Dans
le village d’Itteville (Seine et Oise)
vivait une famille comme tant d’autres.
Les
parents, Pierre Debuly (on trouvera aussi Debully) et Marie Françoise
Lejeune, s’étaient unis le 17 janvier
1799
Acte
de mariage – La Ferté-alais – janvier 1799.
Aujourd’hui trentieme jour du mois
de nivose an sept de la république française une et indivisible onze heures du
matin conformément ala loi du 13 fructidor an six par devant nous.... sont
comparus pour contracter mariage d’une part le citoyen pierre Debully
cultivateur garçon majeur âgé de vingt sept ans et demi fils de deffunt jacques
michel Debuly et de marie anne grandcerf tous deux domiciliés en la commune
d’Itteville D’autre part la citoyenne marie françoise Lejeune fille majeure âgée
de vingt quatre ans fille du citoyen Charles Lejeune cultivateur et de marie
françoise heurtault son epouse tous domiciliés en ladite commune d’Itteville
lesquels futurs conjoints accompagnés des citoyens jacques Debuly cultivateur
agé de vingt neuf ans frere du futur de Pierre Delaunay cultivateur agé de
cinquante trois ans parain du futur de Charles Lejeune cultivateur agé de
quarante deux ans frere de la future et de jean Lejeune vigneron agé de trente
neuf ans aussi frere de la future tous quatre domiciliés en laditte commune
d’Itteville .......
L’acte
nous apprend que Pierre Debuly était né le 4 juillet 1771 à Itteville et Marie
Françoise Lejeune, le 8 décembre 1774, à Itteville également.
Et
bien évidemment de nombreux enfants virent le jour suite à cette union.
Pierre
Savinien – 19 octobre 1799 – Itteville.
Aujourd’hui vingt sept vendemiaire
an huit de la République française à huit heures du matin est comparu devant
moi..... Pierre Debuly vigneron en cette commune assisté de Charles Debuly
aussi vigneron et ambroise Le jeune tous domicilies en cette commune lesquels
ont declaré que françoise Lejeune sa legitime epouse etait accouchee d’un
enfant mâle qui a été prénommé Pierre Savinien d’apres cette declaration......
Louis
Alexandre – le 18 pluviose an IX – Itteville.
Du dix neufieme jour du mois de
Pluviose an neuf de la republique acte de naissance de Louis alexandre né
d’hier à sept heures du soir dix huit du present mois fils de Pierre Debuly
vigneron en cette commune et de Marie françoise Lejeune son epouse.
Le sexe de l’enfant a été reconnu
être masculin.
Premier temoin Louis marin Joint –
second temoin Marie Magdeleine constance mercier ......
Victoire
Emeline – premier jour complémentaire an dix – Itteville.
Du premier jour complementaire l’an
dix de la republique française – acte de naissance de Victoire Emeline né
aujourd’hui premier jour complementaire a six heures du matin fille de Pierre
Debuly vigneron demeurant en cette commune et de marie françoise lejeune son
epouse.
Le sexe de l’enfant a été reconnu
etre féminin.
Premier temoin jacques gregoire
Leger marechal demeurant en cette commune – second temoin Victoire Lejeune
demeurant à Paris.......
Charles
François – 21 fructidor an 12 – Itteville.
Du vingt et unieme jour du mois de
fructidor lan douze de la republique française - acte de naissance de charles
françois né le dix neuf du present mois à sept heures du soir fils de pierre
Debuly et de marie françoise Lejeune son epouse.
Le sexe de l’enfant a été reconnu
être masculin.
Premier temoin Charles jean jacques
marechal - Second temoin Pierre Delaunay tous deux demeurant en cette commune
Marie
Cléophé – 9 avril 1806 – Itteville.
Du neuvieme jour du mois d’avril
l’an mil huit cent six – acte de naissance de Marie Cléophé né d’aujourd’hui à
six heures du soir fille de pierre Debuly cultivateur demeurant en cette
commune et de marie françoise Lejeune sa legitime epouse.
Le sexe de l’enfant a été reconnu
être féminin.
Premier temoin jean Lejeune cultivateur
demeurant à Jauville dépendance d’auver – second temoin Louis victor Lejeune
demeurant en cette commune......
