Etienne ne semblait pas indifférent à Madelaine[1], mais n’était-ce pas simplement de l’attirance physique due à la réputation de légèreté de la jeune femme ?
Un jour, alors que Madeleine travaillait dans les vignes, Etienne vint la surprendre. Tous deux passèrent un agréable moment qui fut renouvelé quelques jours plus tard dans un champ voisin où Madelaine coupait de l’herbe.
Le dimanche suivant, ce fut main dans la main que les deux amants se
rendirent au bal.
Cette aventure n’allait-elle pas devenir une tendre mélodie
d’amour ?
Mais..... Un soir, alors que
Madelaine Bonis se trouvait devant le château, apercevant son amoureux, elle se
précipita vers lui. Celui-ci fut très étonné de la voir aussi avenante.
Il le fut encore plus lorsqu’elle lui susurra à l’oreille :
« Te souviens-tu de nos ébats dans les vignes et dans le champ ?
Ne nous sommes-nous pas amusés au bal dimanche dernier ? »
Que se passait-il ?
Elle n’avait pas rêvé. Pourquoi tout à coup cette indifférence ?
Avait-il rencontré une autre fille, plus à son goût ?
Elle tarda à s’endormir et les rêves qu’elle fit furent des plus
troublants.
Etienne était avec elle, empressé, mais son visage était celui d’un
autre et à sa vue, elle se sentait glacée. Puis, accompagnée de nombreuses
filles et femmes donc le visage ne lui étaient pas inconnus, à califourchon sur
une fourche, les autres sur différents animaux, elle survolait la ville et ses
alentours, lançant des sorts ou tuant des animaux. Le plus terrifiant, furent
les danses dans lesquelles la petite troupe se lança au son strident d’une
flûte et cet homme tout de noir vêtu, ressemblant
étrangement à Etienne, tout proche d’elle.
Madelaine se réveilla en sursaut, ruisselante de sueur et transie de froid. Dehors, le coq venait de pousser un premier « cocorico » des plus impératifs.
La jeune femme épuisée se leva péniblement. Il fallait faire l’ouvrage.
Une journée pénible pendant laquelle, à chaque instant, revenaient les
cauchemars nocturnes, dans un brouillard épais. Des cauchemars qui, à présent,
lui semblaient de plus en plus réels.
Et si tout cela était réalité ?
Ce n’était peut-être pas Etienne, mais cet homme en noir, celui du rêve,
qui l’avait rejointe par deux fois.
Un homme qui après réflexions n’avait rien d’humain. Pas un
humain ? Alors qui ?
Le diable !!!
Madelaine en fut toute tremblante et sa raison vacillait.
N’y avait-il pas, dans la ville de Sélestat, des cas d’envoûtement, des
femmes séduites et qui se donnant au diable se damnaient pour l’éternité ?
Ne serait-elle pas devenue l’une d’entre elles ?
[1] Aucune indication sur la date de naissance de
Madelaine Bonis, née à Rodern, fille de Jean Bonis avec aucune mention du nom
de sa mère.
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