jeudi 4 mai 2017

L'AFFAIRE LEOTADE - Première partie

Etait-il le coupable ?
Louis Bonafous, en religion Frère Léotade.


En entrant dans la grande salle, encadré par deux gendarmes, sous le regard haineux de la foule amassée, là, dans l’espoir de voir puni un criminel, frère Léotade était serein. Son innocence ne pouvait échapper aux juges et aux jurés.
Ce fut donc avec calme qu’il écouta, tout en priant, les témoignages et les commentaires.

Une seule fois, il se révolta. Une seule !
Lorsqu’au cours de sa plaidoirie, la partie civile osa mettre en doute le respect de ses vœux lors de son engagement envers Dieu et la communauté des Frères de la Doctrine Chrétienne.

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Braves gens, écoutez ce qui suit !
Une bien triste histoire dans la bonne ville de Toulouse ......

Il était une fois, une tendre et douce enfant nommée Cécile Anne Combettes.
Elle était née le 5 novembre 1832 à Toulouse, dans une famille sans fortune, comme il y en avait tant, en ces durs moments de la vie politique chaotique de cette France qui oscillait entre royauté et république.
Cécile Anne achevait son apprentissage chez un relieur nommé Jean Bertrand Conte de la rue de la Peyrolières, qui effectuait de nombreux travaux de reliure pour la communauté des frères de la Doctrine Chrétienne, située rue Riquet. Elle pourrait, dans peu de temps, exercer le métier de brocheuse.

Acte de naissance de Cécile Anne Combettes - Novembre 1832 – Toulouse.
Du sixieme jour du mois de novembre l’an mil huit cent trente deux à trois heures du soir - Acte de naissance de Cecile anne Combettes née le jour de hier à quatre heures du soir rue pargaminiere n° 27, fille de Bernard Combettes tailleur de limes et de Marie Terrisse menagere mariés domiciliés à Toulouse même maison. Le sexe de l’enfant a été reconnu être celui d’une fille.
Témoins Germain Combettes revendeur âgé de cinquante quatre ans domicilie rue port Garaud n° 26 et Jean Terrisse Botteleur âgé de soixante six ans domicilie rue Marbrousinat   n° 11.
Sur la requisition à moi faite par le dit Combettes père qui a signé avec les dits Germain Combettes grand père paternel et Terrisse grand père maternel....

Cécile Anne faisait le bonheur de ses parents et chacun de dire que c’était une gentille fille, douce, aimable, travailleuse et sage. Pas aguicheuse du tout, comme certaines qui couraient déjà le guilledou avec ce regard effronté qui attisait les garçons. Non. Elle n’avait qu’un souhait, gagner un peu d’argent pour aider ses parents.
C’était dans ce seul but qu’elle était entrée en apprentissage chez maitre Conte, le 15 avril 1846. Un an qu’elle apprenait avec application et attention. Bientôt, elle pourrait ramener à la maison un tout petit salaire, certes, mais un salaire qui aiderait sa famille.
Pour certains, Cécile avait un visage ingrat. Pour d’autres, elle avait un joli petit minois.
De petite taille, 1 mètre 33, elle semblait n’avoir que onze ou douze ans. Son visage, au teint pâle, était rond et encadré par une abondante chevelure couleur châtaigne.  Ses yeux bruns révélaient une pointe d’espièglerie. Son nez légèrement épaté, et ses lèvres rose vif sur lesquelles se dessinait, sans cesse, un sourire plein de charme, découvrant de petites quenottes blanches et bien alignées. Si on s’attardait un peu sur sa silhouette fluette, on ne pouvait ne pas remarquer ses petites mains et ses petits pieds. Elle avait été dotée d’un caractère calme et mélancolique.
On disait d’elle, pauvre fille du peuple, qu’elle possédait une allure de demoiselle.
Un « sacré petit bout de femme », vive et sans méchanceté, laborieuse et serviable !

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Le 15 avril 1847, à la nuit tombée, Bernard Combettes se rendit à l’atelier de Maitre Conte. En ce milieu de mois de mars, il faisait un froid intense. Assurément l’hiver ne souhaitait pas laisser sa place à la douceur printanière.
Jean Bertrand Conte était absent et l’atelier était désert.
L’estomac serré, une boule d’angoisse dans la gorge, Bernard Combettes se demandait où pouvait se trouver sa fille. Jamais elle n’était en retard.
La nuit se passa à se renseigner ici et là, chez des amis, des connaissances, que sais-je encore, si quelqu’un parmi ceux-ci ou ceux-là savait quelque chose, avait une indication pour retrouver la jeune fille.
Nuit de cauchemars pour Bernard Combettes et Terrisse Marie, les pauvres parents éplorés.

