mercredi 27 mars 2024

Au Carmel d'Evreux

 

En 1856, les sœurs carmélites du Carmel de Pont-Audemer s’installèrent dans de nouveaux locaux nouvellement construits à Gravigny.

 

La vie de ces carmélites, ponctuée de prières, était aussi une vie de labeur puisque pour subvenir à leurs besoins, elles devaient travailler. 

Le Carmel d’Evreux situé à Gravigny, non loin de la maladrerie, était un lieu de paix et de méditation.

 

Le calme de cette communauté religieuse fut malgré tout bouleversé.








Que se passa-t-il le 21 novembre 1883 au Carmel d’Evreux ?


Le diable ne s’était-il pas invité dans le lieu ?

 

 

C’est ce que je vous propose de découvrir......

À partir de la semaine prochaine.

Hagard et hagarde !

 





Cet adjectif est, vers 1393, un terme de fauconnerie sans doute dérivé du normand hague (1341) = haie, palissade qui, vers 1780, avait la signification de bâton, trique.

Alors là, ça se complique, car le mot pourrait être emprunté à un mot du moyen anglais, hagger = sauvage, lui-même provenant de hag = sorcière.

Ou encore de l’allemand, hagerfalk = faucon sauvage.

Ce dernier terme se rapproche de la fauconnerie, mais le hague normand (haie) pourrait bien être l’abri de cet oiseau !!!

 





Pour éclairer tout cela ou pour tout brouiller, il existait les expressions suivantes :

·         Un faucon mué de haie, soit un faucon sauvage.

·         Un faucon mué de ferme, soit un faucon domestique.

 

·         Un hagard, en fauconnerie, est un oiseau capturé adulte, trop farouche pour être apprivoisé.

·         Un oiseau niais, est un oiseau pris au nid.

·         Un oiseau sors, un oiseau en plumage brun de jeune.

 

À la fin du XIXème siècle, le terme hagard fut attribué aux personnes pour « farouche », sens que nous lui connaissons de nos jours.

 

Retenons toutefois certaines expressions d’antan :

·         Début XVème siècle : un cueure (cœur) hagart = cœur sauvage.

·         En 1577 : un regard hagart.

·         En 1585 : un oil  (œil) hagard.

 

 

Hagard a aussi le sens de perdu, égaré, apeuré.

 

 

Pour cette petite histoire autour d’un mot,

Je me suis aidée du

                   « Dictionnaire historique de la langue française » Le Robert

 

mercredi 20 mars 2024

Bizarre ! Bizarre !

 


Bizarre, vous avez dit « bizarre » ? Comme c’est étrange ![1]

 

Bizarre, de l’italien :

Bizzaro = coléreux (1300-1313)

= Extravagant (début XVIème siècle).

Ce mot s’orthographiait, bigarre, avant 1544.

 

Mais, il se peut (pour faire compliquer évidemment) que son origine ne soit pas italienne, mais provienne de l’espagnol, bizarro (1526) = brave.

Ou encore du basque, bizar = barbe ou homme énergique.

 

En tout cas, un mot qui eut bien de mal à trouver sa forme définitive puisque son orthographe passa par :

Bigearre – bigarre – bigarré - bizerre et bizarre.

 

D’abord on dit :

Une bizarre (1544) = chose ou personne étrange, puis avec le temps, cette personne devint capricieuse, irritable et changeante.

Enfin, de une (féminin) bizarre prit le genre masculin, un.

 

Un mot d’où d’écoulent :

·         Une bizarrerie (1555)   : nom qui remplaça la bizarreté et la bizarderie.

·         Bizarrement (1587)       : qui vint après bijarrement, capricieusement étrangement

·         Bizarroïde (adjectif)      : d’abord bizarroïd (1893) sous la plume d’Alphonse Allais et avant      

                                            1922 dans les écrits de Proust. Mot argotique.

 

Et puis, il y a, en vénerie (vers le XVIIIème siècle), l’adjectif bizarde, nommant une tête de cerf dont les bois sont mal formés. Une bizarrerie de la nature !

