12 avril 1776
« Il est des monstres de
toutes especes (sic), le trait suivant le prouve. Le 2 Septembre 1775, on a
trouvé, sur le grand chemin de Péronne par Compiégne, proche Séchelles, un
jeune enfant sourd & muet, âgé d’environ douze à treize ans. On l’a conduit
à Paris & mis à l’Hôpital général, avec l’indication ci-dessus (sic). Il a
été mené ensuite à l’Hôtel-Dieu pour cause de maladie, & il y est resté
pour servir selon ses forces dans une des salles. Etant parvenu maintenant à
l’âge de quinze ans ou environ, il s’exprime par signes d’une manière assez
sensible, pour faire entendre. 1°. Qu’il est d’une famille honnête & aisée.
2°. Que son père (sic), qui étoit boiteux, est mort. 3°. Que sa mere (sic) est
restée veuve avec quatre enfans (sic) ; sçavoir (sic), trois filles &
lui. 4°. Que sa-dite mere (sic) portoit des rubans, avoit une montre, de beaux
habits, une maison vaste & des domestiques pour la servir, & que
lui-même il y a toujours été servi. 5°.
Qu’il y avoit un grand jardin, un Jardinier pour le cultiver, & que ce
jardin raportoit (sic) beaucoup de fruits : il explique ce que l’on
faisoit pour le conserver pendant l’hiver. 6°. Qu’en un certain jour on l’a
fait monter sur un cheval avec un Cavalier. 7°. Qu’on lui a mis un masque, afin
qu’il ne vit pas où on le menoit. 8°. Qu’après l’avoir mener bien loin, le
Cavalier l’avoit abandonné. Il s’agit de faire rendre à ce misérable enfant son
nom, son état & ses biens.
Monseigneur le Comte de
Saint-Germain, Secrétaire d’Etat, ayant le département de la Guerre, ordonne à
toutes les brigades de Maréchaussées du Royaume, de faire les informations
& recherches les plus exactes pour découvrir, s’il est possible, le lieu de
la naissance du jeune homme dont il s’agit, ainsi que les noms & qualités
de ses parents, & de lui en donner avis sur le champ. Le zèle de la Brigade
qui sera parvenue à faire cette découverte intéressante, sera récompensé par
une gratification. »
Appeler
« monstre » un enfant sourd et muet, voilà qui est terrible.
Plus
terrible encore, le comportement de cette mère qui fait abandonner son enfant,
surement très loin de son domicile pour ne pas être inquiétée.
Aucune
réponse, dans les jours et mois, qui suivirent suite à la demande
d’identification de ce jeune enfant. Etait-ce par discrétion pour épargner la
famille ?
Voilà
qui nous ramène aux « enfants sauvages » et explique leur existence.
Etre
différent, tout simplement, et voilà l’enfant confié à Dame Nature. Seuls les
plus robustes devaient survivre. Alors une question frôlant l’horreur :
Combien sont morts de faim, de froid ou dévorés vivants par un animal
sauvage ?
Celui dont parle l’article a, au moins, eu la chance
d’être recueilli et a pu ainsi montrer qu’il n’était pas « un monstre »,
mais un être humain intelligent malgré sa différence.
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