Julienne
Anastasie – 20 février 1808 – Itteville.
Du dimanche vingt et unieme jour du
mois de fevrier l’an mil huit cent huit. Acte de naissance de Julienne
anastasie né d’hier à six heures du soir fille de Pierre Debuly vigneron
demeurant en cette commune et de Marie françoise Lejeune son epouse.
Le sexe de l’enfant a été reconnu
être feminin.
Premier temoin Julien Mercier –
second temoin Louis Victor Lejeune demeurant tous deux en cette commune......
Marie
Françoise Sophie – 27 janvier 1810 – Itteville.
Du dimanche vingt huitieme jour du
mois de janvier l’an mil huit cent dix – acte de naissance de marie françoise
Sophie né d’hier à dix heures du soir fille de pierre Debuly vigneron demeurant
en cette commune et de marie françoise Lejeune son epouse.
Le sexe de l’enfant a été reconnu
être feminin.
Premier temoin Charles Delafolie –
second temoin louis Victor Lejeune tous deux de cette commune......
Constance
Aimée – 13 janvier 1812 – Itteville.
Du quatorzieme jour du mois de
janvier l’an mil huit cent Douze. Acte de naissance de constance aimée née
d’hier à deux heures du matin fille de pierre Debuly vigneron demeurant en
cette commune et de marie françoise Lejeune son epouse.
Le sexe de l’enfant a été reconnu
etre feminin.
Premier temoin Noël alexandre
Lejeune – second temoin Jacques Debuly demeurant aussi en cette commune .....
Des
deuils aussi et notamment avec la petite
Marie Françoise Sophie, à l’âge de quatorze mois, le 23 mars 1811.
De vingt troisieme jour du mois de
mars l’an mil huit cents onze acte de deces de marie françoise Sophie Debuly
decede hier à huit heures du soir âgée de pres de quatorze mois née en cette commune
fille de Pierre Debuly vigneron demeurant en cette commune et de marie
françoise Lejeune son epouse sur la declaration à moi faite par ledit Pierre
Debuly père de la defunte et par jacques Debuly son oncle et ont signe.
Dès
leur plus jeune âge, les enfants participaient aux travaux de la maison et à
ceux des champs.
Les
bonnes années, la vie était aisée, les mauvaises, on faisait avec.
C’était
ainsi.
-=-=-=-=-=-
Dans
un autre village, celui de Saint-Martin-Brétencourt (Seine-et-Oise), vivait une
autre famille, les Léger.
Antoine
Leger avait épousé Anne Catherine Dupré, le 19 octobre 1773 à
Saint-Martin-Brétencourt.
L’an mil sept cens soixante et
treize le dix neuf octobre apres la publication d’un ban..... celebration de
mariage d’entre antoine Leger fils mineur d’andré alexandre leger maçon et de
marie Chevalier ses père et mere de cette paroisse d’une part et anne Catherine
Dupré fille mineure de Jean Dupré meunier et de marie jeanne auvet ses père et
mere aussi de cette paroisse...... en presence de Claude Leger son frère de
Jean adrien simonneau son beau frere de Louis Dupré oncle de la mariée de jean
Louis Dupré père de la mariée....
Il
était d’ailleurs grand temps de célébrer les noces car....... le lendemain
naissait une petite fille.
Marie
Catherine - Baptême - Saint-Martin-Brétencourt – 20 octobre 1773.
L’an mil sept cens soixante treize
le vingt octobre a été par moy prêtre curé de cette paroisse soussigné baptisé
une fille née d’aujourd’hui du legitime mariage d’antoine leger homme de peine
et d’anne Catherine Dupre laquelle a ete nommée marie catherine par les parain
et mareine qui ont été Claude Leger garçon et marie Louise Dupré fille tous
deux de cette paroisse. Le parain a signé avec moy le present acte et la
mareine a déclaré ne savoir ecrire ny signer.....
Cinq
jours plus tard, le 25 octobre 1773, Marie Catherine décéda.
