mercredi 30 septembre 2020

NOUVELLE HISTOIRE VRAIE - Chapitre 8

 


Nouvelle Histoire vraie

Chapitre 8

Le roman de Louise Joséphine Jaume

 

Mme Layrault[1] était dans l’incompréhension la plus totale, comment son employée, presque une amie, avait pu quitter la France, comme cela sans la prévenir et pour l’Amérique en plus, pas la porte à côté.

Et de plus, pas un message ! Juste cette boite de chocolats apportée par cet homme, ce monsieur Lucien Guillet qu’elle n’appréciait pas plus que cela, pour ne pas dire « pas du tout ! ».

 

Non, jamais elle ne l’admettrait !

Assurément, il était arrivé quelque chose de pas catholique à Louise.

 

Tout cela avait commencé en juin 1917, lorsque Louise avait rencontré un homme « bien sous tout rapport », suite à une petite annonce lue dans un journal. C’était le 9 mars 1917.

Très vite, il avait été convenu d’un premier rendez-vous pour faire connaissance.

Ce fut le 11 mars, lors d’une agréable promenade au Bois-de-Boulogne.

 

Toute heureuse, elle avait annoncé, très rapidement, à son employeur, la dame Layrault :

« Pensez donc ..... il a une bonne situation, une automobile, une propriété à la campagne.. et ..... et il a proposé de m’épouser ! »

En effet, cette demande ne pouvait qu’émaner d’un monsieur très comme il faut.

 

Malgré les recommandations de celle qui l’employait, Louise quitta, en septembre, son logement de la rue des Lyanes pour s’installer chez l’élu de son cœur, rue Rochechouart.

Fin septembre, alors que l’été rayonnait encore, les deux tourtereaux firent une balade à Gambais.

Le lendemain, Mme Layrault demanda, toute frétillante de curiosité :

« Alors ? Ce dimanche à la campagne ? »

Louise, un peu perplexe,  confia ses impressions un peu mitigées.

« La maison n’a aucun charme, triste, et pire encore...... SINISTRE. Mais peut-être qu’avec un peu de décoration.... Quant  à Lucien, il a passé son temps à ramasser les feuilles mortes dans le jardin pour les entasser sous le hangar. Je lui ai découvert beaucoup de petites manies qui, à la longue, peuvent devenir terriblement agaçantes. »

Puis soupirant et retrouvant son sourire, Louise poursuivit :

« Les débuts d’une relation sont parfois difficiles. Il faut s’habituer à l’autre, et je lui trouve toujours tellement de charme..... »

 

De son côté, le sieur Guillet pensait de la jeune femme :

« Belle allure. Jeune et agréable, possédant beaucoup de distinction. Caractère doux. Un peu coquette. Très.... trop pieuse. »

 

Oui, pieuse..... très pieuse.....

Et, présentement, cela allait poser problème.

Pourquoi ?

En raison des épousailles projetées.

Oui, en effet, Louise Jaume n’était pas libre !!!

Voilà pourquoi ...

 

Née Barthelemy, Louise Léopoldine[2] avait perdu sa maman alors qu’elle avait tout juste un an. De ce fait, elle avait été élevée par ses grands-parents.

Comme toutes les jeunes filles de son âge, elle rêvait d’amour, celui avec un « A », plus que majuscule.

Et ce grand amour se nommait, Paul Jaume.

Alors, contre la volonté de sa famille, elle avait épousé, le 2 juin 1908, à la mairie du 11ème arrondissement de Paris, Paul Jaume[3], né à Nîmes et résidant à Paris.

Un mariage d’amour qui avait mal tourné.

Depuis 1913, ils vivaient séparément.

Paul Jaume avait pris la direction de l’Italie. Bon vent !!

Louise, elle, avait trouvé un emploi de lingère-couturière chez les demoiselles Layrault, rue de la Chine, au numéro 26. Ces demoiselles s’étaient attachées à leur employée, elle avait tellement de qualités.

 

Voilà en quelques mots, pourquoi le mariage avec Lucien Guillet était impossible.

Lucien semblait fort contrarié.

Louise, en bonne chrétienne, restait sur ses positions et refusait de demander le divorce et de plus, se considérant toujours mariée, elle se refusait à son amoureux.

Lucien en était encore plus contrit !!!!

 

Il fallut donc beaucoup d’attention et de tendresse à cet homme déterminé pour arriver à ses fins. Ce fut le 16 novembre que Louise succomba, malgré ses principes.

