La geôle !
C’était une grande salle commune, avec de la paille
sur le sol et un seau dans un coin.
Ce pouvait être aussi un petit espace individuel,
avec une petite ouverture munie de barreaux et sans vitre, aux murs sales, au
sol recouvert de paille changée peu souvent, sauf si le prisonnier payait pour
avoir de la paille fraîche au moins tous les cinq jours. Un seau pour les
besoins, vidé normalement tous les jours. Normalement !! Dans ce réduit,
une forte odeur d’urine, d’excréments, d’humidité. Un lieu glacial en hiver,
étouffant en été.
Le soleil d’août dardait ses rayons et malgré la
chaleur suffocante, Françoise Fontaine hurlait, tapait du pied et des poings
sur la porte et cela nuit et jour. Tout ce tapage résonnait dans les couloirs
et empêchait les autres prisonniers de dormir. Ceux-ci d’ailleurs se
révoltèrent. Le gardien lui-même menaça de démissionner. Il n’arrivait pas à
maintenir l’ordre dans la prison.
Quant au prévôt, il était parti en service du roi et
ne devait revenir qu’à la fin du mois d’août.
Aussitôt revenu, il fut averti des troubles
provoqués par la prisonnière Fontaine.
Il ne fallait donc pas perdre de temps et régler
cette affaire au plus vite afin que le calme revienne.
La jeune femme fut aussitôt sortie de prison et transportée
au parquet, mais aussitôt arrivée, alors que l’interrogatoire venait de
commencer, il se produisit des phénomènes des plus étranges.
Françoise Fontaine tomba sur le sol à plat dos, les
bras étendus, la gorge enflée, les yeux exorbités. Puis son corps fut comme
traîné en tous sens, balayant le sol, avant de s’élever à deux pieds de
hauteur.
Le prévôt effrayé sortit de la salle du parquet et
referma précipitamment la porte sur laquelle des coups violents étaient portés.
On alla quérir d’urgence le curé de Louviers (M.
Belet), un médecin (L. du Roussel) qui était de confession protestante, un
apothicaire et un barbier.
Ce fut donc en force que tout ce petit monde pénétra
dans la salle d’audience.
Devant l’état de la femme, le médecin du Roussel
diagnostiqua : « assurément, elle
est possédée du malin esprit ».
L’apothicaire suggéra : « pour empêcher le sorcier de mal faire, il
faut le battre avec un balai neuf de bois de bouleau. »
On frappa alors la prisonnière par-dessus ses
vêtements et elle revint à elle, mais à la première question formulée, une
nouvelle crise la prenait.
Le remède manquait d’efficacité durable.
Le curé Belet essaya l’exorcisme, commençant
celui-ci par une aspersion d’eau bénie.
L’effet fut immédiat, la possédée revint à elle, disant : « Je suis
lasse. »
Elle semblait n’avoir aucun souvenir de ce qui
venait de se passer.
Le curé lui montra alors un crucifix. Aucune
réaction, si ce ne fut qu’un léger soupir.
Le calme était-il enfin revenu ?
L’eau bénie et le crucifix avaient-ils effrayé le
démon au point de l’expulser du corps de Françoise Fontaine ?
C’en était assez pour aujourd’hui, demain serait un
autre jour et les interrogatoires reprendraient.
De retour dans sa geôle, la prisonnière s’endormit
aussitôt, rompue de fatigue.
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