L’an mil sept cens soixante treize
le vingt six octobre a été par moy prêtre curé de cette paroisse soussigné
inhume au cimetiere le corps de marie catherine Leger fille d’antoine Leger et
d’anne Catherine Dupré decedee d’hier agée de six jours laditte inhumation
faite en presence d’antoine Leger son père de Claude Leger son oncle temoins
qui ont assisté à laditte inhumation et qui ont signé avec moy.
Puis
les naissances et décès s’enchainèrent, car les Leger n’eurent pas la chance
des Debuly, beaucoup de leurs enfants décédèrent en bas-âge.
Marie
Catherine Adélaïde – naissance le 26 novembre 1774 et décès deux jours plus
tard.
L’an mil sept cent soixante et quatorze
le vingt sept novembre par moy prêtre curé de cette paroisse soussigné baptisé
une fille née d’hier du legitime mariage d’antoine leger manouvrier et de anne
catherine Dupré laquelle a été nommee Marie catherine adelaïde par ses parain
et maraine qui ont eté françois marie Robillard maitre decolle de cette
paroisse et Marie Therese Herve fille aussi de cette paroisse qui ont signé
avec moy le present acte.
L’an mil sept cens soixante
quatorze le vingt huit novembre a été par moy prêtre curé de cette paroisse
soussigné inhumée au cimetiere le corps de marie Catherine adelaïde Leger en
son vivant fille de antoine Leger manouvrier et anne Catherine Dupré ses père
et mere decedée d’hier agée de deux jours laditte inhumation faite en presence de
sondit père et de françois marie Robillard maître décole de cette paroisse qui
ont signé avec moy le present acte.
Jean
Antoine – naissance le 29 janvier 1776.
L’an mil sept cens soixante seize
le trente janvier a été par moy pretre curé de cette paroisse soussigne baptise
un garçon né d’hier du legitime mariage d’antoine leger manouvrier et anne
catherine Dupré ses père et mere lequel a eté nommé jean Antoine par ses parain
et mareine qui ont été jean antoine de la Vallée maçon de la paroisse de
Chatignonville et de Marie Charlotte melanie genet fille de cette paroisse qui
ont signé avec moy le present acte.
Jean
François – naissance le 21 juillet 1777.
L’an mil sept cent soixante et dix
sept le vingt et un juillet par moy prêtre curé de cette paroisse soussigné
baptisé un garçon né du legitime mariage de antoine leger et de anne catherine
Dupré lequel a été nomme jean françois par ses parain et maraine qui ont été
jean jourdon laboureur et marie Louise Dupré tous deux de cette paroisse le
parain a signé avec moy le present acte la maraine a déclaré ne scavoir ecrire
ni signer ....
Jean
François n’atteignit pas l’âge adulte car il décéda le 21 mai 1796, alors qu’il
n’avait pas que dix-neuf ans.
Aujourd’hui deux prairial de la
république française une et indivisible, nous agent municipal de la commune de
Saint Martin de Bretencourt..... déclaration à nous faite par antoine Leger
manouvrier en cette commune et de anne Catherine Dupré sa femme tous deux agés
de plus de vingt un ans que Jean François Leger Chartier en cette commune étoit
décédé d’aujourd’hui à sept heures du matin, nous sommes transportés en la
maison en laquelle ledit susnommé est décédé après nous être assuré dudit deces
avons constaté d’après les renseignements à nous donnés que ledit deffunt
s’appelloit jean François Leger en son vivant fils dudit antoine Leger et de
laditte cathetine Dupré lequel étoit agé d’environ dix neuf ans le tout fait en
présence desdits declarants et de françois marie Robillard maître d’école de
cette commune et de jean baptiste fleurand manouvrier en cette commune tous
deux âgés de plus de vingt un ans qui ont signé.
Des
jumelles arrivèrent au foyer le 27 juillet 1779.
Elles
reçurent les prénoms de Françoise Emelie et d’Anne Geneviève.
L’an mil sept cens soixante dix
neuf le vingt sept juillet a été par moy prêtre curé de cette paroisse
soussigné baptisée une fille née d’aujourd’huy du legitime mariage d’antoine Leger
manouvrier et d’anne Catherine Dupré laquelle a été nommée françoise Emelie par
ses parain et mareine qui ont ete jean louis Dupré et marie françoise Blot tous
deux de cette paroisse le parain a declaré ne sçavoir signer la mareine a signe avec moy le present
acte.