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Le 16 avril 1847, Raspaud dit Lafatigue, le fossoyeur du cimetière Saint-Aubin, découvrit un étrange spectacle.
Contre le mur du cimetière, un corps face contre terre, recroquevillé sur lui-même. S’approchant un peu plus, il s’aperçut qu’il s’agissait du cadavre d’une jeune fille.

Le pauvre Père Lafatigue sentit ses jambes se dérober sous lui. Il lui fallut un sursaut d’énergie pour aller chercher de l’aide chez les frères qui appelèrent aussitôt les forces de l’ordre.

Il fut bien difficile de reconnaitre la victime, car son agresseur s’était acharné sur elle avec une telle violence, qu’elle avait le visage massacré, les paupières tuméfiées, le nez écrasé et le crâne défoncé. De plus, tout laissait à penser que cette jeune fille avait été violée.
Il s’agissait de Cécile Anne Combettes, reconnue grâce aux vêtements qu’elle portait.

Les enquêteurs reconstituèrent aisément la dernière journée de la petite Cécile. Celle du jeudi 15 avril 1847.
Elle s’était rendue, comme chaque jour, à l’atelier. Puis, vers les huit heures du matin, elle avait accompagné son patron chez les frères pour y déposer des livres. Marion Roumagnet, une employée de l’atelier de reliure était avec eux.
Ce fut le frère-portier Laetanus qui leur avait ouvert la porte. Jean Bertrand Conte avait demandé à Marion de retourner à l’atelier et à Cécile Anne de l’attendre. Il avait à s’entretenir avec le directeur de l’établissement, frère Irlide.
Une heure avait passé lorsqu’il avait rejoint son  apprentie dans le hall, mais celle-ci n’était plus là. Ne s’inquiétant pas de son absence, pensant, qu’impatiente, elle était retournée travailler, il avait pris le chemin vers la rue de la Peyrolières où il pensait la voir. Entre temps, pris par de nombreuses occupations, il avait oublié la jeune fille.

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Afin de recueillir quelques indices et informations, après la découverte de la dépouille de Cécile Anne, les gendarmes s’étaient rendus chez le sieur Conte.
N’était-il pas responsable de son apprentie, en sa qualité de patron ?
Apercevant la maréchaussée, sans connaitre les raisons de cette visite, il s’écria : « En tout cas, je suis innocent ».
Pourquoi cette répartie ?
Ce fut cette même question qui tournicota dans la tête des gendarmes. Et le sieur Conte fut arrêté, le 17  avril 1847.

Trois jours plus tard, le temps nécessaire afin de pratiquer une autopsie minutieuse, la petite victime fut inhumée.
En ce 20 avril 1847, toute la ville s’était rassemblée pour rendre un dernier hommage à « l’enfant-martyre ».

Acte de décès de Cécile Anne Combettes.
Du dix neuvieme jour du mois d’avril l’an mil huit cent quarante sept à deux heures du soir acte de deces de cecile anne combettes trouvée morte le seize du courant à sept heures du matin dans l’ancien cimetiere St Etienne brocheuse âgée de quatorze ans cinq mois née à Toulouse haute garonne y domiciliée rue de la Daurade n° 3 fille de Bernard Combettes tailleur de limes et de marie Terrisse mariés  déclaration à nous faite par Isaac Terrisse âge de trente sept ans menuisier domicilié rue de la Madeleine 3 et Jean marie Truillet ferblantier âgé de quarante deux ans domicilié rue Coutelier    N° 5 qui ont signé.......

Jean Bertrand Conte fut donc mis sous les verrous à la prison du Sénéchal, pour sa vive répartie devant les forces de l’ordre, mais surtout en raison de certains antécédents. En effet, il avait abusé de sa jeune belle-sœur peu de temps après son mariage. Cette pauvre jeune fille de seize ans avait eu un  enfant de son beau-frère  et avait été abandonnée à son triste sort. L’enfant n’avait vécu que quinze jours. De plus, on le disait violent.

Jetons un coup d’œil sur la presse.
Voici quelques extraits du journal de Toulouse.

