langue française » Le Robert

 

mercredi 3 avril 2024

Un mot affectueux et empli de tendresse.

 


 

J’adore faire des poutous à mes petits-enfants, sur leurs joues bien rebondies !

 

Ce mot poutou est d’origine occitane et il est attesté dans notre langage depuis 1784.

On trouvait aussi : poudoun et poutoun.

 

Ce n’est pas un mot « académique », mais « familier » désignant un baiser affectueux et sonore.

Sonores au point que je les nomme « des petits rossignols », car j’en module le son !

 

Mais, saviez-vous que de ce mot découle un verbe ?

Il s’agit du verbe, poutouner.

En ce qui me concerne, je poutoune des milliers de « petits rossignols » sur les joues de mes petits.

 

Vous avez aussi :

·         Le bécot donnant le verbe bécoter.

·         La bise

·         Le bisou

 

 

Pour cette petite histoire autour d’un mot,

Je me suis aidée du

                   « Dictionnaire historique de la langue française » Le Robert

 

Entre Carmel et prison

 


Alors que les Sœurs Carmélites s’installaient dans leur nouveau Carmel et s’adonnaient à leurs tâches journalières, priaient et chantaient de leurs voix angéliques, naissaient deux enfants de sexe masculin.

 

Louis Auguste Semelaigne, le 26 octobre 1858, à Conches-en-Ouche dans l’Eure.



Édouard Le Roy, le 23 mars 1859 à Lambezellec, proche de Brest, dans le Finistère.

 

Leur parcours fut assurément moins pieux que celui des Sœurs Carmélites. Si leur carrière débuta par de petits larcins, ils furent vite qualifiés de « mauvais garçons, bagarreurs, voleurs, ivrognes, débauchés » et plus encore...


Pour chacun d’eux, les condamnations et amendes s’enchaînèrent. Un engrenage vers la désescalade !

Leur réputation leur fermait les portes de l’emploi, les contraignant à verser à nouveau vers leurs mauvais penchants.

Le cercle infernal !

 

Pas d’emploi, pas d’abri, car pour avoir un toit au-dessus de la tête, il fallait payer le logeur. Pas de logement, c’était dormir à la belle étoile ou dans une grange isolée...... Délit de vagabondage et retour à la case prison.

 

Comment se rencontrèrent Louis Auguste Semelaigne et Édouard Le Roy ?

C’est très simple ! Ils furent incarcérés, entre autres, à Rouen aux mêmes dates !

Édouard purgea trois peines à la prison de Bonne-Nouvelle :

·         Le 24 février 1881                   6 mois                  vagabondage

·         23 février 1882                        4 mois                  vagabondage

·         24 mai 1883                             4 mois                  vagabondage

 

Louis Auguste écopa de quatre peines dans la même prison du quartier Saint-Sever de Rouen :

·         31 août 1882                          2 mois                  filouterie d’aliments

·         23 novembre 1882                 3 mois                  filouterie d’aliments

·         28 février 1883                      2 mois                  filouterie d’aliments

·         25 mai 1883                           4 mois                  filouterie d’aliments

 

Entrés à une journée d’intervalle en mai 1883, ils effectuèrent une peine de même durée et sortirent quasi le même jour.

Hors des murs de leur cellule, il leur fallait trouver de quoi subsister.

Que savaient-ils faire à part filouter et voler ?

Et c’était reparti !!

 

Mais en Seine-Inférieure, ils étaient bien trop connus des autorités. Brest et le Finistère ? Trop loin !

Alors, leurs pas les menèrent dans le département de l’Eure, fief de débauches de Louis Auguste.

Rouen, Elbeuf, Le Neubourg, Evreux.....

Et pendant le trajet, tous deux réfléchissaient à leur devenir, échafaudaient des plans, établissaient des stratégies.

mercredi 27 mars 2024

Au Carmel d'Evreux

 

En 1856, les sœurs carmélites du Carmel de Pont-Audemer s’installèrent dans de nouveaux locaux nouvellement construits à Gravigny.

 

La vie de ces carmélites, ponctuée de prières, était aussi une vie de labeur puisque pour subvenir à leurs besoins, elles devaient travailler. 

Le Carmel d’Evreux situé à Gravigny, non loin de la maladrerie, était un lieu de paix et de méditation.

 

Le calme de cette communauté religieuse fut malgré tout bouleversé.








Que se passa-t-il le 21 novembre 1883 au Carmel d’Evreux ?


Le diable ne s’était-il pas invité dans le lieu ?

 

 

C’est ce que je vous propose de découvrir......

À partir de la semaine prochaine.