Avait-elle peur de perdre son amoureux ? Assurément !!

Une demande de divorce fut entamée.

 

Tout se précipita alors.

Après avoir démissionné de son emploi, au grand regret des demoiselles Layrault qui voyaient d’un mauvais œil cette union, Louise et Lucien firent plusieurs séjours à Gambais.

Le 24 novembre, les meubles de Louise furent déménagés, vers une destination...... inconnue !!!

 

Le 25 novembre, nouveau voyage pour Gambais.

Avant leur départ, Louise émit le souhait d’aller prier à l’église du Sacré-Cœur. Elle souhaitait demander à la Vierge sa bénédiction, pour sa nouvelle vie, sa future union.

 

Après cette date, personne n’eut de nouvelle de la jeune femme.

 

Les demoiselles Layrault, furent, apparemment les seules à trouver cela étrange.

Pourquoi ce silence ?

« Partie en Amérique ! Sans prévenir ! Nous n’allons pas gober ça ! Et ce n’est pas une boite de bonbons ou de chocolats  qui va nous faire taire !!! »

Et elles avaient raison, les demoiselles Layrault !

Il y avait bien « du louche » dans cette affaire.

 

Le 26 décembre 1917, un courrier, adressé à Louise Jaume, l’informait que la demande d’assistance judiciaire qu’elle avait sollicitée lui était accordée.

Cette demande n’eut aucune suite......

 



[1] On trouve aussi les orthographes : Layrhault – Lairhault – Lairault.

[2] Sur beaucoup de documents, Louise est prénommée « Louise Joséphine », son acte de mariage note « Louise Léopoldine ». Elle est née le 28 juillet 1879 à Nîmes.

[3] Paul Jaume avait un frère, Henri. Né le 22 février 1877 à Nîmes - Décédé le 28 décembre 1925  à  Bergerac – exerçant la profession de mécanicien à Paris en 1908.

 

Ne montrer pas les dents !!!!

 

Vous arrive-t-il de « rechigner » ?

 

 

Ce verbe était surtout employé dans la locution : « denz rechignier ».

Ce qui voulait dire : « rechigner des dents »

Nous voilà bien avancés !!!

 

Reprenons « denz rechignier », peut se traduire par :

·         Grincer des dents

·         Montrer les dents en grimaçant.

 

Ce verbe s’orthographiait « rechignier », vers 1155.

Et s’écrivit « rechigner » vers 1200.

Il est composé de

·         « Re », montrant l’intensité et de « chignier » signifiant : « tordre la bouche ».

 

Je vous vois grimacer en lisant mon petit texte....

Attendez !!! Il y a une suite !!!

 

A la fin du XIIème siècle, et depuis lors rien n’a changé  jusqu’à ce jour, « rechigner » prit le sens de :

·         Montrer sa mauvaise humeur

·         Prendre un air maussade

·         Avoir une répugnance à exécuter une tâche

 

Et les dérivés, me direz-vous ?

 

Ils sont présents, bien sûr, et les voilà !!!

·         Une personne rechignée, est quelqu’un de morose, maussade.

·         Un rechignement (début des années 1400) est un refus d’effectuer une besogne.

·         Un rechigneur (1595) un homme qui, maussade, ne souhaite pas faire son travail ou alors avec mauvaise humeur. La totale !!!

·         Et quelqu’un peut être rechigneux – féminin rechigneuse.

 

Que puis-je vous concocter ?

Un rechigneur rechigneux rechigne à faire son ouvrage. C’est un acte de rechignement !!!

 

Bien sûr, ne vous avisez surtout pas de prononcer une telle tirade, vous seriez immédiatement internés !!!

Et là, devant l’insistance des infirmiers à vous mener en maison de repos, assurément vous rechignerez !!!

 

 

Pour cette petite histoire autour d’un mot,

Je me suis aidée du

« Dictionnaire historique de la langue française » Le Robert

jeudi 24 septembre 2020

NOUVELLE HISTOIRE VRAIE - CHAPITRE 7

 


Nouvelle Histoire vraie

Chapitre 7

Le roman de Célestine Buisson

 

Célestine Lavie avait apporté, dans sa corbeille de mariage, un enfant né d’un amour de jeunesse. Le petit Gaston, né à Pau en février 1896, avait grandi dans les Pyrénées où il était resté lorsque sa maman était montée à Paris.

