lundi 30 avril 2018

CONTE POUR LES ENFANTS SAGES....... ET TOUS LES AUTRES !


LA LEGENDE DES GIBOULEES DE MARS




Le jour se levait doucement, en ce dimanche matin, et, petit à petit, la brume se dissipait, laissant apparaître un rayon de soleil printanier.
Tout et tous dormaient encore dans le petit village.
Les cloches de l’église attendaient, encore un peu, avant de sonner, respectant le sommeil des villageois, car, en effet, ils avaient tous bien travaillé ces derniers jours, tous unis dans la préparation de la Fête du Printemps.

A présent, au milieu de la place, trônait une estrade pavoisée de rubans et de fleurs et qui attendait que les musiciens prennent place et lancent les premiers accords des musiques du bal.
« Encore quelques minutes, pensaient les cloches, il faut qu’ils récupèrent afin d’être en forme pour les festivités. »

Le lutin postier avait expédié toutes les invitations.
Le lutin cuisinier avait mitonné de bons petits plats, fort tard dans la nuit.
Le lutin tailleur avait fini le dernier ourlet bien après minuit.
Le lutin chef du village avait sorti son plus bel habit pour être à la hauteur de l’évènement.



La fête du Printemps, depuis la nuit des temps, représentait un moment fort important, une passation de pouvoirs, en quelque sorte, entre la Fée des Glaces qui régnait de mi-décembre à mi-mars et la Fée des Fleurs qui prenait le relais à la fin de la première quinzaine de mars.
Elles avaient donc été conviées toutes les deux.

Les cloches de l’église retentirent au moment où le coq se mit à chanter.
Aussitôt, les volets de chaque petite maison s’ouvrirent et l’on entendit de partout résonner rires et chants.
La bonne humeur générale présageait une bonne journée de réjouissances.


Les derniers préparatifs furent alors entrepris et, avant les douze coups de midi, tous étaient rassemblés sur la place dans l’attente de l’arrivée des deux fées.


Le ciel s’illumina, auréolé d’un arc-en-ciel. Un vent léger et tiède s’éleva. La Fée des Fleurs fit son apparition, dans une robe d’une beauté printanière lumineuse. Avec une grâce sans pareille, elle se posa délicatement au centre de la petite place, accueillie par des « oh ! » admiratifs.

Le silence s’installa ensuite dans l’attente de la venue de la Fée des Glaces dont le retard inhabituel commençait à inquiéter.
Un murmure s’éleva alors, chacun commentant cet imprévu, quand soudain le lutin postier surgit en criant :
« Je n’ai pas envoyé l’invitation ! Je n’ai pas envoyé l’invitation !
-      Quoi ? crièrent-ils tous en chœur, incrédules.

Le pauvre lutin postier, d’une blancheur cadavérique, à bout de souffle, dit d’une voix presque éteinte :
« Je viens de retrouver l’invitation que je devais envoyer à la Fée des Glaces. L’enveloppe a dû glisser et elle est tombée derrière le comptoir du bureau de poste. Je viens de la retrouver en passant le balai. »

A ce moment précis, le ciel s’assombrit, un vent violent et glacial tourbillonna, balayant la Fée des Fleurs qui disparut. Des flocons de neige commencèrent à  voleter et l’eau  du ruisseau qui le matin même chantonnait joyeusement se figea, prise par les glaces.

En moins de temps qu’il fallut pour le dire, tout fut recouvert de neige et de givre et le peuple des petits lutins n’eut d’autre choix que de se réfugier dans la grande salle commune afin de tenir conseil.

Le moment était grave.


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Leur premier réflexe fut de s’en prendre au pauvre lutin postier. Mais le lutin chef du village s’interposa.

« Il n’est plus temps de faire des reproches. D’ailleurs, c’est la première fois que le lutin postier égare une lettre depuis toutes ces décennies. Maintenant, il faut réfléchir, car la Fée des Glaces, d’un tempérament glacial et cinglant, doit se sentir offensée.
-      C’est à moi d’aller lui faire des excuses et lui expliquer que ce n’est pas un oubli, mais un égarement de courrier, renchérit le lutin postier.
-      Etant donné sa froideur légendaire et bien réelle, dit un petit lutin présent, je ne suis pas sûr qu’elle accepte cette explication.
-      Alors, c’est la mort de notre village, dit un autre lutin, avec ce temps, nous ne pourrons pas faire de récoltes et nos réserves sont presque épuisées.
-      Attendez ! reprit le lutin chef de village. Le seul qui peut, en effet, expliquer la situation est le lutin postier puisqu’il était chargé de l’expédition des courriers.

Le pauvre lutin postier en était convaincu. Si il y avait des excuses à formuler, c’était bien à lui que revenait cette mission.
Il s’habilla alors chaudement, mit quelques réserves dans son sac et prit le chemin de la montagne de glace qui surplombait le petit village et où vivait la Fée des Glaces.


