mercredi 22 février 2017

1782 – Est-ce que ça vous intéresse ?


  


Une question qui attend réponse

11 janvier 1782

Lettre au rédacteur des annonces
Le 27 décembre 1781, le Fosseyeur (sic) de la paroisse de S. Ouen la principale de Pont-Audemer, en creusant une fosse, dans le Cimetiere (sic), rencontra un cofre (sic), dont le bois n’a reçu aucune atteinte par le temps, les clous même n’ont point senti la rouille : le corps qui y est contenu est comme si l’on venoit de le mettre en terre, ainsi que les linges qui l’envelopent (sic) ; il est d’un blanc que rien n’a changé. C’est ce qu’a vu M. le Curé & M. Bunel, Prêtre de la paroisse. M. le Curé a fait recouvrir le cercueil de terre, & marquer la place ; il en a informé M. l’Evêque de Lisieux, & doit faire mettre une croix sur le lieu. L’on assure qu’il y a 25 ou 30 ans, M. Lebvel étant alors Curé, on trouva ce corps dans le même état ; on ignore la personne & le temps qu’elle est en terre : dans ce temps, il étoit d’usage de faire les fosses d’une grande profondeur, & l’on mettait plusieurs corps dans la même ; dans toutes les autres il ne se trouva que des ossements. On voudroit savoir les causes naturelles ou physiques qui peuvent avoir conservé ce corps jusqu’à ce jour, sans qu’il soit endommagé : à MM. Les Physiciens seuls appartient de traiter cette matiere (sic) ; nous les prions de nous faire part de leurs remarques.

Un bien curieux phénomène qui m’a semblé intéressant de vous soumettre.
Certains corps se conservent. Pourquoi ?
C’est justement la question qui est posée.


« L‘Erreigne noire » !

8 mars 1782

Il regne (sic) une maladie locale & annuelle sur les vaches, aux environs de Gournay-en-Bray, que l’on nomme Erreigne noire ; on ne s’aperçoit de cette maladie qu’environ une demie-heure avant leur mort ; elles deviennent tristes, cessent de donner du lait ; elles sont ordinairement grasses : on les sauve quelquefois par la saignée, & même les habitans (sic) les saignent dans le fort des herbes tous les mois pour éviter cet accident. Lorsqu’elles meurent & qu’on les ouvre, on aperçoit le sang porté sur une des parties de leur corps, qui est consommé par la gangraine (sic) : cette maladie les prend en tout temps, même dans le vélage (sic).
Les Habitans (sic) des environs desireroient recevoir des secours des personnes instruites dans l’art de guérir les animaux ; ils d’obligeroient même à faire une rente, ou donner une somme quelconque à celui qui trouveroit le moyen de guérir cette maladie. On prie d’adresser les avis à M. Pallain de Jouvence, à Gournay-en-Bray.

Avez-vous une idée de ce que peut être cette maladie ?
J’ai recherché, en vain......


Un trait de sensibilité

29 mars 1782


Le 23 Février dernier, le feu prit au Village de Vilaines en Barrois. Dans le même temps M. le Prince de Ligne, Lieutenant Général au service de l’Empereur, accompagné du Prince Charles, le plus jeune de ses fils, y passa. Témoin de ce désastre, il y courut avec ses gens, & donna 22 louis pour être distribués aux malheureux incendiés ; pendant ce temps, le jeune Prince ayant vu une femme qui pleuroit, en voyant le feu dévorer tout ce qu’elle avoit, fut à elle, & n’ayant point d’argent il lui donna sa montre qui étoit de prix, comptant que son pere (sic) ne le voyoit pas ; il se trompoit, car le père (sic) venant à lui, il lui dit ces mots, qui prouvoient sa satisfaction : « Bien, Charles ». Récompense sublime pour le fils, mais quel plaisir pour le père (sic) !

L’évènement se situe dans le « Barrois », couvrant le quart de département de la Meuse dont la capitale historique est Bar-le-Duc.