En effet, Célestine avait confié son fils, ne pouvant l’emmener avec elle, car il lui aurait été bien difficile de s’occuper de lui tout en travaillant, d’autant plus que le petit était quasi-aveugle.

 

Célestine Lavie, parisienne d’adoption, ne resta pas longtemps célibataire. Elle rencontra Guillaume Buisson, un homme qui avait également connu les deuils, puisqu’il avait eu la douleur de perdre deux épouses[1].

Comme dans les contes de fées, ils se plurent et se marièrent, à la mairie du 13ème arrondissement, le 4 juillet 1905.

Seule petite différence avec les contes, ils n’eurent pas « beaucoup d’enfants ». Il serait même plus juste de dire qu’ils « n’eurent aucun enfant ».

 

Sept années après leurs noces, Célestine Lavie devint madame veuve Buisson.

Guillaume Buisson s’était éteint à l’âge de cinquante-neuf ans, le 12 décembre 1912.

Malgré le chagrin, il fallut bien à la veuve poursuivre son chemin. Elle s’installa alors dans un appartenant moins vaste au numéro 42 de la rue du Banquier, quartier de la Salpêtrière dans le 13ème arrondissement.

C’était au cours de l’année 1913, juste avant la déclaration de guerre et la mobilisation d’août 1914.

 

Seule, dans son appartement, son existence lui semblait bien fade.

Dans les durs moments du début de cette guerre que l’on avait cru brève et qui semblait vouloir s‘éterniser, elle aurait bien aimé avoir une épaule sur laquelle s’épancher.

 

Son fils, Gaston, était de la classe 1916. Son handicap allait-il l’exempter de ce chaos militaire ?

Bien sûr avec des lunettes, il pouvait se diriger, faire quelques tâches, mais nullement être pris comme soldat dans l’infanterie ou l’artillerie. Il n’irait donc pas au front, dans les tranchées, cela la soulageait, la réconfortait, mais il pouvait peut-être intégrer l’intendance[2].

 

Ce fut par hasard que Célestine prit connaissance d’une petite annonce. Un monsieur, aussi isolé qu’elle, cherchait à combler sa solitude en partageant sa vie avec une femme aimante.

« Pourquoi pas ? » se dit-elle.

 

Et elle répondit à cette main tendue, le 1er mai 1915.

"Monsieur. Excusez-moi, ayant vu votre annonce dans un journal. Je suis veuve, j’ai 12 000 F, j’ai quarante-quatre ans, j’ai un fils au feu, donc je suis seule et voudrais me refaire une situation."

 

Quelle insouciance d’étaler ainsi et immédiatement le montant de ses biens !!

 

Après un échange de deux ou trois correspondances, Célestine invita le monsieur de l’annonce à une première rencontre.

A quel endroit ?

Chez elle.

Chez elle !

Mais quelle imprudence !!!

Ne connaissait-elle que peu de choses sur cet homme ?

Seulement qu’il se nommait, mais c’était lui qui l’affirmait, Georges Fremyet, qu’il était ingénieur et demeurait au 152 de la rue Saint-Martin.

Elle ne savait même pas à quoi il ressemblait !!

 

Rapidement,  le couple devint très intime.

 

Monsieur Georges Fremyet possédait, assurément, un charme époustouflant.

Un charme époustouflant, c’était le cas, car ce que ne savait pas Célestine, c’était que son nouvel amoureux entretenait de nombreuses liaisons, et qu’il maniait, à merveille, le mensonge.

 

Un matin, donc, Georges Fremyet avertit Célestine que ses affaires le demandaient en Tunisie et que, de ce fait, hélas, ils devaient s’absenter au moins six mois.

Six mois !!

Mais puisqu’il le fallait !!

 

Le retour fut festif !

Les deux amants reprirent leur vie commune et Célestine Lavie était aux anges lorsqu’elle présenta son futur époux (eh oui, il y avait eu promesse de mariage !) à sa famille. 

Georges Fremyet fit donc la connaissance des sœurs de Célestine, nées du mariage de sa mère avec Pierre Lacoste :

·         Marie Lacoste, la dernière de la fratrie, née en 1886, toujours demoiselle.

·         Catherine, née en 1881, épouse de Pierre Paulet[3].

