jeudi 19 juin 2025

Un galibot

 


Ce nom masculin vient du picard galibier, déformation de galaubier, désignant un polisson.

Au milieu du XIIIème siècle, on employait le terme, une galoberie, pour parler d’un divertissement.

·         Une galoberie, du verbe galer : s’amuser.

D’ailleurs, à la même époque, une loberie était une cajolerie trompeuse. (de lober : tromper).

 

De déformation en déformation, le langage des mines s’est emparé du terme, de galibier (polisson), il est devenu galibot, jeune manœuvre, âgé de onze à quatorze ans, travaillant sur les voies dans les houillères, pour un franc journalier.


Pour cette petite histoire autour d’un mot,

Je me suis aidée du

                   « Dictionnaire historique de la langue française » Le Robert

 


mercredi 18 juin 2025

Cideville – Une affaire qui a fait la une de beaucoup de journaux – chapitre 4

 


Nous voilà, à présent devant le juge de paix de Yerville, Lucien Auguste Folloppe.

Un moment fatidique en ce début d’année 1851 où il fallut, à la justice, trancher sur la véracité des faits et la culpabilité du berger Thorel.

Comme vous le verrez au fil des témoignages, il y eut beaucoup de :

·         « j’ai entendu dire... ».

·         « on m’a rapporté.... ».

 


Les témoins défilèrent à la barre, jurèrent de « dire toute la vérité, rien que la vérité », sur les événements qui s’étaient déroulés dans le presbytère de Cideville.

Des dizaines de témoins...

·         Des gendarmes, bien sûr,

·         Des propriétaires,

·         Des curés,

·         Des vicaires,

·         Des servantes,

·         Des habitants de Cideville et des alentours de Pavilly à Rouen.

 

Comment faire ressortir l’exactitude des faits dans tout cela ?

Je vous propose de le découvrir, petit à petit au cours des semaines à venir, précisant à chaque fois l’identité de chaque témoin notée sur le procès-verbal du procès, agrémentée des trouvailles découlant de mes recherches sur leur qualité, profession et filiation.

 

Le juge de paix, Lucien Auguste Folloppe, fut assisté du greffier assermenté, Ernest Paul Roussel, dans sa lourde charge de jugement.

Quelques renseignements sur :

 

·         Lucien Auguste Folloppe – né le 7 germinal an 9 (28 mars 1801) à Routot – étudiant  domicilié à Bourdainville en 1819, lorsqu’il s’est marié le 3 novembre 1819 avec Suzanne Adélaïde Duchesne.

Fils de Pierre Martin Folloppe et d’Aimée Sophie Lasnon, Lucien Auguste fut maire d’Auzouville-l’Esneval et juge de paix du canton de Yerville.

En 1851, année du procès Thorel/Tinel, Lucien Auguste Folloppe apparaît sur le registre du recensement d’Auzouville-l’Esneval où il vivait avec sa famille.

 

·         Ernest Paul Roussel – né le 4 mars 1829 à La Chaussée (canton de Dieppe) – fils de Paul Hyacinthe et de Marie Catherine Geneviève Halé.

En 1851, Ernest Paul Roussel était domicilié à Yerville.

Il se maria dans cette ville le 10 décembre 1860, avec Élisa Constantine Jouanne. Lucien Auguste Folloppe était un des témoins.

mercredi 11 juin 2025

Cideville – Une affaire qui a fait la une de beaucoup de journaux – chapitre 3

 


 Devant un tel chaos, le pauvre curé ne savait plus à quel saint se vouer, même ses prières à Sainte-Rita semblaient impuissantes.

 

Chacun savait que Félix Thorel était responsable de ces faits, mais comment le prouver ?

 

Au presbytère, la vie devenait infernale.

Pour lutter contre les maléfices, un des hôtes du curé eut alors l’idée de frapper en tous sens dans le vide, muni d’une longue pointe de fer. La lame cinglait l’air avec violence zigzaguant dans un sifflement, sans grand résultat au début.  Après quelques minutes, il se produisit des étincelles autour de la pointe de fer, comme si elle heurtait un objet dur. Puis des gémissements se firent entendre presque imperceptibles et de plus en plus intenses. Alors, une voix résonna dans la pièce implorant le pardon. Une voix !