Journal de Toulouse n° 90 – mardi 20 avril 1847

Jamais peut-être, crime quelque grand qu’il fut ne produisit dans aucune ville une émotion plus longue, une sensation plus pénible, que l’attentat dont une pauvre jeune fille vient d’être victime à Toulouse. Depuis vendredi matin, dans les rues, sur les promenades, dans les établissements publics, dans les maisons particulières, ce crime abominable est l’objet des plus douloureux entretiens ; on peut affirmer qu’il a remplacé dans les esprits, toute autre préoccupation. Pourrait-il en être autrement ?
Voilà quatre jours et quatre nuits que les magistrats chargés de l’instruction sont sur pied, et rien n‘est venu encore donner l’espoir aux habitants que les auteurs du crime seraient atteints.
Il est prouvé, dit-on, que les soupçons qu’on avait conçus contre le relieur arrêté, n’avaient aucun fondement ; quel est donc le coupable ?
Espérons qu’enfin la providence fera luire quelque clarté qui le fera découvrir, et qu’il ne sera pas dit qu’un attentat aussi épouvantable est resté impuni.
L’autopsie du cadavre a été faite hier. Nous avons jusqu’ici dit peu de chose à nos lecteurs sur cette infortunée : son nom était Cécile Combettes ; elle était âgée de quatorze ans et demi ; un journal a prétendu qu’elle était d’une beauté remarquable ; un autre journal a contesté cette assertion et a presque présenté Cécile comme laide. Ces deux journaux exagéraient ; cette jeune fille n’était pas une beauté, mais elle avait ce qui peut tenir lieu de cette qualité, elle avait de la gentillesse, elle était bien constituée, sa taille était petite, et bien qu’elle eût quatorze ans et demi, on ne lui en aurait pas donné plus de douze.
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Il a été reconnu, dit-on, que la malheureuse Cécile Combettes n’était pas morte par une strangulation rapide, instantanée, mais qu’on l’avait par intervalle laissée respirer ; c’était lorsque la pauvre enfant jetait des cris qu’on lui serrait le cou. On peut juger, d’après cela, du long supplice qu’elle a dû subir ; plusieurs parties de son corps, ses bras, entr’autres, étaient couverts de meurtrissures ; son estomac avait dû être fortement comprimé...........


Journal de Toulouse n° 91 – mercredi et jeudi  21 et 22 avril 1847

Toulouse 22 avril
Les obsèques de Cécile Combettes ont été célébrées mardi à dix heures du matin, ainsi que nous l’avions annoncé dans notre dernier numéro. M. le curé de la Daurade, pénétré du sentiment douloureux dont la population toute entière était animée, a senti que les funérailles ordinaires ne suffisaient pas à une si grande infortune. Un enterrement de deuxième classe a été préparé par le respectable pasteur. Tous les prêtres attachés à la paroisse ont secondé avec le plus grand empressement les pieuses intentions de leur digne chef.
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Parti de la Daurade, le cortège s’est rendu par la rue des Balances, la place du Capitole, la place Lafayette et le Faubourg Saint-Aubin, au cimetière où avait été trouvé le corps de Cécile Combettes ; de là il est revenu à la Daurade par la rue Neuve du Rempart Saint Etienne, la rue Riguepels, la rue de l’Archevêché, la rue des Marchands, la place du Pont et le quai ; puis il est reparti pour se rendre au cimetière de Terre Cabade en passant par la rue Cujas, la place de la  Bourse, la rue Tamponnière, la rue Peytas, la rue du Musée, la rue d’Astorg, la Porte Saint Etienne, etc.
Un détachement d’infanterie commandé par un officier escortait le convoi afin de maintenir l’ordre ; mais le calme et le recueillement de la foule ont rendu cette précaution à peu près superflue.
Sur le cercueil qui était porté par des jeunes filles, on remarquait trois couronnes ; deux de roses blanches placées aux extrémités ; la troisième qui se trouvait au centre, était composée de lis et surmontée d’une couronne d’épines, d’où s’élançait un lis superbe, chaste et touchant symbole de la mort de l’infortunée Cécile.
....................
Le convoi se trouvait suivi par une grande quantité de personnes de tout âge, parmi lesquelles on ne pouvait voir sans attendrissement le père de la victime : il avait voulu la suivre à sa dernière demeure, mais il a été obligé de s’arrêter en route, brisé par son émotion.
...................
La plupart des habitants avaient, pour un moment, suspendu leurs travaux, aussi tous les quartiers, par où est passé le cortège funèbre, étaient remplis d’une foule innombrable ; dans quelques rues, cette foule s’est trouvée si compacte, que le convoi a éprouvé les plus grandes difficultés pour les traverser.
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Bien que la foule soit immense, le silence le plus profond régnait partout : et ce silence n’était interrompu que par les chants des prêtres qui, eux-mêmes, saisis d’émotion, ne disaient que d’une voix affaiblie les prières des morts.
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Le corps de Cécile Combettes a été placé avant-hier dans le caveau destiné à la famille de M. Bonnefoi.
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L’instruction relative à l’attentat commis contre Cécile Combettes, occupe sans relâche les magistrats qui en sont chargés. Des bruits nombreux circulent en ville au sujet des investigations de la justice ; mais ne voulant avancer que des faits certains, nous continuerons de garder la réserve que nous nous sommes imposée, jusqu’à ce que les magistrats aient rempli leur mission.
.......
Aux détails que nous avons donnés sur l’autopsie de Cécile Combettes, nous devons ajouter qu’elle avait le crâne fracassé ; c’est sans doute en se débattant contre ses bourreaux qu’elle se sera blessée elle-même. On a trouvé dans son estomac du pain non digéré ; ce pain, elle l’avait mangé à son déjeuner ; ce qui est une preuve certaine, que l’attentat a été commis peu de temps après que la jeune fille eut disparu.

