mercredi 26 octobre 2022

Les derniers condamnés à mort dans l'Eure et en Seine-Maritime - François Firoteau - quatrième partie

 


Troisième condamné, un nommé François Firoteau

Quatrième partie

 

 

Il fallait, un gros coup... un seul.... un dernier.....

 

Un gros coup, ça c’était certain, qu’il ne fallait pas louper.

 

 

Dehors, tous deux, le 12 décembre 1890, Firoteau et Vatinel mirent au point ce qui devait être leur dernier méfait.

Premièrement : trouver une cible.

Leur choix se fixa sur la Ferme des Barrières Rouges à Breteuil dont le propriétaire se nommait  François Taurin Chauvin.

François Taurin Chauvin, né le 4 mai 1816, avait, toute sa vie, travaillé sur sa terre. Très estimé, il avait été élu conseiller municipal de la ville. Depuis son veuvage, son épouse Julie Joséphine Lérot étant décédée le 28 février 1885[1], sa maison était tenue par une servante âgée de soixante-quatre ans, la veuve Buisson. Un jeune domestique de vingt-six ans s’occupait des plus durs travaux de la ferme.

 

Pour nos deux larrons, cette propriété présentait l’avantage de n’avoir aucun voisin proche et l’on disait aussi que son propriétaire possédait une certaine aisance.

 

A la faveur de la nuit, les deux compères se faufilèrent dans une des dépendances attenantes au logis, attendant le moment propice. A l’aube, alors qu’ils s’apprêtaient à commettre leur larcin, ils entendirent des pas. C’était la servante qui descendait à la cave.

Mais pourquoi se levait-elle si tôt ?

 

Afin de neutraliser la femme, ils l’assommèrent avec un bâton.

La route étant libre, ils s’introduisirent dans le logis. Tout semblait calme. Le sieur Chauvin devait encore dormir.

Non, pas vraiment, car apparut, sur le seuil de la cuisine, François Taurin Chauvin encore tout ensommeillé.

Les deux bandits, surpris, s’élancèrent sur lui et se servirent du même bâton que précédemment afin de le neutraliser. Mais, le coup fut plus fort, beaucoup trop fort et l’homme tomba sur le sol, succombant aussitôt.

 

Firoteau et Vatinel étaient bons pour la guillotine.

Il leur fallait prendre au plus vite l’argent et se carapater.

Ils trouvèrent rapidement une somme de deux cents francs, l’empochèrent et prirent la poudre d’escampette.

 

Bien mal acquis ne profite jamais...... nos deux assassins furent très vite interceptés par la maréchaussée.

 



[1] Les époux s’étaient unis le 24 juillet 1839 à Saint-Denis-du-Béhélan (27).

 

Une histoire de mansarde !

 


Une mansarde

 

Ce nom fut donné, à partir de 1650, aux combles aménagés « à la Mansarde », du patronyme de l’architecte François Mansart.

 


Qui était François Mansart ?



Fils d’Absalon Mansart et de Michelle Le Roy, son père était maître charpentier au service du roi Louis XIV et ses grands-parents, côté maternel, architectes et ingénieurs, ayant œuvré sous le règne de  Louis XIII.

Né le 23 janvier 1598 à Paris, il était le sixième enfant d’une fratrie de sept.

François Mansart est considéré comme le principal précurseur de l’architecture classique française.

Il travailla toute sa vie à l’édification de palais – châteaux -  hôtels particuliers – maisons – édifices religieux.... Un travail de Titan.

Il ne s’est jamais marié et n’a eu aucune descendance.

Il décéda de maladie le 23 septembre 1666 à Paris.

 

 Une mansarde ?

Comble brisé dont chaque versant possède deux pentes, le brisis et le terrasson, articulés par la ligne de bris.

Ce nom fut également attribué à la pièce aménagée.

 


Balzac emploie dans ces écrits le terme suivant  « chambre mansardée », vers 1844.

 

Toutefois, Mansart ne fut pas le premier à utiliser ce procédé de construction qui porte aujourd’hui son nom. Il y eut avant un certain Pierre Lescot ......

Pierre Lescot, né en 1515 à Paris et décédé le 10 septembre 1578 à Paris, architecte français, ayant initié un style d’architecture classique. Il a, entre autres, rénové la façade du Louvre. 

