Chapitre 2
Comme chaque soir, en ce 6 mai 1890, Jules Adolphe Dubuc ferma son
établissement vers les onze heures et demie, après le départ du dernier client.
Comme chaque soir, avec son garçon de café, Jean Hya[1]
dit Victor, il compta la caisse et rangea la recette dans le coffre du petit
cabinet, tout en longueur, derrière la salle principale.
Au départ de son employé, Jules Adolphe Dubuc éteignit les lumières
des salles donnant sur la rue et s’en alla porter un bol de soupe à une de ses
locataires, Madame Molière, occupant un petit appartement au premier étage de
la maison.
Cette jeune femme, épouse d’un représentant de commerce en
déplacements chaque semaine, venait d’accoucher. Un ménage pas vraiment
fortuné, aussi le propriétaire apportait-il de bon cœur ce modeste repas, prenant
aussi des nouvelles du nourrisson et de la maman.
Quelques minutes d’une conversation bien réconfortante pour cette
jeune femme seule et isolée.
Ce fut donc une vingtaine de minutes plus tard que le sieur Dubuc
revint au rez-de-chaussée, afin de faire un dernier tour dans les lieux, avant
de monter se coucher dans la chambre qu’il occupait au premier étage.
Sa tournée nocturne s’acheva dans le petit cabinet, devant le coffre
qu’il venait de ré ouvrir afin d’y ranger quelques documents.
Le coffre, en plus des gains du jour, soit cent quatre-vingt francs
(ainsi qu’une petite pièce grecque de 1868), contenait entre deux et trois
mille francs et quarante huit mille francs de titres.
Une légère angoisse étreignait le limonadier, ce qui n’était pas dans
ses habitudes. Il pensa que ce malaise venait de toutes les mises en garde
qu’on lui faisait contre son ancien garçon de café qui, disait-on, rôdait
depuis quelques jours dans la rue Frigori et la rue des Charrettes. Il essaya
de balayer cette anxiété, se disant que l’individu n’oserait pas s’attaquer à
lui.
« Une grande gueule, certes, mais qui n’irait pas jusqu’aux actes »,
se rassura-t-il.
Pourtant, à cet instant, il sentait comme une présence, là, derrière
lui. Prémonitions ?
Tout à ses réflexions, quelques peu moroses, il ressentit une forte
douleur à l’arrière du crâne. Se retournant brusquement, il se trouva face à
l’individu qui occupait à l’instant même ses pensées.
L’attaque avait été violente, mais malgré la douleur qui lui enserrait
la boite crânienne, il chercha à se défendre.
Suffoquant, il essayait de s’extraire
à l’emprise des mains qui lui serraient le cou. Il griffait, tapait, s’agitait
en vain, car ses forces déclinaient peu à peu.
Malheureusement, l’agresseur, plus vigoureux, prit l’avantage. Un
sursaut d’énergie,000 dû à l’instinct de survie, donna à la misérable victime la
force de hurler : « Au voleur ! l’assassin ! ».
cet appel à l’aide, cri désespéré jeté dans la nuit, résonna
lugubrement.
Mais serait-il entendu, alors que tout semblait dormir alentour ?
Toutefois, ces cris de détresse sortirent quelques dormeurs de leur
premier sommeil. Une lumière, puis une autre éclairèrent la façade de
l’immeuble donnant sur la cour intérieure. Une tête, puis une autre sortirent
de l’entrebâillement de fenêtres ouvertes à la hâte.
Ce fut la dame Molière qui, la première, entendit les appels mêlés à
un bruit de lutte.
Ce fut elle qui alla prévenir sa voisine, la dame Lemercerre qui
s’habilla à la hâte et s’en alla toquer à la porte voisine, celle de
l’appartement des Volits, autres locataires du petit immeuble.
Ce fut donc, en force, que les Volits[2],
suivis des dames Lemercerre et Molière,
descendirent l’escalier les menant à la cour intérieure. Où là, plus aucun
bruit. Aucune lumière non plus.
Tous quatre cherchèrent le limonadier, car assurément, c’était bien sa
voix qu’ils avaient entendue quelques instants auparavant. Ce silence pesant ne
leur semblait pas de bon augure.
Dans le café, rien n’avait bougé, si ce n’était dans ......
Il n’y avait plus d’autre alternative que d’aller prévenir les
autorités.
Au poste de police numéro deux, celui
de leur quartier, après avoir expliqué les raisons de leur venue, ils regagnèrent la rue des Charrettes,
accompagnés de deux agents de police.
Et ce fut avec ces deux agents de la force de l’ordre qu’ils
pénétrèrent à nouveau dans le café, pour montrer leur macabre découverte :
le cadavre de Jules Adolphe Dubuc gisant à plat dos sur le sol, les yeux grand
ouverts, au milieu d’une mare de sang et le coffre, non loin de là, porte
béante.
Ne restait plus, à présent, à découvrir l’auteur et le mobile de cet
acte horrible.
Mais déjà, les soupçons se dirigeaient vers une personne en
particulier.
A suivre .........
[1]
Plusieurs orthographe concernant ce nom dans les divers articles : Hiaa –
Hya – Hyaa......
[2] On
trouve aussi « Vollet » comme orthographe – Tous les noms des
personnes, actrices ou témoins, ont, selon les articles des orthographes
différentes, ce qui rendu quasiment nulle toute recherche.
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