Leur premier réflexe fut de s’en
prendre au pauvre lutin postier. Mais le lutin chef du village s’interposa.
« Il
n’est plus temps de faire des reproches. D’ailleurs, c’est la première fois que
le lutin postier égare une lettre depuis toutes ces décennies. Maintenant, il
faut réfléchir, car la Fée des Glaces, d’un tempérament glacial et cinglant,
doit se sentir offensée.
- C’est
à moi d’aller lui faire des excuses et lui expliquer que ce n’est pas un oubli,
mais un égarement de courrier, renchérit le lutin postier.
- Etant
donné sa froideur légendaire et bien réelle, dit un petit lutin présent, je ne
suis pas sûr qu’elle accepte cette explication.
- Alors,
c’est la mort de notre village, dit un autre lutin, avec ce temps, nous ne
pourrons pas faire de récoltes et nos réserves sont presque épuisées.
- Attendez !
reprit le lutin chef de village. Le seul qui peut, en effet, expliquer la
situation est le lutin postier puisqu’il était chargé de l’expédition des
courriers.
Le pauvre lutin postier en était
convaincu. Si il y avait des excuses à formuler, c’était bien à lui que
revenait cette mission.
Il s’habilla alors chaudement,
mit quelques réserves dans son sac et prit le chemin de la montagne de glace
qui surplombait le petit village et où vivait la Fée des Glaces.
De son palais fleuri, la Fée des
Fleurs assistait à ce colloque, désolée de la tournure des évènements. Elle
connaissait bien la Fée des Glaces et mesurait sa force, car elle pouvait déchaîner tous les éléments.
Elle craignait que sa colère fasse tomber sur le petit village froidure, vents cinglants, neiges abondantes......
Elle se promit de faire de son
mieux pour adoucir l’épreuve qui attendait le monde des petits lutins.
Faisant face à un vent qui
tournoyait violemment, le petit lutin postier avait grand-peine à avancer. Les
rafales venteuses lui fouettaient le visage et lui coupaient le souffle. Malgré
ses vêtements chauds, il sentait à travers eux la morsure glaciale. Bien que
chaussé de grosses bottes, ses pieds étaient gelés.
Combien de temps devrait-il
marcher ainsi ? Il ne le savait, ignorant totalement où se situait
l’entrée du palais de glace.
Lorsque le vent se calma un peu,
la neige tomba en flocons minuscules et cinglants, avant de se transformer en flocons
légers et joufflus.
Epuisé, le lutin postier chercha
un abri pour passer la nuit. Il découvrit un endroit entre deux rochers.
S’enroulant dans un duvet, il finit par trouver le sommeil.
A son réveil, le ciel dégagé
laissait passer quelques pâles rayons de soleil qui éclataient en blancheur
éblouissante sur l’étendue neigeuse.
Cette chaleur réchauffa, un peu, le pauvre lutin qui regarda vers le sommet de
la montagne afin de mesurer la distance qui lui restait à parcourir.
Déprimé par l’ampleur de ce qu’il
était obligé d’accomplir, il se mit à pleurer. Levant la tête vers la montagne,
il cria :
« Désolé ! Je suis
désolé Fée des Glaces ! Je vous demande pardon ! »
Mais seul l’écho lui
répondit : « Pardon, pardon,
pardon …… »
Ajustant sa capuche, protégeant
le bas de son visage avec son écharpe, il attrapa son sac. Avant de reprendre
sa route, il jeta un regard vers le village. Perdu dans un épais brouillard,
celui-ci n’était pas visible.
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