 

 

Pour cette petite histoire autour d’un mot,

Je me suis aidée du

                   « Dictionnaire historique de la langue française » Le Robert

 



[1] Une des répliques du film de Carné-Prévert, « Drôle de drame ».

Un exilé[1] de marque - quatrième partie – Retour en grâce.

 

Par acte de clémence, à l’occasion du mariage de son neveu, Charles Ferdinand d’Artois,  Duc de Berry,  avec Marie Caroline de Bourbon Sicile, le 17 juin 1816 ; mais surtout en raison d’aucune charge réelle d’inculpation à l’encontre du Maréchal, le roi, Louis XVIII, mit fin à cet exil, le 20 juin 1816.

Quand la nouvelle parvint aux autorités lovériennes, Louis Nicolas Davout, prévenu auparavant, avait déjà repris la route de Savigny-sur-Orge.

 

Adieu, Les Planches ! Adieu, Louviers ! Trop de mauvais souvenirs. L’homme n’y revint jamais !

  

Le Maréchal fut réintégré dans ses dignités et reçut de nouveau le bâton de maréchal en août 1817. En 1819, il entra à la Chambre des Pairs.

 

À la suite de cette contrainte à résidence, le Maréchal vécut retiré dans son château de Savigny-sur-Orge. Il fut d’ailleurs élu maire de cette commune et exerça son mandat de 1822 à 1829.

 

Un événement douloureux atteint la santé déjà fragile du Maréchal, le décès de sa fille Joséphine Louise Antoinette. Troisième enfant du couple, né le 2 septembre 1805, Joséphine Louise Antoinette avait épousé Achille Pierre Félix Vigier, le 5 août 1820. Un an après, le 19 août 1821, elle décéda après avoir mis au monde, Joseph Louis Jules Achille[2]. Elle allait avoir seize ans.

 Le pauvre père, inconsolable, miné par le chagrin s’éteint le 1er juin 1823, à Paris.

Son épouse, Aimée Leclerc, lui survécut quarante-cinq années[3].

 

-=-=-=-=-=-

 Savigny-sur-Orge a été marqué par la famille Davout et ses descendants. Après Louis Nicolas Davout,

·         Achille Pierre Félix Vigier, son gendre, fut maire de 1823 à 1831

·         Louis Napoléon Davout, sixième enfant de la fratrie Davout, administra la commune  de 1843 à 1846

 

Le château, propriété familiale, fut vendu à l’Etat au XXème siècle, après la Seconde Guerre Mondiale et devint un lycée[4] en 1853.

 

Louise Adélaïde Davout (1815-1892), dernière enfant du couple, devenue par mariage Marquise de Blocqueville, publia, en 1887[5], « Le Maréchal Davout dans sa correspondance avec la Maréchale ».

 

Une correspondance sous fond de campagnes napoléoniennes qui dévoile aussi les tendres relations des époux Davout.



[1] Cette nouvelle a pris vie suite à la lecture de l’opuscule « l’exil du maréchal Davout à Louviers » rédigé par Albert Le Lorier (1901).

[2] Le petit garçon est né le 12 août 1821

[3] Décès le 17 décembre 1868 à 86 ans.

[4] Actuellement lycée Corot

[5] Librairie Perrin, Paris – 1887.

mercredi 13 mars 2024

Un exilé[1] de marque - troisième partie – surveillance.

 

Un homme dans la place, c’était l’idéal pour effectuer une surveillance des plus efficaces.

Grâce à cet  espionnage, on apprit le nom des alliés à la cause du maréchal déchu. Ils furent alors pointés du doigt et surveillés également :

·         Mme Tollé[2], épouse de Nicolas Langlois le jeune, négociant, rue du quai.

·         Mme Beratte[3], épouse de Charles Langlois, filateur à Louviers, chaussée de la Porte de Rouen.

 

Les rapports transmis au procureur n’apprirent pas grand-chose :

Dimanche 11 février 1816

« Le maréchal, taciturne et triste, ne sort que pour quelques promenades, hors de la ville, souvent sur la route d’Evreux.

Le soir, il voit toujours les mêmes personnes, parmi lesquelles, le fils  Le Camus, fils de la Dame Daireaux. On le dit, ruiné, mais surtout ennemi juré du roi et des Bourbons.