 

Si vous dormez dans une mansarde, vous aurez à présent une petite pensée pour François Mansart avant se sombrer dans le sommeil.

 

Pour cette petite histoire autour d’un mot,

Je me suis aidée du

« Dictionnaire historique de la langue française » Le Robert

mercredi 19 octobre 2022

Les derniers condamnés à mort dans l'Eure et en Seine-Maritime - François Firoteau - troisième partie


Troisième condamné, un nommé François Firoteau

Troisième partie

 

 

Après cette errance professionnelle, François Firoteau décida de signer un engagement dans l’armée pour une période de cinq années.

 

 

Jusqu’à présent, François Firoteau ne s’en était pas trop mal sorti, mais un petit, tout petit, dérapage changea le cours de sa vie.

 

Trois timbres.

Trois timbres-poste........

 

François Firoteau vola trois timbres-poste !

Et pour cela, il fut condamné à trois années d’emprisonnement dans un pénitencier militaire en Afrique.

Trois années pour trois timbres !

Une année par timbre !

C’était terriblement cher payé !

 

Revenu à la vie civile avec sur les épaules une condamnation pour vol, les portes se fermaient lorsque François Firoteau cherchait de l’embauche.

Il avait pourtant payé sa dette par trois ans de pénitencier et personne ne voulait lui tendre la main pour l’aider à repartir.

 

Des années de galère qui le renvoyaient régulièrement sous les barreaux.

Jusqu’à cette incarcération à la Maison Centrale de Beaulieu où, pendant son séjour, Firoteau fit la connaissance d’un autre détenu, Raoul Robert Vatinel.

 

Raoul Robert Vatinel, un jeune homme de vingt-quatre ans, ayant déjà un lourd passé.

Sa carrière de délinquant commença alors qu’il n’avait pas encore quinze ans.

·         Novembre 1881 : première peine d’emprisonnement de dix jours pour vol.

·         1883 : quatre mois de prison.

·         Fin 1883 – début 1884 : Incarcération de six mois.

·         A partir d’octobre 1884 : condamnation de cinq ans d’emprisonnement.

·         Novembre 1990 : un mois à purger à la prison de Beaulieu.

Toutes ces peines pour un seul motif, le vol, sauf la dernière dont le motif était « vagabondage et outrage à agent ».

Une forte tête, ce Raoul Robert.

 

 

Tous deux discutaient en attendant leur sortie. Il leur fallait trouver le moyen de gagner « honnêtement » leur vie.

Ils en avaient des idées, surtout François Firoteau.

« Il faudrait acheter une machine à battre. La location de cette machine dans les campagnes permettrait de gagner de l’argent.

-          Oui, avait répondu  Raoul Robert Vatinel, c’est une excellente idée sauf que .....

-          Sauf que quoi ? avait lancé Firoteau.

-          Qu’on a pas les ronds !!!

-          Oui, mais on pourrait les voler, les ronds.....

-          Volé et se retrouver en prison !!!

-          Une dernière fois, en faisant gaffe de ne pas se faire pincer. T’as une autre idée pour trouver de la tune ?

 

Vatinel n’avait pas l’idée de génie permettant de trouver rapidement de l’argent. Il n’avait pas non plus envie de se retrouver derrière les barreaux.

Il fallait, un gros coup... un seul.... un dernier.....

 

Un gros coup, ça, c’était certain.

Un gros coup qu’il ne fallait pas louper.

Quel malotru !

 


Un malotru ou une malotrue            

 

Un mot venant directement du latin populaire :

Male astrucus qui peut se traduire par : né sous une mauvaise étoile ou un mauvais astre.

 

Le mot malotru, fait son apparition dans notre langage vers 1175, sous la forme de malostruz.

 

Au cours du XIIIème siècle, son sens varie un peu, allant vers :

Personne défavorisée sur le plan physique et/ou moral. Ce sens est toujours  le même vers 1690.

 

De nos jours, ce terme est attribué à un individu balourd et grossier, sur le plan uniquement moral.

Ce mot évoque aussi une impolitesse grossière.

 

Un malotru une personne peu fréquentable !!!

