Rigolos et surins, les deux armes des
malandrins !
Avant de poursuivre mes investigations sur les crimes des
Apaches, et de vous en rendre compte, je tenais à vous soumettre un texte
savoureux, découvert dans le journal « Le Radical », en date du 20
février 1903.
Le voilà :
ENCORE LES APACHES
Les deux coqs – Sur le sentier de la
guerre –
A l’assaut d’un wigwam ! – Six arrestations
Plus ça va, plus c’est la même
chose. On a beau rafler, incarcérer, juger et reléguer, les Apaches continuent
à foisonner et à faire pleuvoir autour d’eux les balles de revolver. Bientôt,
ils se battront sur les boulevards, à la mitrailleuse ! .....
Dans la nuit de mardi à
mercredi, une rencontre homérique a eu lieu entre deux bandes de ces estimables
individus : Les Apaches du Sébasto ayant déclaré la guerre aux Apaches de
la Courtille.
Le mobile de la haine existant
entre ces deux collectivités de revolvériseurs professionnels ?....
Toujours le même !.... Voyez la fable des deux coqs.
Donc, hier matin, les Apaches du
Sébasto, s’étant concertés, délaissèrent le calumet et mirent, au nombre de
quinze environ, le pied sur le sentier de la guerre. Il s’agissait de
« refroidir » en douceur et de scalper un Apache de la Courtille qui
avait enlevé son Hélène à un Ménélas des alentours des Halles.
Ils arrivèrent, le collet du
pardessus relevé, les mains dans les poches, et en observant la prudence du serpent,
jusque sur les bords du canal Saint-Martin.
Le Paris de la Courtille était
là !
Mais en présence du nombre de
ses adversaires, il prit courageusement la fuite.
Il se réfugia en un Wigwam,
restaurant de la rue du Faubourg-du-Temple, où quelques-uns de ses amis et
collègues jouaient tranquillement... à
la manille.
A peine leur avait-il exposé les
faits de la cause – comme on dit au Palais – que les Apaches du Sébasto firent
irruption dans l’établissement. Ceux de la Courtille se levèrent alors, et se
mirent en posture de défense.
-
A toi-z’à
moi la paille de fer !.... s’écria un Sébasto, et il tira son
« rigolo » et son « surin »
Ce geste et ce cri furent le
signal d’une effroyable bagarre. Des détonations retentirent, de larges
boutonnières furent ouvertes dans des poitrines et dans des abdomens ; des
Apaches s’affaissèrent parmi les verres et la vaisselle cassée !.....
Quand la police arriva – un
quart d’heure après la bataille – les Apaches encore valides avaient pris la
fuite. Parmi ceux qui demeuraient, quelques-uns étaient assez gravement blessés
pour qu’on fût obligé de les transporter à l’Hôtel-Dieu.
Enfin, six chevaliers de la
casquette, qui n’avaient pas de lésions graves, ont été mis en état
d’arrestation.
Espérons qu’ils ne seront pas
relaxés. Car il serait grand temps d’en finir avec toute cette canaille. Que
ces Indiens de Paris se tuent entre eux, tant pis, ou plutôt tant mieux !
..... mais des balles pourraient s’égarer, comme cela s’est déjà produit.
-=-=-=-=-
Cet article
n’est pas signé.... Mais, tous mes compliments à son auteur.
Raconter
cette échauffourée sanglante avec autant d’humour, c’est un exploit.
Pas de nom
toutefois pour approfondir une quelconque recherche.
Deux
noms de bandes
Celle du Sébasto :
Sébasto ?
Le boulevard de Sébastopol.
Ce boulevard
ouvert en 1854, fut percé par Haussmann lors de la transformation de Paris.
Sébastopol, port de Crimée pris par les Anglais et les Français, le 8 septembre
1855, après un long siège.
Celle de la Courtille :
La Courtille,
endroit de fêtes et de plaisirs où l’on trouvait beaucoup de guinguettes pour
boire, manger et danser. La Courtille se situe non loin de Belleville.
Les
lieux énoncés
Les Halles.
Elles se situaient dans le quartier de la Villette,
non loin du canal Saint-Martin.
La rue du Faubourg-du-Temple.
Cette voie, très ancienne, conduit à Belleville.
Concernant le vocabulaire employé, l’argot ou le langage populaire, je
vais vous éclairer un peu.
Un rigolo, dans ce contexte n’est pas un homme qui fait rire,
mais un pistolet, une arme à feu.
On peut employer aussi : un flingot – un flingue – un rif, riffe
ou encore riffle....
A toi-z’à moi la paille de
fer !
L’expression « À toi, à moi, la paille de fer ! » était employée
notamment chez les forgerons, frappant tour à tour sur le fer, afin de donner
la cadence, de se stimuler mutuellement.
La « paille de fer » désignant la barre de fer sortant de la
forge et qu’il fallait travailler.
Au regard de l’article, on
pourrait interpréter cette phrase
ainsi :
« A qui l’tour, y’en aura pour tout le monde » ou encore
« l’un après l’autre et qu’ ça dégage ! »
Le mobile de la rixe
Une femme qui avait trouvé refuge dans les bras d’un homme faisant
partie d’une bande rivale.
D’où l’évocation de Hélène, enlevée à Ménélas par Paris qui, en son
temps, déclencha la guerre de Troyes.
Sachez toutefois, que l’enlèvement de la belle n’entrainait pas que
des déceptions amoureuses, il était aussi, et surtout, pour l’amant délaissé un
gros problème «économique ».
Oui, oui, vous avez bien entendu.
Problèmes de cœur, certes, quoique, à mon avis, beaucoup plus
« d’amour propre » .... Mais problèmes d’argent, certainement, car
beaucoup de chefs de bande mettaient leur(s) maîtresse(s) sur le trottoir et si
on les appelait des « gagneuses », ce n’était pas pour rien.
Cela me rappelle une histoire qui a fait grand bruit dans les années
1900-1902.
Une histoire semblable.
Une femme, au doux prénom d’Amélie. Elle quitta son amant, Joseph,
pour tomber dans les bras de Dominique.....
Les journaux en parlèrent encore et encore......
Je me propose de vous la conter, cette histoire.
Qu’en pensez-vous ?
Oui ?
Mais pour cela, il vous faudra attendre la semaine prochaine.
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