mercredi 7 mai 2025

Entre Lisieux et Orbec – Madeleine Morin – chapitre 2

 


Madeleine Morin avait repris le fil de sa vie.

Le 22 juin 1716, alors que le soleil venait tout juste de poindre à l’horizon, Madeleine partit d’un bon pied au bourg de Farvaques.

En chemin, elle fut agressée. Elle reçut grand nombre de coups de bâtons sur la tête, sur l’épaule gauche, au ventre... La douleur fut telle que la pauvre jeune femme perdit connaissance. Ce fut sa sœur qui la découvrit gisant sur le sol la tête couverte de sang.

À la question : « Qui t’a agressée de la sorte ? »

Madeleine répondit : « La voisine..... »

 

Le sieur du Bois, grand chirurgien de Fervaques, vint au chevet de Madeleine afin de la soigner. Il la trouva dans un état pitoyable, avec de multiples contusions : sur le sommet de la tête, sur l’omoplate gauche, sur la région du foie. De plus, elle avait une terrible fièvre et tombait fréquemment en syncope. »

 

Le 10 juillet, le praticien revint visiter Madeleine qui se plaignait de forts maux de tête. Trouvant étrange la contusion sur le sommet du crâne de la blessée, il y pratiqua trois incisions pensant voir apparaître un épanchement de sang. Que ne fut pas sa surprise lorsque qu’apparurent une aiguille et deux épingles qu’il s’empressa d’ôter.

Le 22 juillet, il fit, en raison des grandes douleurs que ressentait Madeleine, huit incisions sur le bras gauche, il en enleva
alors sept épingles et une aiguille.

L’étonnement du grand chirurgien croissait avec le nombre d’épingles recueillies.

Le 10 septembre, le sein gauche de la pauvre femme produit sous le scalpel de l’homme de science six épingles.

Le 28 septembre, sous les fausses côtes de la patiente, du Bois récupéra encore trois épingles.

 

Y avait-il quelque sortilège là-dessous ?

 

Car ce n’était pas fini !

Le 3 novembre, de nouveau auprès de la blessée, ce fut encore du côté gauche, dans la cuisse et la jambe, que furent encore extraites des épingles, au nombre de huit.

 

Le chirurgien malgré toute sa science en matière de médecine ne comprenait rien à tout cela. Il en parla au sieur Lange fils, médecin de ses amis.  Le 10 janvier 1717, ils furent tous deux témoins de l’extraction de sept nouvelles épingles au sein gauche de Madeleine.

Le médecin Lange, perplexe, mais ne croyant pas à quelque possession diabolique, avait émis cette réflexion :

« Si les vomissements de chenilles pouvaient s’expliquer par l’ingestion des fruits et légumes..... mais les épingles ! »

Ils ne pouvaient garder cette étrangeté pour eux, il leur fallait d’autres avis et les médecins de Lisieux furent sollicités. Sur la recommandation de ces derniers, Madeleine Morin fut admise le 28 janvier 1717 à l’hôpital général de Lisieux.

Dans une chambre, sans aucun autre malade, surveillée nuit et jour par deux religieuses, elle fut mise en observation.

 

Et devant de nombreux témoins, le phénomène se poursuivit.

Du 22 janvier, jour de son admission à l’hôpital et jusqu’au 29 avril, ce furent soixante-deux épingles et une aiguille, maintenant sur toutes les parties du corps, côté gauche et côté droit.

Toutes ces épingles furent l’objet d’un minutieux examen.

 

Elles étaient toutes sans tête, de différentes grosseurs et semblaient avoir été étêtées avec des ciseaux. Elles étaient courbées de la même manière.

Celles en fer étaient un peu noires.

Celles en laiton étaient intactes.

 

Avant l’apparition des épingles, la malade était prise d’une forte fièvre et de vomissements de sang.

 

Puis il se formait, à certains endroits, une petite boursoufflure qui grossissait. Il était alors possible de sentir sous le doigt l’aiguille avant qu’elle ne soit à fleur de peau. À ce moment précis, il suffisait d’inciser avec un bistouri et de la recueillir avec une pince.

Sur les incisions ainsi pratiquées, il était appliqué de l’huile d’olive pour une parfaite cicatrisation.

 

Combien de temps dura le phénomène ?

Madeleine Morin sortit-elle enfin guérie de l’hôpital ?

 

Laissons au docteur Lange le temps de rassembler ses notes et de donner son diagnostic.

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