L’an mil sept cens soixante dix
neuf le vingt sept juillet a eté par moy prêtre curé de cette paroisse
soussigné Baptisé une fille née d’aujourd’huy du legitime mariage d’antoine
Leger manouvrier et d’anne Catherine Dupré laquelle a été nommée par ses parain
et mareine qui ont été jean henry hervé garçon de cette paroisse et marie
Elizabeth Genevieve Vallée fille de la paroisse de Chatignonville qui ont signé
avec moy le present acte.
Les
deux petites ne vécurent que très peu de temps.
Françoise
Emelie, décédée le 23 juillet 1779 :
L’an mil sept cent soixante dix
neuf le vingt huit juillet par moy prêtre curé soussigné inhumé au cimetiere le
corps de françoise Emelie leger fille d’antoine leger manouvrier et d’anne
catherine Dupré decedée d’hier immediatement après son baptême laditte
inhumation faite en presence d’antoine leger père de l’enfant de françois marie
Robillard maitre décolle de cette paroisse qui ont signé avec moy le present
acte.
Anne
Geneviève, décédée le 5 août 1779 :
L’an mil sept cent soixante dix
neuf le six août par moy pretre curé soussigné inhumé au cimetiere le corps
d’anne geneviève leger fille d’antoine leger manouvrier et d’anne Catherine
Dupre decedée d’hier agée de huit jours laditte inhumation faite en presence
d’antoine leger son père et de françois marie Robillard maitre décolle de cette
paroisse qui ont signé avec moi le present acte.
Le
19 mai 1781 – Naissance à Saint-Martin-Brétencourt - Marie Catherine Julie.
L’an mil sept cens quatre vingt un
le vingt may a été par moy prêtre curé de cette paroisse soussigné baptisé un
garçon né d’hier du legitime mariage d’antoine leger manouvrier et d’anne
Catherine Dupre ses père et mere de cette paroisse laquelle a été nommée Marie
Catherine Julie par ses parain et mareine qui ont étés Pierrre Paul Chretien
garçon de la paroisse d’athouville et marie cecile Robillard fille de cette
paroisse qui ont signé avec moy le present acte.
Le
prêtre, bien sûr, s’est trompé, il ne s’agit pas d’un garçon, mais d’une fille.
Le
12 janvier 1784 – Naissance à Saint-Martin-Brétencourt - Pierre Maximin
L’an mil sept cent quatre vingt
quatre le douze janvier a été par moy prêtre curé soussigné baptisé un garçon né d’aujourd’huy
du legitime mariage d’antoine leger manouvrier et d’anne Catherine Dupré lequel
a été nommé Pierre maximin par ses parain et maraine qui ont été Pierre Leclair
et Marie Charlotte Dupré......
Le
4 avril 1786 – Naissance à Saint-Martin-Brétencourt - Elisabeth Honorée.
L’an mil sept cent quatre vingt six
le quatre avril a été par moy prêtre curé soussigné baptisé une fille née
d’aujourd’huy du legitime mariage d’antoine Leger manouvrier et de Catherine
Dupré laquelle a été nommée Elisabeth honorée par ses parain et maraine qui ont
ete Nicolas Jeorge Piebourg et elisabeth
honorée Dupré le parain a signe avec moi le present acte et la maraine a
déclaré ne scavoir écrire ni signer.......
Le
1er mai 1788 – Naissance à Saint-Martin-Brétencourt - Louis Jacques
Philippe.
Lan mil sept cent quatre vingt huit
a été par moy prêtre curé soussigné baptisé un garçon né d’aujourd’huy du
legitime mariage d’antoine leger et d’anne catherine Dupre lequel a été nommé
Louis jacques Philippe par ses parain et maraine qui ont été Jean Louis
piebourg et monique theodore foucret qui ont signé avec moi le present acte.
Le
5 mai 1792 – Naissance à Saint-Martin-Brétencourt - Marc Augustin.
