Scapin s’imagine alors en grand chevalier, bravant
l’épaisse végétation, affrontant armes à la main le terrible esprit, et le
terrassant.
Sa victoire sur les forces des ténèbres le verrait
regagner, triomphant, le village, menant une ribambelle de lutins disparus
depuis des siècles et revenant ainsi, grâce à lui, dans la lumière rayonnante
du beau pays de Kohlkopfland, sous les acclamations de la population en délire
devant cet exploit extraordinaire.
-
Scapin est de
retour, venez tous !
-
Il a vaincu les
mauvais esprits de la forêt ! !
- Hourra ! ! Quel courage ce Scapin !
- Je savais bien qu'il était le meilleur de
tous les lutins ! !
Grisé par ces acclamations, Scapin-le-Héros, se
redresse gorgé de fierté en apercevant dans la foule, légèrement en retrait, sa
maman dont les yeux brillent de bonheur devant la soudaine notoriété de son
rejeton.
Scapin soupire les yeux rivés sur l’orée de cette
immense étendue forestière.
Il lui semble entendre la douce musique d’un violon
qui l’attire malgré lui.
Scapin se dirige lentement vers les premiers arbres.
Ceux-ci projettent déjà, sur lui, leur ombre, mais Scapin est résolu, il ira
combattre les esprits de la forêt.
Les premiers arbres franchis, le petit lutin essaie de
se repérer. Difficile, en réalité, car des fougères géantes l’empêchent de voir
devant lui. Il lui faut écarter les lourdes tiges avec ses deux mains pour se
frayer un passage. Levant le nez, il n’aperçoit que les troncs dressés
semblables à des mâts de navires. Les branches de ces titans alourdies par un
feuillage abondant, obstruent la lumière du soleil.
Dans un tel endroit, où diriger ses pas ?
Comment apercevoir l’antre maléfique ?
Entouré de végétation, sans visibilité, Scapin scrute
les bruits environnants et essaie d’en analyser l’origine.
Cette forêt est vraiment très mystérieuse et Scapin
regrette, à ce moment précis, de n’avoir aucun pouvoir salvateur.
« Maintenant, il est trop tard pour revenir en
arrière, se dit-il. En avant ! »
Et, pour se donner du courage, il se met à chanter à
tue-tête. Faux évidemment !
Ses pas d’hésitants, deviennent plus aisés. L’aventure
commence à l’amuser. Soudain, il s’arrête, le cœur battant, tous les sens en
éveil.
Quel est ce bruit ?
Tétanisé par la peur, il n’ose bouger. C’est certain,
un être est là près de lui et l’observe.
- Oh
là, là ! ! pense-t-il déjà beaucoup moins fier.
-
Salut, dit une
petite voix. Que fais-tu ici ?
Les yeux de Scapin s’arrondissent d’étonnement.
-
Jamais
Génie des bois n’aurait une si petite voix, se dit-il pour se rassurer.
Se retournant, notre héros en herbe se retrouve nez à
nez avec une petite boule de plumes…
-
Bonjour ! se
contente de répéter le volatile. Je suis Douillette, la petite caille. Que
viens-tu faire dans la forêt ? Ne sais-tu pas que les lutins ne doivent
pas s’y aventurer ?
-
Bonjour, répond
Scapin soulagé devant ce tout petit personnage. Je m’appelle Scapin.
Et d’une voix qu’il s’efforce de raffermir pour la
rendre plus brave, il ajoute :
-
Je suis à la
recherche de l’esprit maléfique qui hante cet endroit. Je vais, de ce pas,
délivrer tous les lutins qu’il garde emprisonnés. Sais-tu où il se
trouve ?
-
Un esprit
maléfique dans cette forêt ! reprend incrédule l’oiseau. Non, je ne suis
pas au courant !
Et d’un coup d’aile, Douillette s’élève au-dessus de
la tête de notre petit ami pour disparaître dans les feuillages.
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