Quand la lame cessa ses moulinets punitifs, tous les objets reprirent leur place et le silence  envahit les lieux. Un silence lourd et oppressant qui, peu à peu, s’allégea. Le presbytère retrouva alors la paix.

 

Le lendemain, Félix Thorel se présenta au presbytère demandant à voir le curé. Le berger essayait de dissimuler les blessures qu’il avait au visage.

Des blessures ?

D’où provenaient-elles ?

 

À genoux devant l’ecclésiastique, le berger demanda pardon.

Si le prêtre pardonna, il porta tout le même l’affaire en justice.

Thorel ne lui avait-il pas causé grand tort ?

 

Le juge de paix d’Yerville fut chargé de l’instruction du dossier pour sorcellerie et, pour se faire une opinion, interrogea de nombreux témoins.

Êtes-vous tacite ?

 

Tacite – adjectif (1460) – provenant du latin tacitus :

  • Þ     Dont on ne parle pas.
  • Þ     Qui n’est pas formellement exprimé.

Exemple :

Présent dans certain contrat juridique : « par tacite reconduction »

Þ     Qui se poursuit si aucun écrit ne met un terme au contrat.

Ou encore en parlant d’une personne – dérivé de tacere = taire :

  • Þ     Qui ne parle pas.
  • Þ     Silencieux.
  • Þ     Calme.

De tacite découle l’adverbe, tacitement :

  • Þ     Sans être formellement exprimé (1474).
  • Þ     En cachette, à voix basse (1495).

 

Et puis, il y a taciturne, adjectif emprunté au latin taciturnus (1485)

                        Þ     Silencieux

                        Þ     Qui ne parle pas

·         À l’origine, taciturne qualifiait un endroit où il n’y avait aucun bruit.

·         Un temps, il fut un synonyme de tacite (1519).

Þ     Non formellement exprimé. (un tacite consentement)

Depuis 1530 et encore aujourd’hui, taciturne est employé pour qui ne parle pas (par humeur ou par tempérament).

De taciturne découlent :

·         Taciturnement :     Adverbe (1512)  : en silence.

   
 
Adverbe (1857)   : de manière taciturne.

·         Une taciturnité (1375) du latin taciturnotas – atis :

Ø  Discrétion (1531).

Ø  Paresse à écrire (1638).

Une personne taciturne : une personne qui parle peu.

Ce qui n’est pas mon cas, alors j’arrête là .......

Pour cette petite histoire autour d’un mot,

Je me suis aidée du

                   « Dictionnaire historique de la langue française » Le Robert

mercredi 4 juin 2025

Cideville – Une affaire qui a fait la une de beaucoup de journaux – chapitre 2


 


Girard sous les verrous criait vengeance, et celle-ci devait être terrible.

Le berger Thorel fut mandaté pour exécuter cette sentence hors du commun.

 

Vengeance contre le curé Tinel[1]. Jean Louis Sénateur Tinel[2] était considéré par tous comme un brave homme. Il demeurait à Cideville depuis peu ayant remplacé le curé Vason[3]. Il habitait le presbytère avec sa sœur, Adèle Adélaïde, et avait en pension deux jeunes garçons, tous deux fils d’instituteurs, souhaitant intégrer le séminaire : Gustave Lemonnier et Clément Bunnel, âgés de douze et quatorze ans au moment des faits.

 

Félix Nicolas Thorel[4] demeurait dans le village d’Auzouville-l’Esneval[5] à quelques lieues de Cideville où il menait paître ses moutons. Facile pour lui d’approcher le curé et ses hôtes sans être remarqué, et notamment, les jeunes élèves dont il avait la charge.

 

Comment le berger  allait-il s’y prendre ?

Ne devait-il pas être discret ?