L’an mil sept cens quatre vingt
douze le cinq may un garçon né ce jour du legitime mariage d’antoine Leger
manouvrier et marie Catherine Dupré ses père et mere de cette paroisse a été baptisé
par nous curé soussigné et nommé marc augustin par marc Thoriot et angelique
Barry ses parain et mareine soussigné.
Le
3 germinal an III – Naissance à Saint-Martin-Brétencourt - Antoine.
Aujourd’hui quatre germinal l’an
trois de la république française.... marie anne Renard veuve Louis Cabourg sage
femme de la commune de Corbreuse nous a déclaré qu’hier à neuf heures du soir
il était né en cette commune un enfant mâle du legitime mariage de antoine
Leger manouvrier en cette commune et de
anne Catherine Dupré sa femme père et mere dudit enfant auquel il a été donné
le prenom de Antoine letout fait en presence de Jean Jacques haumonier
cordonnier en cette commune et de françois marie Robillard instituteur en cette
ditte commune tous deux témoins agés de plus de
vingt et un ans.......
Ce
garçon, dont il sera question un peu plus tard dans le récit, avant dernier de
la fratrie, se révéla très jeune être un enfant d’un caractère sombre et
solitaire, fuyant la compagnie des enfants de son âge et plus tard des jeunes
filles.
Il
eût vingt ans en 1815, fut-il tiré au sort pour partir à l’armée ?
En
ce 18 juin 1815, était-il le sur champ de bataille de Waterloo ?
Je
n’ai rien découvert pouvant l’attester.
18
thermidor an VI – Naissance à Saint-Martin-Brétencourt - Marie André Alexandre.
Aujourd’huy dix huit thermidor an
six de la république française... marie anne Renard sage femme de la commune de
Corbreuse nous a déclaré que aujourd’huy à dix heures du matin il étoit né en
cette commune un garçon du légitime mariage d’antoine Leger cultivateur en
cette commune et d’anne Catherine Dupré ses père et mere auquel il a été donné
les prénoms de marie andré alexandre letout fait en presence de françois marie
Robillard instituteur en cette commune et de marie Louise Chauvin sa femme qui ont signé
avec nous le present acte.
-=-=-=-=-=-
Ces
deux familles eurent leur destin lié, le temps d’un évènement qui alimenta la
chronique du début du XIXème siècle.
-=-=-=-=-=-
En
cette fin de journée du 10 août 1824, l’anxiété était grande au foyer des
Debuly. La petite Aimée Constance, âgée de douze ans, n’était pas encore
rentrée de la vigne, alors que le jour commençait à décliner. Son père et ses
frères s’étaient rendus sur le lieu où elle avait travaillé une grande partie
de l’après-midi. Ils découvrirent ses souliers, son chapeau et sa serpette. Mais l’enfant fut introuvable.
Le
lendemain et les jours qui suivirent, des battues furent organisées par les
autorités locales.
Un
mouchoir rayé bleu et blanc fut trouvé.
A
qui appartenait-il ? Pas à la fillette, toutefois !
Cette
disparition inquiéta fortement les habitants du village d’Itteville et ceux des
villages alentour qui regardaient avec
méfiance tous les étrangers parcourant les chemins et les bois.
Ce
fut ainsi que le 12 août, un homme, aux propos incohérents et au comportement
étrange, fut arrêté pour vagabondage par un garde forestier. Il se prétendit
sans famille ni attache, évadé du bagne où il purgeait une peine de vingt ans.
Disait-il
la vérité ?
Le
16 août 1824, des villageois de la Ferté-Alais furent alertés par des odeurs
nauséabondes provenant du bois de Montmirault.
Une
charogne, sans doute laissée là, qui pourrissait et empestait sous le soleil
torride d’août !
Leur
odorat les conduisit vers une grotte abandonnée dont l’ouverture avait été
close par des branchages. Ceux-ci, une fois déplacés, dévoilèrent une cavité
dans laquelle les hommes pénétrèrent et découvrirent des débris d’artichauts,
de pois, de blé et d’oignons ainsi qu’une couche faite de foin et de mousse.
Quelqu’un
avait vécu là, il n’y avait pas si longtemps.
Mais
les hommes furent assaillis par une forte odeur insupportable qui les prirent à
la gorge.