De son palais fleuri, la Fée des Fleurs assistait à ce colloque, désolée de la tournure des évènements. Elle connaissait bien la Fée des Glaces et mesurait sa force,  car elle pouvait déchaîner tous les éléments. Elle  craignait que  sa colère fasse tomber sur le petit village froidure,  vents cinglants, neiges abondantes...... 
Elle se promit de faire de son mieux pour adoucir l’épreuve qui attendait le monde des petits lutins.


Faisant face à un vent qui tournoyait violemment, le petit lutin postier avait grand-peine à avancer. Les rafales venteuses lui fouettaient le visage et lui coupaient le souffle. Malgré ses vêtements chauds, il sentait à travers eux la morsure glaciale. Bien que chaussé de grosses bottes, ses pieds étaient gelés.
Combien de temps devrait-il marcher ainsi ? Il ne le savait, ignorant totalement où se situait l’entrée du palais de glace.

Lorsque le vent se calma un peu, la neige tomba en flocons minuscules et cinglants, avant de se transformer en flocons légers et joufflus.

Epuisé, le lutin postier chercha un abri pour passer la nuit. Il découvrit un endroit entre deux rochers. S’enroulant dans un duvet, il finit par trouver le sommeil.

A son réveil, le ciel dégagé laissait passer quelques pâles rayons de soleil qui éclataient en blancheur éblouissante  sur l’étendue neigeuse. Cette chaleur réchauffa, un peu, le pauvre lutin qui regarda vers le sommet de la montagne afin de mesurer la distance qui lui restait à parcourir.


Déprimé par l’ampleur de ce qu’il était obligé d’accomplir, il se mit à pleurer. Levant la tête vers la montagne, il cria :
« Désolé ! Je suis désolé Fée des Glaces ! Je vous demande pardon ! »

Mais seul l’écho lui répondit :  « Pardon, pardon, pardon …… »


Ajustant sa capuche, protégeant le bas de son visage avec son écharpe, il attrapa son sac. Avant de reprendre sa route, il jeta un regard vers le village. Perdu dans un épais brouillard, celui-ci n’était pas visible.


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Chaque matin, le petit monde des lutins, sous la présidence du lutin chef du village,  se réunissait dans la salle commune.
Cela  faisait, à présent, trois jours que le lutin postier était parti.

Avait-il rencontré la Fée des Glaces ?

Rien ne le disait. Le froid était toujours intense, bien que parfois le soleil brilla au-dessus des toits.
La neige fondait sous la chaleur du soleil de plus en plus intense.
Sur l’herbe apparaissait, timidement,  quelques fleurs de couleurs pâles.
Puis le ciel déversait neiges et grêlons.

« Le temps est détraqué, ce n’est pas possible ! », pensaient les petits lutins attentifs au moindre changement. « Nous passons de l’hiver au printemps  plusieurs fois par jour. »

En effet, de mémoire d’anciens, jamais pareille chose ne s’était produite.

Mais, il était vrai que la passation de pouvoirs entre les deux fées se faisait dans le calme et, de ce fait, le froid cessait immédiatement à la mi-mars pour voir s’installer un temps radieux qui devenait de plus en plus chaud jusqu’à la fête d’été où la Fée des Blés s’installait pour trois mois.


Au bout d’une semaine, une expédition composée de quatre lutins sportifs fut entreprise pour essayer de retrouver le lutin postier dont l’absence prolongée commençait à inquiéter la communauté.


Le temps plus clément et leur condition physique leur permirent d’accéder au sommet de la montagne en seulement deux jours.

Ce fut là qu’ils trouvèrent le lutin postier, enveloppé dans son duvet, exténué et presque sans vie.  Ils le réchauffèrent et l’alimentèrent avant de le redescendre au village.

Quelques jours plus tard, le lutin postier, encore alité, regardait le soleil entrer dans sa chambre par la fenêtre grande ouverte. Il avait repris des forces et passait pour un héros. N’était-ce pas grâce à lui que le beau temps s’était installé ?

A vrai dire, personne ne le sut vraiment, car le lutin postier ne se souvenait de rien, sauf peut-être de la vision courroucée de la  Fée des Glaces à côté de celle paisible de la Fée des Fleurs, avant de les voir toutes deux souriantes.

Mais le lutin postier n’avait-il pas rêvé ?


Non, le petit lutin postier n’avait pas rêvé car ....

La Fée des Glaces et la Fée des Fleurs, lasses de s’affronter, avaient conclu une paix en bonne et due forme. Mais, elles s’étaient tellement amusées en déchaînant les éléments, qu’elles décidèrent de perpétuer, d’année en année, ces joutes météorologiques, devenues  fausses querelles.
C’est pourquoi, encore aujourd’hui, à date anniversaire, nous devons subir des giboulées au mois de mars.









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