M. Bonnefoi était un honorable habitant de Toulouse qui possédait un tombeau familial au cimetière de Terre Cabade. Il a voulu ainsi honorer la petite victime en lui donnant une sépulture sur laquelle son nom serait gravé.

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La petite ensevelie, il ne restait, à la justice, qu’à faire toute la lumière sur cet horrible crime.

Jean Bertrand Conte fut remis en liberté au mois d’août, aucune charge ne pouvant être retenue contre lui.

Les recherches s’orientèrent vers l’institut Saint-Joseph, celui des frères de la Doctrine chrétienne où vivaient plus de trois cents religieux, novices et élèves et où avait été vue Cécile, le matin du jour de sa disparition.
En effet, ce matin là, la jeune fille avait discuté, dans le vestibule, avec deux frères, frère Léotade et frère Jubrien.

Frère Léotade fut arrêté. Sur ses vêtements, portant le numéro 562, des traces de sangs et d’excréments. Ces mêmes traces découvertes sur les vêtements de la petite Cécile. Pourtant, le frère criait son innocence.

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Les audiences commencèrent et se succédèrent, au cours desquelles furent entendus quatre-vingt-quinze témoins cités par l’accusation et quatre-vingt-douze témoins pour la défense.
Cela faisait beaucoup de monde !

Quels magistrats étaient présents en la Cour d’Assises de Toulouse, afin de se prononcer sur la culpabilité du prévenu ?

Charles Goirand de la Baume,  Président du Tribunal, était un ancien avocat très brillant. Il ne cachait pas son hostilité envers le frère Léotade.      
Le procureur général d’Oms, partageait la même opinion que le Président concernant le frère.

Avocat de la défense, représentant Bernard Combettes, Maitre Joly, était assisté par Maitre Pujol.


Dans la salle d’audience bondée, Maitre Cazeneuve, ancien avocat, invité à assister aux débats, mais ne pouvant intervenir, prenait des notes.

Qui vint déposer à la barre ?

Le frère Laurien, jardinier.
Il déclara avoir remarqué des traces de pas près du mur séparant la cour de l’institut des frères et le cimetière. Exactement où avait été retrouvée la dépouille de la jeune fille.
Mais, il s’embrouilla et se contredit, pressé par les questions incessantes du juge.
A ce moment, Maitre Joly de la partie civile demanda l’arrestation du frère. Ses hésitations et ses contradictions en faisait un suspect.
A ce moment précis, Maitre Cazeneuve avait noté sur son calepin :
« Défense muselée – accusation indigne – Où est la justice ? »


Madeleine Sabathié, épouse Larrieu, femme de ménage.
Elle affirma, sous serment, avoir vu Cécile vers les dix heures, rue du cimetière. Celle-ci lui avait dit attendre son maître.
Peu de temps après, elle avait encore vu la jeune fille accompagnée d’un homme en burnous.
Mais là encore, les propos déclarés se révélèrent confus. Tout et son contraire !
Le président monta le ton et fit emprisonner le témoin !
Et de deux !

Puis, vint à la barre Marion Roumagnat. Après son premier témoignage qui n’avait sûrement pas apporté toutes les satisfactions attendues, elle avait été jetée en prison. Voilà pourquoi elle était apparue encadrée par deux gendarmes.
Elle confirma son premier témoignage, mais intimidée par les agressions verbales du juge, elle murmura : « J’ai pu ne pas voir.... ».
Je suppose qu’elle préféra abonder dans le sens de la justice, plutôt que de finir ses jours à croupir dans une geôle.
A cet autre moment précis, Maitre Cazeneuve avait noté sur son calepin :
« Arrêtera-t-on tous les témoins qui ne vont pas dans le sens de l’accusation. »

Après une nuit de prison, Madeleine Sabathié fut de nouveau auditionnée. Elle affirma d’une voix faible : « J’ai pu me tromper .... »

Un témoignage très attendu, autant par les membres de la justice, les jurés et l’auditoire présent. Celui du relieur Conte.
N’avait-il pas été incarcéré quatre mois en raison de ce crime ?
Alors, il dénigra l’accusé, l’enfonça par des propos scandaleux et indignes.
Le  pauvre frère Léotade s’indigna alors.
Comment pouvait-on dire autant de mal sur sa personne, lui qui avait toujours été choisi, non pas pour son intelligence, mais pour sa sagesse ?
Un « Accusé taisez-vous, vous n’avez pas à prendre la parole ! », sonore et hargneux venant du juge, stoppa net la tirade du frère.

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Interrompons quelques instants l’audition des témoins pour nous pencher sur la personnalité de celui qui, sur le banc des accusés, attendait qu’on réglât son sort.

