Le jour se levait doucement, en
ce dimanche matin, et, petit à petit, la brume se dissipait, laissant apparaître
un rayon de soleil printanier.
Tout et tous dormaient encore
dans le petit village.
Les cloches de l’église
attendaient, encore un peu, avant de sonner, respectant le sommeil des
villageois, car, en effet, ils avaient tous bien travaillé ces derniers jours,
tous unis dans la préparation de la Fête du Printemps.
A présent, au milieu de la place,
trônait une estrade pavoisée de rubans et de fleurs et qui attendait que les
musiciens prennent place et lancent les premiers accords des musiques du bal.
« Encore
quelques minutes, pensaient les cloches, il faut qu’ils récupèrent afin d’être
en forme pour les festivités. »
Le lutin postier avait expédié
toutes les invitations.
Le lutin cuisinier avait mitonné de
bons petits plats, fort tard dans la nuit.
Le lutin tailleur avait fini le
dernier ourlet bien après minuit.
Le lutin chef du village avait
sorti son plus bel habit pour être à la hauteur de l’évènement.
La fête du Printemps, depuis la
nuit des temps, représentait un moment fort important, une passation de
pouvoirs, en quelque sorte, entre la Fée des Glaces qui régnait de mi-décembre
à mi-mars et la Fée des Fleurs qui prenait le relais à la fin de la première
quinzaine de mars.
Elles avaient donc été conviées
toutes les deux.
Les cloches de l’église
retentirent au moment où le coq se mit à chanter.
Aussitôt, les volets de chaque
petite maison s’ouvrirent et l’on entendit de partout résonner rires et chants.
La bonne humeur générale
présageait une bonne journée de réjouissances.
Les derniers préparatifs furent
alors entrepris et, avant les douze coups de midi, tous étaient rassemblés sur
la place dans l’attente de l’arrivée des deux fées.
Le ciel s’illumina, auréolé d’un
arc-en-ciel. Un vent léger et tiède s’éleva. La Fée des Fleurs fit son
apparition, dans une robe d’une beauté printanière lumineuse. Avec une grâce
sans pareille, elle se posa délicatement au centre de la petite place,
accueillie par des « oh ! » admiratifs.
Le silence s’installa ensuite
dans l’attente de la venue de la Fée des Glaces dont le retard inhabituel
commençait à inquiéter.
Un murmure s’éleva alors, chacun
commentant cet imprévu, quand soudain le lutin postier surgit en criant :
« Je n’ai
pas envoyé l’invitation ! Je n’ai pas envoyé l’invitation !
- Quoi ?
crièrent-ils tous en chœur, incrédules.
Le pauvre lutin postier, d’une blancheur
cadavérique, à bout de souffle, dit d’une voix presque éteinte :
« Je
viens de retrouver l’invitation que je devais envoyer à la Fée des Glaces.
L’enveloppe a dû glisser et elle est tombée derrière le comptoir du bureau de
poste. Je viens de la retrouver en passant le balai. »
A ce moment précis, le ciel
s’assombrit, un vent violent et glacial tourbillonna, balayant la Fée des
Fleurs qui disparut. Des flocons de neige commencèrent à voleter et l’eau du ruisseau qui le matin même chantonnait joyeusement
se figea, prise par les glaces.
En moins de temps qu’il fallut
pour le dire, tout fut recouvert de neige et de givre et le peuple des petits
lutins n’eut d’autre choix que de se réfugier dans la grande salle commune afin
de tenir conseil.
Le moment était grave.
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