Ce fut un jour de vente publique en cette fin d’année 1850, qu’il choisit pour effectuer son méfait. S’approchant de Gustave Lemonnier, alors qu’il était absorbé par ce qui se passait autour de lui, Thorel toucha discrètement la chemise du jeune étudiant.

Son geste fut-il accompagné d’une invocation aux esprits démoniaques ?

 

Le soir même, les deux garçons furent pris de malaise. L’un, d’une grande anxiété, ne pouvait trouver le sommeil. Le second avait perdu la vue.

Mais ce ne fut pas tout.

Une forte bourrasque s’abattit sur le presbytère. Les murs tremblèrent sous l’assaut du vent, les vitres volèrent en mille éclats, les murs et le plancher vibrèrent.

Et puis, comme pris dans une danse infernale, les objets s’agitèrent : couverts, vaisselles, brosses, balais, chaises et tables, couverture et draps des lits, vêtements divers. Les portes des placards et buffets, les couvercles des coffres s’ouvaient et se refermaient, marquant le rythme de ce curieux ballet.

Dans un tourbillon, toutes ces choses, suspendues dans l’air, s’entrechoquaient dans un bruit tel qu’il était perçu à une demi-lieue à la ronde.

 

Tous les habitants du village s’étaient regroupés, à bonne distance toutefois, du presbytère et constataient avec frayeur ce phénomène hors du commun. On vint aussi des villages alentour.

 

Le curé Tinel priait avec ferveur, exorcisait les lieux à grand renfort d’eau bénie. Mais face à ce déferlement incontrôlable, sa foi n’avait aucune emprise.

 

Quelle force diabolique sévissait en ces lieux ?



[1] Le nom du curé est également orthographié Thinel sur certains documents.

[2] Né le 16 avril 1816 à Yébleron (76) – fils de Louis et Marie Catherine Avenel.

[3] Augustin Vason.

[4] Il avait vu le jour le 10 septembre 1820 à Yerville. Il travaillait pour le compte de Guillaume Pain, propriétaire cultivateur à Cideville.

[5] Information : recensement de 1851.

Une saga ?

 


Ce mot vient de l’ancien norrois[1], saga : dit, conte.

Lui-même de :

  • ·         L’allemand sagen            : dire.
  • ·         L’anglais to say               : dire.

 

Une saga, terme littéraire, désignant un récit historique médiéval scandinave et par extension un récit légendaire (mythe) de toute civilisation.

En Angleterre, par exemple, une saga est l’histoire d’une famille : « la saga des Forsyte » de John Galsworthy[2].

Mais attendez un peu ....



Une saga est aussi, en zoologie (1876), une grande sauterelle verte vivant dans le midi de la France.

Aucun lien avec la saga familiale précédemment évoquée quoique....

 

Qui veut s’atteler à l’écriture de la saga d’une famille de sagas ? Une saga sous fond de vendetta avec leurs voisines les cigales......

Allez-y, car même le poète Frédéric Mistral[3] n’y a pas pensé !

Pour cette petite histoire autour d’un mot,

Je me suis aidée du

                   « Dictionnaire historique de la langue française » Le Robert

 



[1] Correspondant aux premières attestations écrites de la langue scandinave.

[2] John Galsworthy    14 août 1867 - 31 janvier 1933 -  lauréat du prix Nobel de littérature en 1932. 

[3] Frédéric Mistral -  né le 8 septembre 1830 et décédé le 25 mars 1914 à Maillane.

mercredi 28 mai 2025

Cideville – Une affaire qui a fait la une de beaucoup de journaux – chapitre 1



En ce temps-là, les superstitions et croyances étaient tenaces.

On croyait à Dieu et à Diable, au mauvais œil
et aux jeteurs de sorts.

On préférait aller voir le rebouteux que le docteur. On se méfiait de l’apothicaire et de ses remèdes.

On fréquentait l’église plus par peur du curé qui ne manquait jamais de reprocher les absences de chacun aux messes dominicales. Ainsi montré du doigt, l’enfer n’était pas loin.