Frère Léotade en religion était le fils de François Bonafous et de Catherine Bonafous.
(Les actes notent deux orthographe : Bonnafous et Bonafous).
Il était né le 3 février 1812 à Montclar dans l’Aveyron et avait reçu les prénoms de Jean Louis.
Il avait un physique ingrat. Certains le trouvaient même laid. Il avait « un nez camard, des lèvres écrasées et des oreilles détachés ».

Acte de naissance – février 1812 – Montclar.
L’an mil huit cent douze et le huitieme fevrier devant nous.... est comparu françois Bonafous cultivateur age de cinquante huit ans demeurant à Montclar lequel nous a présenté un enfant mâle né le trois du courant de lui déclarant et de Catherine son épouse auquel il a dit vouloir donner le prenom de Jean Louis les susdittes déclaration et presentation faitte en presence de antoine alvernhes cultivateur age de trente cinq ans domicilie à  Montclar et de Louis Rouquairol agé de trente trois ans demeurant à Plaisance cultivateur.......

Ses parents s’étaient mariés le  28 septembre 1808, dans la commune de Montclar.
Acte de mariage – septembre 1808 – Montclar
L’an mil huit cent huit et le vingt huit septembre par devant nous..... commune de Montclar. Acte de mariage de françois Bonafous cultivateur habitant de montclar age de cinquante ans né à la Vitarelle commune de Brassac département du Tarn le trente septembre mil sept cent cinquante huit fils des feux françois Bonafous et marie Oulez mariés lorsqu’ils vivoient et habitants de ... (illisible) commune de Brassac, le dit françois Bonafous veuf en secondes noces de Claire Bonami et de françoise Catherine cultivatrice habitante du village du puits de Brasc commune de Coupiac age de trente ans né à premian departement de lherault le vingt six novembre mil sept cent soixante dix huit fille de pere et mere inconnus....
En presence de louis Ramond le fils cordonnier age de vingt trois, jean louis Rouquairol cultivateur agé de trente deux, antoine audouard aussi cultivateur agé de trente trois ans et de Martin Bonnet propriétaire agé de vingt deux ans....

Louis Bonafous eut peu de souvenirs de son père. En effet, François Bonafous décéda trois ans après sa naissance, le 10 mars 1815. Il ne fut donc élevé que par sa mère..
Acte de décès – mars 1815 – Montclar.
L’an mil huit cent quinze le dixieme jour du mois de mars à une heure de relevé par devant nous..... commune de Montclar, mairie de Coupiac, sont comparus pierre maget âgé de cinquante ans et joseph Carter âgé de soixante un ans cultivateurs habitans dudit montclar lesquels nous ont déclaré que cejourd’huy du mois de mars à trois heures du matin le nommé françois Bonnafous âgé de soixante un ans marié et domicilié audit montclar voisin aux susdits est décédé en sa maison sise audit montclar....

Il entra en apprentissage comme tailleur, puis exerça ce métier, afin de gagner sa vie et aider sa mère. Il était très apprécié de ses maitres et patrons successifs, comme vous pourrez le lire ci-après lorsque ceux-ci vinrent témoigner en sa faveur.

Ce fut après le décès de sa mère, Catherine Bonafous, survenu le 24 octobre 1835, que Jean Louis entra comme novice chez les frères de la Doctrine chrétienne à Toulouse où il reçut le nom de Frère Léotade.

Acte de décès – octobre 1835 – Montclar.
L’an mil huit cent trente cinq et le vingt quatre octobre à quatre heures du soir par devant nous ...... se sont presentes à la maison commune le sieur Louis Bonnafous tailleur âgé de vingt cinq ans et antoine roques cultivateur age de quarante ans tous deux habitants à Montclar lesquels nous ont déclaré que ce jourd’hui vingt quatre octobre courant à huit heures du matin laditte catherine Bonnafous est decedée dans sa maison audit montclar a lage de cinquante ans les dittes declaration et presentation ayant été faites par Louis Bonnafous fils de la decedée et par ledit Roque son voisin ......

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Revenons dans la salle d’audiences où les témoins se succèdaient pour entendre ceux favorables à Louis Bonafous :

Victor Isidor Dejean – trente quatre ans – notaire et adjoint au maire.
Je connais d’une manière toute particulière Louis Bonafous, aujourd’hui frère de la doctrine chrétienne à Toulouse ; je suis de son âge, et pendant mon enfance j’étais lié d’amitié avec lui ; je l’ai toujours reconnu pour être doué d’une excellence moralité ; je ne sache pas que jamais personne ait eu à se plaindre de lui, sous quelque rapport que ce soit.

Casimir Durand, instituteur communal de Montclar, trente-cinq ans.
J’étais intimément lié avec Louis Bonafous, aujourd’hui frère des écoles chrétiennes. Sa conduite pendant tout le temps qu’il est resté dans notre pays a été exempte de blâme, et je n’ai jamais ouï dire que personne ait eu à se plaindre de lui.