A
l’aide d’une lumière, ils poursuivirent leurs recherches afin de savoir ce qui
pouvait exhaler une odeur aussi horrible. Ils ne mirent pas longtemps à
découvrir, au fond de cette cavité, un tas de sable sous lequel un paquet
volumineux avait été enfoui et qu’ils retirèrent aussitôt.
Ce
qui les attendait à l’intérieur était innommable :
Enveloppé
dans une chemise et un jupon, un corps en décomposition avancée dont les jambes
et les cuisses étaient repliées sur le ventre et dont le thorax était ouvert.
La justice se saisit de l’affaire. Le juge d’instruction du tribunal d’Etampes vint sur les lieux accompagné d’un chirurgien. Après examen, ce dernier constata que le corps avait été ouvert du haut en bas par un objet pointu et tranchant, et horriblement mutilé. La gorge et la bouche étaient emplies de sang.
Le
petit corps de Constance Aimée, identifié par ses parents, fut mis en terre.
Extrait du registre des actes de
naissances mariages et deces de la commune de Cerny arrondissement d’étampes
Département de Seine et Oise pour l’année 1824.
Du lundi seize aoust mil huit cent
vingt quatre heure de sept heures et demi du matin acte de décès de constance
aimee Debuly agee de douze ans et demi née en la commune d’itteville decedee
aujourd’hui l’heure sus-dite, fille de Pierre de Buly vigneron âgé de cinquante
trois ans et de Marie Françoise Lejeune agée de quarante neuf ans Demeurant à
Itteville. Les temoins ont été le sieur pierre de buly père de la defunte et le
sieur pierre Ruelle cordonnier âgé de cinquante ans demeurant à Cerny ami du père
de la defunte lesquels ont signé avec nous adjoint delegue par Monsieur le
maire après lecture faite et le deces constaté par nous soussigné.......
Il
fallait, à présent, faire toute la lumière sur ce qui s’était passait entre le
10 août, jour de la disparition de l’enfant, et le 16 août, jour de la macabre
découverte.
-=-=-=-=-=-
Longtemps
Antoine Léger nia les faits, s’accrochant à sa première version de forçat
évadé. Puis, au fil des interrogatoires, il lâcha, peu à peu, tous ses méfaits qu’il
raconta dans un flux de paroles ininterrompu. Le juge se cala dans son fauteuil
et sans un mot écouta.....
Antoine
Leger dit avoir quitté la maison paternelle le soir de la Saint-Jean, prétextant
se rendre à Dourdan pour se placer comme domestique, n’emportant avec lui que
les vêtements qu’il portait et une somme
de cinquante francs volée à ses parents.
Mais
sur le chemin, l’envie lui prit de se rendre à Etampes où il passa la nuit dans
une auberge. Le lendemain, ses pas le conduisirent à la Ferté-alais. Non loin
de là, il erra dans les bois à la recherche d’un refuge.
Il
dit alors avoir vécu dans les bois pendant une quinzaine de jours, se
nourrissant de racines et de baies et aussi de chasse. Il prit, notamment, un lapin au collet qu’il dépeça et mangea
cru. Il se rendit aussi plusieurs fois à la Ferté-alais pour acheter du pain et
du fromage.
Il
avoua être possédé du démon car très souvent, il avait des envies de chair
humaine.
Ce
fut au cours d’une de ses promenades non
loin d’Itteville, qu’il aperçut, le 10 août, une jeune fille travaillant dans
une vigne à la lisière d’un bois.
Il
eut une pulsion meurtrière. L’endroit était désert. Personne en vue pour venir
interrompre son horrible dessein...... Même si la jeune fille criait, qui
pourrait l’entendre dans cet endroit isolé ?
Il
descendit rapidement la côte et fonça sur sa victime qui ne l’entendit pas
venir et ne put ainsi ni se sauver, ni se défendre. L’homme avoua avoir passé son mouchoir tortillé autour du
cou de sa victime et avoir serré jusqu’à étranglement total. Lorsque la jeune
fille ne bougea plus, il la lança sur son épaule comme il l’aurait fait d’une
proie et s’enfuit dans les bois avec elle.