 

En quelque sorte, chacun se méfiait de chacun, et il était préférable de ne pas trop en dire (surtout sur ses biens) afin de ne pas attiser la jalousie et l’envie. Le soir, les volets étaient tirés pour éviter les regards indiscrets.

 

La médisance était presque une activité communale (commune à tous les villages), peut-être pour éloigner de soi toute répréhension, toute attaque.

 


Dans cette atmosphère de suspicions, il était un personnage très redouté, le berger !!

En contact continuel avec la nature, il connaissait les plantes, celles qui provoquaient le mal, tout comme celles qui apaisaient. C’étaient souvent les mêmes, d’ailleurs, question de dosage. Et puis, il connaissait les astres aussi.

 

Tout commença étrangement un jour où le curé Tinel se rendant au chevet d’un de ses paroissiens alité découvrit dans la maison de ce dernier, un certain Girard, guérisseur-sorcier.

Que faisait ce charlatan de mauvaise réputation dans la demeure du malade ? Le curé prit d’un coup de sang fit chasser l’individu de sa paroisse. Peu de temps après, Girard fut arrêté et jeté dans une geôle. Condamné à deux ans d’emprisonnement, le guérisseur jurait vengeance et pria un de ses amis et disciples d’agir violemment contre le curé.

Cet ami, un « berquet » nommé Thorel dévoué à son maître se surpassa......

 

Voilà le début de cette sombre histoire....

                                                                                                                                              à suivre......

Sabouler ?

 

Le verbe sabouler apparaît vers 1530.

Cela ne va pas vous étonner si je vous révèle que son origine est incertaine !

Mais il pourrait avoir pris naissance à partir de deux autres verbes :

  • ·         Saboter : secouer
  • ·         Bouler   : renverser (en 1390, bouler = chambouler).

À son origine, sabouler était employé dans le sens de : houspiller ? Puis vers 1546, dans celui de bousculer, secouer.

À la forme pronominale, se sabouler signifie :

  • ·         S’agiter (1628).
  • ·         Se battre (XVIIIe siècle).

Un mot qui exprime donc le mouvement, parfois violent comme l’explique :

  •   ·         Vers 1830             : frotter – cirer (avec beaucoup d’ardeur !!)
  •        Fin XIXe siècle   : laver énergiquement.

Y a-t-il de la violence dans ce verbe se sabouler qui, vers 1935, s’employait pour : s’apprêter, se farder ?

Quelques mots découlant de ce verbe et qui sont sortis d’usage :

  • ·         Un saboulement (1573)
  • ·         Un saboulage, utilisé en 1673, par Mme de Sévigné.

 

Le maître saboulait sa servante qui au lieu de sabouler au lavoir le linge sale, passait son temps à se sabouler avec des fards de couleurs vives. À se sabouler de cette manière, le maître ne risquait-il pas un coup de sang ?

Pour cette petite histoire autour d’un mot,

Je me suis aidée du

                   « Dictionnaire historique de la langue française » Le Robert

mercredi 21 mai 2025

Cideville – Une affaire qui a fait la une de beaucoup de journaux


 


Que diriez-vous d’un voyage dans le temps, au milieu du XIXe siècle, dans un petit village du Pays de Caux, en  Normandie ?

Un endroit comme beaucoup d’autres où survivaient de nombreuses légendes et la peur des sortilèges  et envoûtements.

Alors malgré le chant des oiseaux, l’odeur du foin coupé, les cris des enfants et le chant joyeux des femmes lavant le linge, chacun avait un œil suspicieux sur ses voisins, surtout si quelques soucis venaient entacher le quotidien.

Monsieur le curé veillait sur ses ouailles, en père protecteur, et venait asperger d’eau bénite maisons et étables hantées pour rassurer les plus inquiets.

 

En cette année 1851, à la mairie, Monsieur Adolphe Cheval et à l’église le curé Louis Thinel servaient une population de 346 administrés pour le premier et 346 âmes pour le second. Tous deux attentifs.

Bien évidemment, ils travaillaient de concert pour le bien de tous.

 

Alors, pourquoi tout à coup, tout sembla partir à vau-l’eau ?