Jean Baptiste Alvernhes, quarante sept ans.
Louis Bonafous a travaillé long-temps pour moi, en sa qualité de tailleur d’habits. Pendant tout le temps qu’il a exercé cette profession à Montclar, j’en ai été toujours très-satisfait ; sa conduite a été toujours bonne et jamais je n’ai entendu dire que personne ait eu à se plaindre de lui.

Etienne Julien, soixante-quatre ans.
Louis Bonafous, aujourd’hui frère des écoles Chrétiennes, est originaire de notre ville. Avant d’entrer dans cet ordre, il a exercé la profession de tailleur d’habits ; il servait même à ce titre ma maison, et toujours j’ai été content de lui. Dans toutes les circonstances, je l’ai reconnu pour un charmant garçon.

Jean Bousquet, cultivateur, trente-huit ans.
Je suis le voisin d’habitation de Louis Bonafous ; je l’ai vu grandir et dès son plus bas âge, il m’a paru être un garçon sage et religieux. Il perdit son père de très-bonne heure. Louis Bonafous a toujours mené une conduite régulière. Lorsqu’il commença à exercer la fonction de tailleur pour son propre compte, il vint s’établir à Montclar, où il passa des années. Il avait de nombreuses pratiques et habillait tous les curés du voisinage.

Pierre Rouberon, tailleur d’habits, cinquante-huit ans.
J’ai eu pendant quatre ans le sieur Louis Bonafous comme apprenti ou comme ouvrier tailleur ; je puis vous dire à ce sujet, que depuis trente ans que j’exerce ma profession, je n’ai pas eu collaborateur plus zélé ni meilleur garçon. Après m’avoir quitté et avoir travaillé chez d’autres Maitres tailleurs, il vint s’établir à Montclar, pendant quelques années et je le connaissais personnellement sous de très bons rapports, pour être autorisé à penser que pendant ce dernier temps il a mené encore une conduite irréprochable.

Joseph Bastide, trente-neuf ans, marchand tailleur à Saint-Affrique fit les mêmes éloges que les précédents témoins, concernant la conduite irréprochable, en tout temps et toute circonstance, de Louis Bonafous.

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Poursuivons les auditions. Collaboreront-elles à faire émerger la vérité ?

Lors de la séance du 16 février 1848, un jeune homme du nom de Marius Vidal, imprimeur, habitant Lavaur dans le Tarn, fit la déclaration suivante :
« Le 15 avril 1847, j’étais chez les frères et j’ai vu la jeune fille sortir du pensionnat.»
Là encore, ce jeune homme était revenu sur sa première déclaration.

Marie Duprat déposa également sous serment. Amie de Cécile, elle travaillait comme servante chez le sieur Delquié.
« Cécile m’a dit : « Il y a un polisson qui m’ennuie depuis longtemps. Il me poursuit le soir et il m’accompagne. Il me met les mains aux endroits les plus indécents. Il m’a dit : « Cécile tu es si jolie, un jour, tu te feras enlever ! »

Une autre amie confirma les dires de Marie Duprat, mais ajouta qu’elle avait eu, de la bouche de Cécile, la révélation du nom du « polisson » en question. Il s’agissait du relieur Conte.

Le président réfuta ces déclarations, pourtant, il était au courant des antécédents du sieur Conte.
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Revenons un instant sur les « antécédents » du sieur Conte qui furent, d’ailleurs, expliqués dans une lettre de la main même de l’épouse de Jean Bertrand Conte, Angélique Pétronille Maitre.
Le contenu de ce document fut lu lors du procès. Malheureusement, je n’ai pu en prendre connaissance. Toutefois, ce qui était noté était suffisamment conséquent pour que la dame Conte ait eu l’intention de se séparer de son époux.
En effet lorsque Jean Bertrand Conte et Angélique Pétronille Maitre se marièrent, dix ans environ avant les évènements de 1847, Conte qui avait un « grand faible » pour les femmes se  montra fort entreprenant vis-à-vis de sa jeune belle-sœur, Thérèse Maitre, alors âgée de seize ans. Elle repoussait son beau-frère, mais celui-ci ne baissait pas la garde, souhaitant arriver à ses fins. Dans quelles conditions la jeune fille se retrouva-t-elle enceinte ? A la suite d’un viol ? Assurément.
Un enfant que Conte retira aussitôt à sa mère naquit. Je n’ai aucune information sur le sexe du petit. Ce que j’appris au cours de mes lectures,  ce fut qu’il décéda quinze jours après sa naissance.
Le sieur Conte en parlait comme d’une farce lors de ses « virées » extraconjugales dont il ne se cachait guère.
De plus, ce personnage, ultra-misogyne et ultra-macho, avait un petit penchant, vous l’avez bien compris, pour les jeunes filles.

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Coup de théâtre, mais pas à la Cour d’Assises de Toulouse.