M. Le Prince de Ligne n’est autre que Charles Joseph Lamoral, 7ème prince de Ligne, né en 1735 et qui décédera en 1814.
Charles Joseph Antoine, son fils, né en 1759, de son union  avec Maria Franziska, avait vingt-deux ans, en mars 1782.



Un usurier condamné

28 juin 1782

Le Parlement de Toulouse a donné depuis peu, contre un usurier, un juste exemple de sévérité : puisse-t-il  effrayer à jamais ces ennemis de leurs concitoyens, qui sacrifient à une cupidité criminelle, ceux qui ont besoin de leurs secours !
François Fournier Ravisson, Marchand du lieu de Fontavines, se faisoit un plaisir de prêter de l’argent à toutes personnes qui vouloient recourir à sa bourse, mais à raison de 60 pour cent d’intérêt : encore vouloit-il que l’on fît un cadeau à sa femme, à titre d’épingle, en faveur de la négociation. Il exigeoit de plus que l’emprunteur donnât un repas dans la meilleure auberge du lieu de sa résidence, à raison de 3 liv. par tête, de maniére (sic) que celui qui avoit besoin d’une somme réelle de 300 liv. étoit forcé, pour satisfaire aux conditions prescrites, de consentir sa lettre de change, ou son billet, de 498 liv. selon le calcul suivant :
Argent compté                         300 liv.
Bénéfice, 60 pour cent            180 liv.
Cadeau à la femme                    9 liv.
Repas pour 3 personnes             9 liv.
Total                                                  498 liv.
Le procès ayant été fait à Rabisson, Arrêt du 321 Septembre 1781, qui l’a condamné, pour fait d’usures & anatocismes, à être attaché au carcan, avec un écriteau devant & derriere (sic), portant ces mots : Usurier public, pendant 3 marchés consécutifs ; en 1200 l. d’aumône envers les pauvres du lieu de S. Agreve ; à 5 liv. d’amende envers le Roi, & au banissement (sic) du ressort pour 10 ans.
Cet Arrêt est rapporté dans le volume du mois de Mars 1782, des Causes célebres (sic) curieuses de MM. Desessarts & Richer, Avocats au Parlement.


60 % d’intérêt ! Voilà qui est criminel en effet.
Le repas ..... Il n’y a pas de petit profit !
Le cadeau à l’épouse ! Avec les intérêts qu’il prenait, cet homme aurait pu les payer lui-même.
Usurier, certes, mais aussi avaricieux !

J’aurais aimé vous en dire plus sur ce fieffé coquin ! Mais, il portait un nom bien courant et l’article ne donne pas trop de renseignements.
Après le procès, cet homme et sa famille ont sûrement plié bagages et sont partis bien loin, sans demander leur reste.

Les « Causes célèbres curieuses de MM. Desessarts & Richer, Avocats au Parlement » auraient pu me dévoiler les informations que je souhaitais. Les écrits y sont fort intéressants et il faudra que je retourne les consulter. Mais concernant l’usurier dont il est question, je n’ai rien trouvé.


Quelle persévérance !