Fatigué
par sa course, il jeta l’enfant sur le sol pour reprendre son souffle. La
regardant comme un prédateur, il avait soif de sang et cette soif le
tenait aux trippes. Il ne pouvait s’enlever de l’esprit cette envie de sang tel
un vampire en manque.
Dans
une pulsion, il dévêtit, coupa et trancha le petit corps sans vie dont il se repaissa
avec délice. Quand il fut rassasié, revenu à la raison, il voulut cacher son
méfait. Il enveloppa les restes du cadavre dans les vêtements qu’il avait jetés
plus loin sur le sol et emporta le paquet ainsi ficelé dans la grotte qui lui
servait de refuge où il l’ensevelit sous du sable.
Lors
d’une reconstitution, Antoine Léger montra tous les lieux où il s’était rendu
et décrivit, avec moult détails, tous les faits dont il s’était rendu coupable.
-=-=-=-=-=-
Le
procès d’Antoine Leger s’ouvrit le 23 novembre 1824 à Versailles.
Un
défenseur nommé d’office, Maître Benoit, avoué à Versailles, était à ses côtés.
Devant
l’horreur du crime et afin d’éviter une émeute dans la salle d’audience, le
procès se déroula à huis clos.
L’accusé,
sur son banc, était calme presque indifférent à ce qui se passait devant lui,
comme s’il n’était absolument pas concerné.
L’interrogatoire
du procès, nous apprend que cet homme, là devant ses juges, était sorti de la
grotte vers 15 h 30, ce 10 août 1824, afin d’aller cueillir des pommes. Voyant
la petite fille, il lui prit l’envie de l’enlever et, pour ce faire, lui passa
son mouchoir autour du cou pour la
porter sur son dos comme le ferait un portefaix avec sa charge.
Puis
il précisa :
« Arrivé
dans la forêt, la faim ne prit, alors je l’ai dévorée. »
Douze
témoins défilèrent à la barre et après avoir décliné leurs nom, prénoms et
qualité, rapportèrent ce qu’ils avaient vu.
Des
médecins vinrent aussi déposer, révélant les sévisses que l’enfant avait subis.
« Il
y a eu asphyxie soit par strangulation ou par étouffement. Des incisions aussi
sur le corps faites avant le décès et également des blessures prouvant qu’il y
avait eu viol. »
Concernant
la dernière observation des médecins, Antoine Leger nia catégoriquement. Il
n’avait pas violé la fillette. Par contre, il admit avoir bu le sang de sa
victime et sucé son cœur. Précisant qu’il ne se souvenait toutefois pas
vraiment de ses faits et gestes, étant tombé en faiblesse aussitôt après.
Il
poursuivit :
« Quand
j’ai repris connaissance, je suis allé me cacher dans les roches plus bas. Je
n’ai pu dormir de la nuit. Le lendemain, j’ai cherché un point d’eau pour me
laver. J’ai aussi coupé le col et les manches de ma chemise car il y avait du
sang dessus. J’ai rencontré un garde et j’ai pris la fuite. »
Il
admit aussi s’être coupé la barbe et les cheveux, pour changer d’apparence.
Plusieurs
fois, il revint sur ses dépositions.
Par
contre, ce dont il était certain, c’était qu’il n’avait plus sa raison, comme sous
l’emprise de la volonté d’un esprit malin.
Après
tous les interrogatoires, le président du tribunal résuma les faits encore une
fois, ne négligeant aucun détail.
L’avocat
d’Antoine Leger plaida la démence et demanda aux jurés de se prononcer sur une
aliénation mentale. L’ avoué ne
fut pas entendu, car après une demi-heure de délibération, la sentence tomba.
Antoine Leger entendit avec une froide indifférence sa condamnation à mort.
Il
fut guillotiné le 30 novembre 1824, sur la place publique de Versailles.
Acte
de décès – Versailles – novembre 1824.
Du mardi 30 novembre mil huit cent
vingt quatre trois heures du soir acte de decés d’antoine Leger, journalier,
non marié âge de vingt neuf ans né à St martin de Bretencourt (Seine et Oise) y
demeurant decedé en cette ville ce jourd’hui heure de midi. Les temoins sont
les sieurs nicolas Roussel âge de soixante neuf ans rentier rue de la pomme n°
14 et guillaume Vabrain âge de cinquante sept ans journalier rue des chantiers
n° 4 qui a dit ne savoir signer. Le dit
Sieur Roussel a signé avec nous adjoint au maire.....