Le 23 février 1848, Louis Philippe abdiqua.
La République fut instaurée.

Côté du procès du frère Léotade, tout était à refaire !

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Le second procès débuta le 16 mars 1848.

Maitre Joly remplaça Maître Rumeau, mais celui-ci était également hostile aux frères.
Il basa sa plaidoirie sur les diverses contradictions des frères de l’institut concernant l’emploi du temps de frère Léodade et, bien entendu, sur la chasteté contenue des frères qui ce jour-là s’était « déchainée » sur la pauvre enfant.

La parole fut alors donnée au défenseur de Louis Bonafous, Maitre Gasc.
Celui-ci devait rivaliser d’ingéniosité pour contrecarrer les attaques et l’habileté de la partie civile. Il plaida avec acharnement, convaincu, mais il n’était pas le seul, de l’innocence de son client.
Il rappela les nombreuses activités du frère ce matin-là, aux heures où le crime avait été commis, rappelant les diverses dépositions :

Lacour, maitre tailleur, quarante-et-un ans.
Il affirma avoir vu le « coupable » entre 9 heures et 10 heures.

Jean Briol, ouvrier tailleur, trente-neuf ans.
Il attesta que le frère était venu dans l’atelier, en début de matinée.

L’élève Courrent, âgé de seize ans, déposa lui aussi.
A 8 heures 3/4, il avait vu Léotade à la couture, après la leçon d’anglais.

Biragnet fils, autre élève du pensionnat.
Il avait eu recours au frère, à 9 heures, pour arranger sa tunique. Cet ouvrage avait duré un quart d’heure.

Le frère Liry.
Il avait rencontré Léotade au premier étage de l’institut. Ce dernier lui avait demandé de prévenir la femme Carcasses, couturière, qui travaillait à la lingerie de prévenir son mari, maître plâtrier, qu’il y avait de l’ouvrage à effectuer à l’institut.

De Savy Félix, élève de dix-huit ans.
Il jura avoir parlé assez longtemps avec le frère, vers 9 heures et demie.

Vers onze heures du matin, frère Léotade assistait à la récitation du chapelet dans la chapelle du pensionnat, juste avant d’aller diner à la table commune.
Et donc de onze heures à plus de midi, quantité de frères pouvaient attester de sa présence de à ces deux endroits.

Toute la matinée, fait incontestable, le frère Léotade avait été vu à divers endroits.
Alors ?

Cet acte atroce aurait été commis dans l’enceinte de l’institut, par l’accusé. Dans l’institut ! Ce lieu où règne un perpétuel mouvement de frères, de novices, d’élèves et de visiteurs !
Et personne n’aurait rien vu ! Et personne n’aurait rien entendu ! Mais, la victime, même si elle avait suivi en toute confiance son ou ses agresseurs, avait dû crier lorsqu’on l’avait attaquée !
Frère Léotade faisait un parfait suspect, un parfait coupable pour la seule raison qu’on avait retrouvé ses vêtements souillés, et notamment cette chemise n° 562 qu’on disait être la sienne.

Aucun frère n’a reconnu ce vêtement comme appartenant au frère, aucun frère sur les cent treize entendus.
D’ailleurs, tous les vêtements des frères de la communauté étaient rangés dans la buanderie où chacun pouvait se servir. Et dans l’hypothèse où frère Léotade aurait été réellement l’assassin de Cécile Anne, comment aurait-il pu aller, la nuit suivant le crime, jeter la dépouille de la petite victime par-dessus le mur ? Il avait dormi, cette nuit-là, dans la chambre du directeur, à côté du frère Esdras. Les deux frères auraient pu en témoigner, si on les avait appelés à le faire.

Il fallait à la justice un coupable, et il était tout trouvé en la personne de frère Léotade.
« Mais devient-on un assassin du jour au lendemain, quand on s’est toujours révélé sage, respectueux et travailleur. »

Et puis le viol !
Le juge avait son idée toute faite car n’avait-il pas dit :
« Il n’y a qu’un religieux dont les passions sont comprimés, qui soit capable d’avoir commis ce crime ..... Un homme du monde, qui avec vingt sous peut satisfaire ses passions ne se livrerait pas à de tels excès. »
Quelle honte ! Quel scandale !

Lors des délibérations, qui ne durèrent qu’une heure et demie, le président influença les jurés, avec une insistance non dissimulée. 
Trois questions furent posées :

·      Bonafous (Louis), en religion frère Léotade, est-il coupable d'avoir, le 15 avril dernier, commis le crime de viol sur la personne de Cécile Combettes ?
Non, l'accusé n'est pas coupable.
·      Ledit Bonafous est-il coupable d'avoir commis, le 15 avril dernier, une tentative de viol sur la personne de Cécile Combettes, laquelle tentative, manifestée par un commencement d'exécution, n'a été suspendue ou n'a manqué son effet que par des circonstances indépendantes de la volonté de son auteur ?
Oui, l'accusé est coupable à la majorité de plus de 9 voix.
·      Ledit Bonafous est-il coupable d'avoir, le 15 avril dernier, commis volontairement un homicide sur la personne de Cécile Combettes ?
Oui, l'accusé est coupable à la majorité de plus de 9 voix.