D’un de ses futurs  beaux-frères, Pierre Paulet, l’époux de Catherine, et de leurs deux enfants :

·         Yvonne Andrée Louise[4]

·         André Maurice[5]

 

 

Georges Fremyet eut même le privilège, en était-ce réellement un pour lui, de rencontrer le fils de sa future, Gaston, venu trois semaines à Paris, en juin 1916, avant de repartir pour Bayonne où il résidait.

 

Tout était pour le mieux et aurait été parfait, sans les échos de cette guerre qui s’intensifiait.

 

Le couple Lavie-Fremyet déménagea pour un appartement plus spacieux, au numéro 113 du boulevard Ney. Les clefs de leur petit « chez eux » leur furent remises le 30 avril 1917.

Le 12 mai, petite promenade à la campagne dans la ville de Gambais. Plusieurs séjours suivirent à la fin de ce même mois.

 

Un drame familial survint. Catherine tomba malade et dut être hospitalisée à la Piété. Malheureusement, elle ne devait pas quitter cet hôpital, car elle y décéda le 21 juillet.

Un rude coup pour le mari qui se retrouvait seul avec deux enfants.

Georges Fremyet, compatissant, soutint le jeune veuf, l’aidant même dans les démarches administratives.

 

Les deuils !! Il y en avait tant surtout en ces années de guerre... ce n’était pas pour autant qu’il fallait s’empêcher de vivre, malgré la douleur.

C’était ainsi !

Il fallait faire avec.....

 

Le 17 août 1917, Célestine et Marie allèrent  se recueillir sur la tombe de leur sœur Catherine..... Depuis ce jour, Marie Lacoste ne revit jamais Célestine.

Cependant, elle reçut quelques cartes postales au texte banal, tout comme certaines autres personnes, telles madame Moynat ou encore madame Simon, amies de Célestine.

Ces cartes étaient datées du 1er septembre........ 

 

Et puis, ce fut le silence le plus complet.

 

La police fit des recherches sans succès..... Cette jeune femme, majeure, avait le droit de refaire sa vie, ailleurs, et de n’en rien dire.

Elle avait vidé ses comptes !  Elle avait vendu ses biens !

Voilà la preuve qu’elle souhaitait tourner la page !

 

Mais pour la famille, c’était inconcevable, ils étaient tous unis, jamais Célestine ne les aurait laissé sans nouvelle, et puis..... il y avait Gaston, son fils.....

 

La vérité fut dévoilée...........

 

 



[1] Guillaume Buisson, né le 23 octobre 1853 à Saint-Germain-l’Herm (Puy-de-Dôme) – veuf en premières noces de Eugénie Rodier, décédée le 20 février 1886 à Paris et en secondes noces de Marie Poinson (mariage le 13 juin 1887 à Saint-Catherine dans le Puy-de-Dôme – décès de Marie le 13 juin 1887 à Paris).

[2] La fiche militaire de Gaston Lavie – né le 13 février 1896 à Pau – nous renseigne sur le sérieux handicap dont il était atteint : « forte myopie : OD 2/10 – OG 1/20 » - En avril 1920, il reçut une pension d’invalidité 100% pour cécité. Autre précision : il mesurait 1, 59 m, avait les yeux châtain-vert et les cheveux châtains.

[3] Catherine Lacoste et Pierre Paulet s’étaient unis le 26 décembre 1903, dans la mairie du 9ème arrondissement.

[4] Yvonne Andrée Louise avait vu le jour le 19 septembre 1904 dans le 13ème arrondissement.

[5] André Maurice était né le 9 août 1905 dans le 13ème arrondissement.

 

 

 

Glauque !!

Un adjectif qui, aujourd’hui, n’augure rien de bon !!

Glauque !!!

Lugubre.... sinistre.... sordide ...  générant des images de morts-vivants.

Ambiance d’horreur et frissons garantis.

 

Mais il n’en fut pas toujours ainsi de cet adjectif qui, issu du latin « glaucus », s’orthographiait « glauke » à l’origine, et possédait, vers 1503, une signification bien plus limpide, car il se rapportait à la couleur verte, cette couleur se rapprochant du vert-gris-pâle de l’eau de mer ou encore de l’éclat et du brillant des reflets de l’océan ou de la lune.

 

Avoir les yeux glauques, ce n’est donc pas avec les yeux vitreux et inexpressifs, c’est posséder un iris bleu très clair.

Donc absolument rien à voir avec les visions glauques que génère ce mot aujourd’hui !!!

 

 Et le glaucome ?

C’est un terme médical désignant une affection de l’œil, caractérisée par la couleur du fond d’œil.