Mais
on n’en avait pas fini avec cet homme car des médecins légistes, en quête de
connaissance, souhaitaient savoir si le cerveau d’Antoine Leger possédait une
« marque spéciale », celle des « assassins », autopsièrent le cadavre. Ils découvrirent, en
effet, une anomalie au cerveau de ce dernier et décrétèrent qu’il était atteint
de folie et que celle-ci remontait à plusieurs années.
Pour
ces médecins, la justice avait condamné un « fou irresponsable ».
-=-=-=-=-=-
Les
parents de la petite victime durent vivre de nombreuses années avec, en mémoire,
le supplice de leur enfant.
Bien
sûr, à cette époque, beaucoup d’enfants mouraient, c’était tellement coutumier
que cela passait presque inaperçu, mais pas dans des circonstances aussi
affreuses !
Pierre
Debuly partit le premier, le 7 mars 1853, à Itteville, vingt-neuf ans après le
drame.
Du sept mars mil huit cent
cinquante trois, heure de neuf heure du matin. Acte de décès de Pierre Debuly
âgé de quatre vingt deux ans, profession de rentier, né à Itteville décédé
aujourd’hui à huit heures du matin en sa demeure, Marié à Marie Françoise
Lejeune, vivante, fils de jacques Michel Debuly et de Marie Anne Grand-cerf.
Les témoins ont été M Pierre savinien Debuly, cultivateur, âge de cinquante
trois ans, demeurant à Itteville fils du décédé et le sieur Louis alexandre
Debuly cultivateur âge de cinquante deux
ans demeurant à Itteville fils du décédé lesquels ont signé avec nous......
Marie
Françoise Lejeune décéda deux années après son mari, le 17 mai 1855 à
Itteville.
Du dix sept mai mil huit cent
cinquante cinq heure de six du matin. Acte de décés de Marie françoise Lejeune
âgée de quatre vingt ans, rentière, née à Itteville decedée aujourd’hui à
quatre heure du matin en sa demeure, veuve de pierre Debuly, fille de Charles
Lejeune et de Marie françoise heurteau. Les temoins ont été M. Louis alexandre
Debuly âge de cinqaunte quatre ans cultivateur demeurant a Itteville fils de la decedée et le sieur
pierre savinien Debuly âge de cinquante cinq ans cultivateur demeurant à
Itteville fils de la decedée lesquels ont signé.....
Concernant
les parents d’Antoine Leger, je n’ai pu découvrir l’acte de décès de son père.
Ce
que je peux affirmer, c’est qu’il était décédé avant le 16 juillet 1835.
Rien
le concernant sur les tables décennales de Saint-Martin-Bretencout.
Ayant
le même prénom que son « fils-assassin », quitta-t-il sa ville natale
pour s’installer ailleurs ?
Où
était-ce tout simplement parce que la cellule famille avait explosée après les
faits dramatiques ?
Pourtant,
Anne Catherine resta dans son village où elle mourut le 26 juillet 1835.
Peut-être parce qu’elle n’avait aucun autre lieu où aller.
Du seize juillet mil huit cent
trente cinq six heures du soir. Acte de decés de anne catherine Dupré âgée de
soixante dix neuf ans nee à Montlery decedée aujourd’hui à deux heures du soir
en sa demeure au gué d’orge commune de St Martin Bretencourt veuve de antoine
Leger. Les temoins ont été marie alexandre journalier âge de trente huit ans
demeurant au gué d’orge fils de la defunte et Louis honoré Napoleon Bigot
instituteur âge de trente ans ami de la defunte demeurant audit St Martin
lequel a signé avec nous Maire et ledit Leger a déclaré ne savoir signer.....
Pour
écrire ce texte, je me suis aidée d’un texte de l’ouvrage :
Causes
célèbres de tous les peuples par A. Fouquier
Édition
illustrée – Tome VII – Livres 115 à 139
Paris
- Lebrun et Cie Editeurs - 8 rue des Saints pères - 1865
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