11 octobre 1782

Un Anglais, père (sic) de famille, sollicitoit depuis long-temps (sic) un emploi dans les Douanes, & le premier Ministre lui avoit souvent fait répondre qu’il n’y avoit aucun de vacant. Instruit du contraire, il s’obstinoit  à assiéger la porte de l’homme en place, espérant tout de sa constance, que l’extrême besoin dans lequel il se trouvoit, rendoit opiniâtre. En effet, il fatigua tellement le Ministre, que celui-ci en prit de l’humeur, & le fit entrer pour la lui témoigner. Le solliciteur écouta patiemment & avec respect les reproches. Et lorsqu’ils furent finis : « j’ai mérité vos plaintes, lui dit-il, mais que votre grace (sic) daigne considérer mon état & ma misere (sic) ; la nécessité m’a forcé de m’y exposer ; daignez jeter les yeux sur mon memoire (sic) : c’est l’unique faveur que j’implore ; il n’est pas long ; cette lecture sera l’affaire d’un moment. Le Ministre prit & lut ce mémoire, qui étoit conçu en ces termes : un chien étoit entré dans le palais du Prince Maurice de Nassau ; on ordonna de le chasser ; il revint, on le chassa de nouveau, on lui donna même des coups de bâton ; il revint toujours ; le Prince ordonna enfin de le laisser tranquille, & de lui donner à manger. Depuis ce temps, le chien fidele (sic) n’abandonna plus son bienfaiteur ; il s’attacha à lui, le suivant par-tout (sic), & passant toutes les nuits à la porte de sa chambre. Son Altesse Sérénissime prit à son tour de l’attachement pour cet animal, & en mourant, elle lui assigna une pension pour fournir à ses besoins. » Lorsque le Ministre eut lu ce mémoire, il sourit, & passant à son Bureau, il fit expédier & signa une commission de Directeur des Péages, qu’il remit au suppliant.

La ténacité est parfois payante. Une bien belle histoire !


Copiste

1er novembre 1782

Le sieur Rocher, Musicien & Régisseur de la musique de la Comédie, fait & entreprend toutes sortes de copies, en duo, en trio, quatuor ; & pour l’agrément & facilité des amateurs, copie les parties séparées & quatuor, si on le désire : il enseigne la musique vocale & instrumentale. Il demeure rue de l’Ecole, près S. Laurent.

L’imprimerie des partitions musicales a été un soulagement pour les copistes qui devaient, non seulement recopier chaque partie, mais aussi les « guides orchestraux » rassemblant tous les pupitres de l’orchestre.
Et tout cela, à la plume ! Quel boulot !
Cela me rappelle un de mes anciens élèves qui m’a demandé, un jour.
« Mozart, il se servait du même logiciel de musique que toi ? »

Avant de répondre sur le plan informatique, il m’a fallu lui faire un léger cours d’histoire.
Mozart, oui.... A quelle époque vivait-il ?
Quand, l’époque, la seconde partie du XVIIIème siècle, fut trouvée.
Ma seconde question fut :
« Comment s’éclairait-on dans les années 1750 ? »

J’imagine, avec bonheur, W A Mozart devant un écran d’ordinateur dont l’unité centrale était branchée à la mèche allumée d’une chandelle !
Pourquoi pas, avec beaucoup d’imagination.


Une belle amitié

1er novembre 1782

Au mois de janvier 1773, 2 voleurs de grand chemin furent arrêtés & conduits dans les prisons de Kinston ; leur crime étoit constaté. Ils se regardoient comme 2 victimes que la justice alloit immoler à la sûreté publique, lorsqu’il vint dans la tête de l’un le projet d’en arracher une à la justice. Cette idée parut d’abord ridicule à l’autre. Mais le premier ayant insisté, « nous serons infailliblement condamnés à mort ; nous avons été arrêtés ensemble ; notre crime étant commun, le supplice le sera : te sens-tu le courage de mourir seul. Cette proposition étonna celui qui l’entendoit. Cependant après un moment de silence, il répondit : oui sans doute, je me sens ce courage, mais je voudrois être sûr de t’arracher au supplice. Je n’exige point un pareil sacrifice, répartit le premier avec vivacité. Ecoute-moi, & tu verras que je suis digne d’avoir un ami aussi généreux que toi. Nous avons des cartes ; jouons une partie ; celui qui la perdra déchargera l’autre dans son interrogatoire, il dira aux Juges qu’il est seul coupable , & que si l’autre a été trouvé avec lui, c’est qu’il lui avoit proposé une promenade à cheval, mais qu’il n’avoit aucune connoissance (sic) du projet de vol ». La proposition fut acceptée : les 2 voleurs se mettent aussi-tôt (sic) tout nuds (sic), & dans cet état, il jouerent (sic) leur importante partie. L’inventeur de l’expédient la perdit. Son camarade l’embrassa en pleurant, & lui dit qu’il étoit prêt a (sic) se charger de son rôle & à lui céder le sien. « Si tu ne veux pas empoisonner les instants qui me restent à vivre, répondit le perdant, ne me fait plus une proposition qui me dégraderoit à tes yeux & aux miens, si j’étois assez lâche pour l’accepter. Songeons, mon ami, à nous amuser & à jouir du peu d’instans (sic) qui me restent à parler avec toi. Le jour où les 2 voleurs devoient être jugés étant arrivé, celui qui devoit être sacrifié remplit sa promesse avec fidélité, & la justice le condamna seul à la mort. Son camarade fut renvoyé absous ; mais il fut inconsolable de la mort de son complice ; une fievre (sic) lente s’empara de lui & le conduisit au tombeau 6 semaines après le supplice de son camarade. »