Pour plus de détails, si cela vous intéresse, dirigez-vous vers votre ophtalmologiste.....

 

 

Pour cette petite histoire autour d’un mot,

Je me suis aidée du

« Dictionnaire historique de la langue française » Le Robert

 

 

 

jeudi 17 septembre 2020

NOUVELLE HISTOIRE VRAIE - CHAPITRE 5

 

Nouvelle Histoire vraie

Chapitre 5

Le roman de Anne Collomb


 

Deux petites annonces dans un journal vont sceller à jamais le sort de cette femme.

 

"J’ai 39 ans, je suis veuve, sans enfant, et pour ainsi dire sans famille puisque sous peu elle quittera Paris. Je gagne 2100 F par an dans un bureau. Je suis parvenue à faire quelques économies qui, avec le petit peu que j’avais quand mon mari est mort, s’élèvent à 8000 F."

« M. 45 ans, seul, sans famille, situation 4 000, ayant intérieur, désire épouser dame ayant situation en rapport. »

 

Mai 1916, Mme veuve Collomb, âgée de quarante-quatre[1] ans, trouve la vie bien triste.

Veuve depuis quinze ans, elle travaille comme dactylographe dans une compagnie d’assurance, un emploi qui lui amène un salaire lui permettant de vivre aisément, voire de mettre un peu d’argent de côté.

De l’argent de côté ! Pour en faire quoi quand on est seule ?

 

Bien sûr, elle a un ami, mais elle sait que cette relation est sans avenir.

Ce qu’elle souhaite, Anne Collomb, c’est trouver un mari pour partager sa vie au quotidien.

Voilà pourquoi, elle avait franchi le pas en faisant paraître une petite annonce dans laquelle elle s’était rajeunie afin d’avoir plus de chance. D’ailleurs, à bien la regarder, brune, petite et toute menue, Anne Collomb ne fait pas ses quarante ans.

Un petit mensonge bien anodin, qu’il serait facile à expliquer et à se faire pardonner, si elle rencontrer « l’homme idéal », celui dont elle rêve tant.

 

De son côté, un certain Monsieur Cuchet, l’auteur de la seconde annonce, cherche également l’âme sœur.

 

Mis en relation, le couple se rencontre, parle longuement, se plaît et envisage une relation durable et plus intime. Très vite, même, ils se mettent en ménage et envisagent de se marier.
Oui, ils se mettent en ménage ! Madame Collomb quitte même son appartement de la rue Rodier et le couple s’installe rue Châteaudun dans ce qui devient leur « petit nid d’amour ».

 

Anne Collomb est heureuse. Enfin, elle envisage l’avenir avec espoir. L’homme qu’elle a rencontré grâce à un petit encadré dans le journal est aimant, attentionné et.... ne manque pas de charme.

 

Ne manque plus à son bonheur que le passage devant monsieur le maire et l’alliance au doigt.

Pour cela, il faut régler un petit détail et pas de moindre.

La France est en guerre. Monsieur Cuchet est un réfugié venant de Lille. Dans le nord de la France, les combats font rage, beaucoup de villes sont détruites. Pour se marier, il faut des papiers, et les délais pour les obtenir sont très longs.

 

Anne Collomb se montre conciliante et patiente :

« Nous attendrons le temps qu’il faudra. Ils arriveront bien un jour tes papiers ! »

 

Monsieur Cuchet joue de son charme. Ses fonds sont en baisse, il attend également que ses affaires soient réglées, tout là-bas dans le nord. Alors, compréhensible, Anne ouvre les cordons de sa bourse et donne de l’argent à son amant.

Ce que Anne ignore, c’est que son Dom Juan entretient d’autres relations « amoureuses » avec bien d’autres femmes......

 

Fin décembre 1916, juste après Noël, monsieur Cuchet propose à son amie de visiter une maison à Gambais qu’il vient de louer.

Tous deux prennent le train.

C’est l’hiver, il fait froid, mais le temps est radieux.

Une belle balade en perspective.

 

Aucune nouvelle de Anne Collomb depuis le 27 décembre 1916......

A la fin de la guerre, Madame Pellat, une amie de Anne, inquiète de son silence prolongé, interpelle les autorités.........



[1] Peu de chose sur cette dame, seulement une année de naissance, 1872, sans lieu. Pas de nom de jeune fille non plus, ces manques rendant les recherches vaines.