Le maréchal cherche une autre maison pour s’y installer. »

 

Lundi 19 février 1816

« Un cousin germain de la maréchale est venu la prendre pour régler quelques affaires de famille à Paris.

La maréchale se déplace assez fréquemment vers la capitale ou Savigny-sur-Orge. »

 

Mercredi 27 mars 1816

« Petite visite du château de Navarre près d’Evreux. »

 

Pour cette visite de la résidence euroise de l’impératrice Joséphine, qui fut presque un pèlerinage à la mémoire de Napoléon, des passeports avaient été validés pour la journée par le maire de Louviers, en raison de l’absence du sous-préfet.

 

Début mai, une rumeur vint aux oreilles des autorités.

Il était question de complot.

L’Empereur organisait, secrètement, selon les dires, son second retour.

En raison de cela, la surveillance de l’exilé fut accrue. D’ailleurs, si il y avait complot, celui-ci ne pouvait qu’être déjoué rapidement. N’y avait-il pas, en bonne place, dans la résidence, un homme aux yeux et oreilles toujours aux aguets ?

 

Un espion qui avait su capter les bonnes grâces de madame Davout, par son attention perpétuelle.

« Madame la Maréchale, souhaite-t-elle quelque chose ? »

« Madame la Maréchale, a-t-elle besoin de mes services ? »

« Madame La Maréchale a sonné ?.... »

 

Tout mielleux, qu’il était le domestique-espion !

Tout sournois qu’il était le domestique-espion !

Trop poli pour être honnête, comme disait le proverbe !

 

A tel point que, peu à peu, ce domestique-espion était devenu suspect.
Toujours là où il n’avait rien à y faire, entrant dans les chambres privées sans raison valable, furetant sans cesse.

Alors, il fut congédié !


Le 31 mai 1816, Louis Nicolas Davout informa le sous-préfet de son désir de changer de lieu de résidence. Il souhaitait que celui-ci soit transféré en la commune des Planches.

Selon son entourage, la ville de Louviers ne lui convenait pas, aussi il avait trouvé une maison de campagne. Mais  en fait, dans une impasse financière embarrassante, la raison de ce déménagement n’était que pécuniaire.

Des problèmes d’argent dus à l’arrêt du paiement de sa solde et qui avaient entraîné la vente de toute l’argenterie de la maison Davout ainsi que la mise en location, à des Américains, de l’Hôtel de Monaco à Paris.



[1] Cette nouvelle a pris vie suite à la lecture de l’opuscule « l’exil du maréchal Davout à Louviers » rédigé par Albert Le Lorier (1901).

[2] Autre orthographe : Trollait. Cette dame était également parente d’Aimée Leclerc, épouse Davout.

[3] Autres orthographes : Barat

Brrrrrr !!!! Quel blizzard !

 


 

Ce mot fut emprunté à l’anglais blizzard, lui-même d’origine américaine.

·         En 1829  = chose extrême, coup violent.

·         En 1835 = réplique cinglante.

·         En 1859 = violente tempête de neige.

 

Mais le mot, bien qu’anglais, viendrait de l’allemand blitz ou blilz désignant un éclair.

Nous sommes donc toujours dans la météorologie.

 

Le mot blizzard pour nommer une violente tempête de neige s’est rependu dans la presse américaine lors de l’hiver 1880-1881.

 

Aujourd’hui, le blizzard est une tempête de neige accompagnée d’un froid très vif et cinglant.

 

 

Pour cette petite histoire autour d’un mot,

Je me suis aidée du

                   « Dictionnaire historique de la langue française » Le Robert

mercredi 6 mars 2024

Un exilé[1] de marque - seconde partie – installation à Louviers.

 

Pour quelles raisons le Maréchal Davout fut-il exilé à Louviers du 31 janvier au 21 juin 1816 ?

Pourquoi cet isolement ?

Inquiétait-il à ce point les dirigeants de la Seconde Restauration ?

 

Incontestablement, sa prise de position lors du procès de Maréchal Ney, accusé de trahison et condamné à mort, le 6 décembre 1815, acheva de le perdre aux yeux du gouvernement.