Louis Bonafous, frère Léotade, fut condamné aux travaux forcés à perpétuité et à être exposé en la place publique de Toulouse.

Maitre Cazeneuve était accablé par ce déni de justice.
Suite à ce procès scandaleux, cet avocat écrivit plusieurs ouvrages plaidant l’innocence du frère.
Mais, on ne malmène pas la justice, et Maitre Cazeneuve fut condamné en raison de ses propos à une peine de prison et une forte amende.
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Dans le  Journal de Toulouse quelques mots, en juin 1848,  mettant un point final à ce procès.

Affaire Cécile Combettes. Pourvoi du frère Léotade.
Le frère Léotade s'était pourvu, on se le rappelle, contre l'arrêt de condamnation de la Cour d'assises de la Haute-Garonne qui l'a frappé. Son pourvoi vient d'être rejeté.
(conclusions de M. l’avocat général Nouguier. Plaidant, Me Béchard).

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Ce fut au bagne de Toulon qu’échoua Louis Bonafous. Il fut inscrit sous le matricule  3146.

A Toulon, Louis Bonafous subit les attaques et maltraitances des autres bagnards. Faisant abstraction de toute méchanceté, il se réfugia dans la prière.
Cette attitude lui valut, par la suite, le respect de tous ceux qui l’avaient malmené.
Il aida grand nombre de ses codétenus. Il prêcha la bonne parole et convertit plusieurs de ses compagnons.
Mais, Louis Bonafous était de santé fragile. Il attrapa froid et se mit à tousser. Cette toux persistante s’aggrava jusqu’à l’épuiser totalement.
Il décéda, le 26 janvier 1850, dix neuf mois après son arrivée à la chiourme de Toulon, et où on l’avait surnommé le « Prisonnier de Jésus-Christ ».


Journal de Toulouse – 30 janvier 1850.
Le frère Léotade est mort. Quelques jours avant, il a fait appeler le commissaire rapporteur, le commissaire du bagne, l’aumônier, la supérieure des sœurs de la sagesse et leur a fait la déclaration suivante :
« Prêt à paraitre devant Dieu, je dois à ma conscience, à l’honneur de l’institut des frères des écoles chrétiennes et à celui de ma famille, je crois devoir dis-je, déclarer que je meurs innocent des crimes pour lesquels j’ai été condamné ; je pardonne aux personnes qui m’ont condamné ou qui ont contribué à ma condamnation ».
Il avait trente huit ans.


Acte de décès – janvier 1850 – Toulon.
Du vingt sept janvier mil huit cent cinquante à onze heures du matin – acte de decès de Louis Bonafous en religion frere Leotade decedé d’hier à sept heures et demie du soir à l’hopital maritime de cette ville (ex frère des écoles de la Doctrine chrétienne) age de trente huit ans né à Montclar département de l’Aveyron domicilié à Toulouse (haute garonne) fils de feu françois Bonafous et de feue Catherine Bonafous (sans autre renseignements) sur la déclaration à moi faite par Marc Guigon âgé de cinquante trois ans gardien de mar.... (illisible) domicilié à Toulon qui a dit être instruit du decès du defunt et par françois pepy âgé de trente huit ans ex marin domicilié à Toulon qui a dit être instruit du decès du defunt....... constaté suivant la loi par moi.....

Malgré tous les efforts de Maitre Cazeneuve, Frère Léotade ne fut jamais réhabilité.

L’on ne peut, tout de même pas, passer sous silence l’attitude du relieur Conte.
Pourquoi avait-il mis autant d’acharnement à accabler le frère Léotade ?
Pourquoi après son entretien avec le directeur de l’établissement des frères, avait-il multiplié ses visites et déplacements ?
Pour se créer des alibis ?
N’était-il pas un ami du frère directeur, participant à certaines réceptions ?
N’était-il pas, aussi, un intime de l’institut car jouant du serpent d’église au cours de certains offices ?
Tout cela restait troublant.
Avait-il « sacrifié » son apprentie, en la « livrant » à un des frères de la communauté ?
Toute hypothèse restait possible.

Toutefois, le matin du crime, Conte s’entretenait avec le directeur de l’institut.
Des bruits avaient couru que le Directeur voulait cesser de travailler avec Conte, ayant un autre fournisseur. D’autre part, il y aurait eu quelques différends concernant l’inscription du fils du relieur, âgé d’environ dix ans, dans l’école des frères. Le frère directeur refusant de prendre le jeune garçon. Pour quelle raison ?


Alors ? Qui était le coupable ?

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