Encore une histoire intéressante. Une belle histoire d’amitié !
Je voulais vous la soumettre, comme cela, pour le plaisir.


Qui était-il ? La question reste posée.

29 novembre 1782

Le nommé  Gaspard Bentz, demeurant à Fraquelfin, en Brie, vient de finir ses jours âgé de cent & un an (sic) trois jours ; il étoit Chauffeur de profession ; il y a trois semaines qu’il se livroit  encore à cet exercice. Il étoit toujours jovial & plaisantoit souvent, tantôt sur lui-même, tantôt sur d’autres. Il a même poussé ses plaisanteries jusqu’au lit de la mort, qu’il voyoit, disoit-il, venir. Il eut la voix éteinte l’espace d’une heure ; comme on le croyoit mort, on le couvrit d’un drap pour l’ensevelir. Les mouvements qu’on fit à cet effet le rappellerent (sic) à lui, & à l’instant il invita les assistants, dont plusieurs pleuroient déjà, à lui apporter de l’eau-de-vie, qu’il trouva, dit-il, bien bonne. Sa voix s’éteignit trois fois ; trois fois il redemanda de l’eau-de-vie. La troisieme (sic) fois il tarit les larmes des quelques-uns de ses parents, par une plaisanterie qui fit beaucoup rire : J’ai, disoit-il, un cœur qui est comme celui d’un vieux loup, je ne peux pas m’en défaire. Mais il parla trop tôt, car il mourut à l’instant sérieusement.
Jamais il ne fut malade, il eut toujours bon appétit ; ce qui fait croire que le poids des années l’a seul mené au tombeau. Ce qu’il y a de singulier encore, c’est qu’il n’étoit jamais courbé, & avoit  l’ouie (sic) très-fine (sic) & la vue très-bonne (sic), & ne s’étoit jamais servi de lunettes.


Cela aurait pu être très intéressant, si toutes les villes de Moselle étaient en ligne, mais Hattigny, ville cruciale en ce qui concerne l’article, ne l’est pas !!
D’autre part, certaines années sont manquantes......

Je me suis rabattue sur ce que j’ai pu, mais je ne suis absolument pas sure de mes informations.

J’ai trouvé un acte de décès d’un certain Gaspard  Bentz dans les registres de Fraquelfin, mais dans l’acte, il est noté  « agé de quatre vingt onze ans ». Il manque tout de même dix ans.
L’âge, à cette époque, me direz-vous, est toujours approximatif, mais, l’article, note avec fierté l’âge et la bonne santé de ce centenaire, fierté de cette paroisse.
D’autre part, l’acte est en date du 28 mars 1782.
Relisons l’article du journal du 29 novembre 1792.
« ...il y a trois semaines qu’il se livroit  encore à cet exercice. Il étoit toujours jovial & plaisantoit souvent.... »
Il y a trois semaines annonce-t-on, ce qui veut dire que début novembre, cet homme était encore en vie.
Il est vrai que souvent les journalistes s’accommodent des faits et des dates !



Voilà qui clôt cette année 1782.

Triste année à vrai dire !!
Rien de bien folichon !


Les années suivantes apporteront, peut-être, un peu plus de « sensationnels ».

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