En effet, ce fut bien à la suite de cette exécution et par ordonnance royale du 27 décembre 1815 que le Maréchal fut assigné à résidence dans cette ville de l’Eure, éloignée de la capitale, mais pas suffisamment, afin de permettre à la Maréchale, son épouse de se rendre régulièrement sur leur domaine de Savigny-sur-Orge, dans la Seine-et-Oise et à Paris, pour y gérer leurs affaires.

 

Car, Madame la Maréchal n’envisagea, à aucun moment,  de vivre  séparée de son époux, surtout dans de pareilles circonstances. N’avaient-ils pas vécu, trop souvent, toutes ces années, éloignés l’un de l’autre ?

 

Le Préfet de Seine-et-Oise reçut donc en cette fin décembre 1815, du ministre de la police générale, monsieur Decazes, l’ordre de délivrer les passeports indispensables. Ceux–ci furent établis le 22 janvier 1816.

 

Cinq jours plus tard, ce fut au tour du préfet de l’Eure, le marquis de Gasville, d’être averti, par le sieur Decazes, de l’arrivée prochaine du Maréchal qui devait faire l’objet d’une surveillance secrète.

Il fut également précisé qu’aucun passeport, pour quelque lieu que ce fut, ne lui serait délivré, sans autorisation ministérielle.

 

Passant par Vernon où une halte avait été prévue afin de récupérer les passeports, ce fut le soir du 31 janvier 1816 que le Maréchal Davout arriva dans la ville de Louviers, accompagné de son épouse, d’un enfant en bas âge et de plusieurs domestiques.[2]

 

Dès le lendemain, Hercule Timoléon Coquerel[3], maire en exercice, rendit compte de l’installation de Louis Nicolas Davout et des siens au préfet.

 

Accueillis, rue royale, dans la maison de madame veuve Lecamus, veuve d’un cousin d’Aimée Leclerc, remariée avec le sieur Daireaux, ancien proviseur d’un lycée de Paris, où les époux résidaient encore.

 

À compter de ce jour, une surveillance acharnée se mit en place, mais avec toute la discrétion nécessaire afin de ne pas éveiller les soupçons.

Tous faits et gestes devaient être minutieusement consignés par écrit :

  • ·         Les activités du maréchal, celles de son épouse et même celles des domestiques.
  • ·         Les déplacements des uns et des autres dans le moindre détail.
  • ·         Les personnes rencontrées, le lieu des rencontres.
  • ·         Les démarches effectuées, les liaisons avec habitants ou personnes de passages.

Tout !

 

Le sous-préfet de Louviers remplit sa mission avec ardeur.

Le maire, par contre, s’en acquitta avec tiédeur

Quant au procureur du Roy, M. H. Delafoy[4], très heureux de la confiance que le ministère lui accordait, il redoubla de zèle.

 

D’ailleurs, pour mieux remplir cette mission, dès le 7 février, il engagea un homme sûr qui s’introduisit, sans difficulté, comme domestique dans la maison où résidait le Maréchal Davout, à la faveur du surcroît de besognes occasionné par cette installation précipitée.

 

 


[1] Cette nouvelle a pris vie suite à la lecture de l’opuscule « l’exil du maréchal Davout à Louviers » rédigé par Albert Le Lorier (1901).

[2] Dans l’opuscule d'Albert de Lorier, il n’est question que d’un enfant. Une autre source parle de  deux enfants, ce qui serait plus exacte : Louis, né en 1811 – âgé de 5 ans – et Adélaïde, née en 1815, âgée en février 1816 de neuf mois (entre ces deux enfants un petit   Jules avait vu le jour en 1812 pour décéder  peu après en 1813). Il se peut que le valet de chambre du Maréchal, Taddeus Mayer, fut du nombre des domestiques – Prussien, il avait été soigné par le Maréchal qui l’avait gardé ensuite à son service.

[3] Hercule Timoléon Coquerel fut maire de Louviers de décembre 1815 à septembre 1823.

[4] M. H. Delafoy, procureur de novembre 1815 à janvier 1821