Le
père de Jeanne arriva très tôt le matin, souhaitant faire le trajet de retour
avant les grosses chaleurs de la journée. Pour une fois, Caroline ne fut pas
obligée de répéter maintes fois à sa fille de rassembler ses affaires.
Tout
était prêt en temps et en heure !
Jeanne
était tellement heureuse de partir, de retrouver sa chambre, ses affaires, sa
vie d’avant...
Après
avoir embrassé tante Adélaïde qui malgré son grand sourire semblait bien triste
de les voir partir, la route parut interminable à Jeanne tant son impatience
d’arriver était immense.
Mais
aussitôt de retour, dans sa chambre, au cinquième étage d’un immeuble ancien
dont la fenêtre donnait sur la rue, Jeanne se sentit désemparée.
Pourquoi ?
Elle
n’aurait su le dire. Elle n’avait même pas envie de mettre son portable en
charge afin de prendre connaissance des messages qu’il contenait et qui
devaient s’être amoncelés au cours de ses quinze jours où elle fut déconnectée
du monde.
Ces
messages, d’ailleurs, devaient être accompagnés de photos montrant lieux et
activités de vacances, avec commentaires alléchants et sûrement un peu
mensongers, histoire d’attiser curiosité et jalousie.
De
la frime, quoi !
Jeanne
se leva et alla ouvrir la fenêtre de sa chambre. La rue était déserte.
Normal !
Les vacanciers avaient déserté la ville.
La
chaleur commençait à être lourde, l’air irrespirable. Un orage en perspective,
sans doute.
Jeanne
se rassit sur son lit. Quelque chose lui manquait. Quelque chose qu’elle
n’arrivait pas à définir. Seule dans sa chambre qu’elle se faisait une joie de
retrouver, elle se posa cette question : « Que faire ? »
Ce
fut alors qu’elle repensa à la lettre qui lui avait été remise par le Père
Hubert.
Où
l’avait-elle mise ?
Elle
fouilla dans sa valise, éparpillant ses vêtements un peu partout en petits tas
informes.
Rien !
L’avait-elle
oubliée chez tante Adélaïde ?
Elle
se voyait pourtant la ranger ! Mai, où ?
Jeanne
commença à s’énerver. Décidément, rien n’allait !
Partout
où elle allait, elle se sentait mal !
Tout
ce qu’elle entreprenait tournait à la catastrophe !
Ne
trouvant pas l’enveloppe, Jeanne rejoignit sa mère dans la cuisine où elle
préparait le repas.
Voyant
arriver son « ado unique et préférée » l’air renfrogné, Caroline
comprit aussitôt que l’humeur n’était pas au beau fixe. Mais, prudente, elle
attendit que sa chère Jeannette lance les offensives.
« On
mange quoi, ce soir ?
-
Des salades composées.
-
Bof !
Jeanne
ouvrit les portes des placards les unes après les autres, puis celle du
réfrigérateur.
Pas
faim, mais envie de manger pour combler l’ennui !
Soudain
Jeanne se tourna vers sa mère :
« Mon
jean ? Où est mon jean ?
-
Ton jean ? demanda Caroline
-
Bah oui ! Mon jean ?
-
Je te précise, tout de même, que tu en
as plusieurs.
-
Celui que j’avais hier !
-
Il est dans la machine, il sera sec
demain
-
Dans la machine !
-
Jeannette, cela fait belle lurette qu’on
ne lave plus à la main ! répliqua Caroline avec humour.
-
Ah, c’est drôle ça ! répondit l’adolescente
qui n’avait pas saisi la pointe d’humour de sa mère
-
Quand tu auras fini de faire là tête à
longueur de temps et d’envoyer bouler tout le monde, il sera peut-être
possible, enfin, de discuter ?
Jeanne
n’entendit pas la remarque de sa mère. Furieuse, elle avait quitté la
cuisine avant d’entrer dans sa chambre
dont elle claqua violemment la porte.
Caroline
soupira.
L’adolescence
avait bon dos pour excuser les sautes d’humeur, mais il y avait des limites à ne
pas franchir.
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