 

Pour cette petite histoire autour d’un mot,

Je me suis aidée du

« Dictionnaire historique de la langue française » Le Robert

 

mercredi 12 octobre 2022

Qu’est-ce qu’un pleutre ?

 

Voilà un mot, découvert depuis bien longtemps, dans la merveilleuse pièce d’Edmond Rostand, Cyrano de Bergerac, acte I scène IV :


"Ballade du duel qu'en l'hôtel bourguignon Monsieur de Bergerac eut avec un bélître."

 

La voilà cette ballade pour mémoire, pour le plaisir, pour le panache .....

 

Je jette avec grâce mon feutre,

Je fais lentement l’abandon

Du grand manteau qui me calfeutre,

Et je tire mon espadon ;

Élégant comme Céladon,

Agile comme Scaramouche,

Je vous préviens, cher Myrmidon,

Qu’à la fin de l’envoi, je touche !

 

Vous auriez bien dû rester neutre ;

Où vais-je vous larder, dindon ?…

Dans le flanc, sous votre maheutre ?…

Au cœur, sous votre bleu cordon ?…

Les coquilles tintent, ding-don !

Ma pointe voltige : une mouche !

Décidément… c’est au bedon,

Qu’à la fin de l’envoi, je touche.

Il me manque une rime en eutre…

Vous rompez, plus blanc qu’amidon ?

C’est pour me fournir le mot pleutre !

Tac ! je pare la pointe dont vous espériez me faire don,

J’ouvre la ligne, – je la bouche…

Tiens bien ta broche, Laridon !

À la fin de l’envoi, je touche.

 

Prince, demande à Dieu pardon!

Je quarte du pied, j'escarmouche,

Je coupe, je feinte...

Hé! Là donc!

 

A la fin de l'envoi, je touche.

 

Rien à dire, simplement applaudir !!

 

Mais d’où vient le mot pleutre ?

 

Nom masculin, mais aussi utilisé comme adjectif, il apparut vers 1750, emprunté à un mot flamand, pleute, désignant une chose sans valeur, un chiffon, puis par la suite, un coquin, un vaurien.

 

Le mot, devenu pleutre, fut attribué à un lâche, un rustre, un poltron.

 

En 1851, il qualifia également un homme avare. Cet emploi a totalement disparu.

 

Jules Vallès, en 1879, utilise le mot pleutrerie. Synonymes de pleutrerie : bassesse – couardise - indignité – lâcheté – veulerie – vilenie ....

Au début du XXème siècle l’adverbe pleutrement fait son apparition, mais uniquement avec le sens de lâche.

 

Pour cette petite histoire autour d’un mot,

Je me suis aidée du

« Dictionnaire historique de la langue française » Le Robert

 

Les derniers condamnés à mort dans l'Eure et en Seine-Maritime - François Firoteau - deuxième partie

 


Troisième condamné, un nommé François Firoteau

Deuxième partie

 

 

Retour à l’hospice où il resta une quinzaine de jours.....

 




François Firoteau fut placé, ensuite, à la ferme de l’Hôtel-Dieu, appartenant à l’hospice d’Evreux. Cette ferme se situait sur la commune des Ventes. Elle était tenue par un fermier du nom de Dumont, secondé par son épouse.

François venait de prendre quatorze ans.

Monsieur et Madame Dumont étaient des personnes charmantes et, pendant une année, François crut avoir enfin trouvé une vraie famille.

 

Nouvelle place, chez un cultivateur habitant Mantelon. Un certain Menny.

François fut accueilli comme second charretier. Mais, dans la place, il y avait un garçon de son âge, Léon Menny qui lui était premier charretier. Rivalités. Querelles. Bagarres.

Au bout de douze mois, François dut faire son balluchon.

 

Retour à l’hospice....... Mais là, quelque temps plus tard, ce fut le jeune Firoteau qui partit de lui-même.

Il retourna à la ferme des Dumont.

N’avait-il pas été bien traité dans ce lieu ?

Lorsqu’il arriva, il fut très bien accueilli, mais, un jeune garçon, Jean, était en place.

Comment faire déguerpir ce rival avec adresse, afin de prendre sa place.

Il y réussit par quelques magouilles et Jean fut renvoyé aussitôt.

Firoteau resta à la ferme de l’Hôtel-Dieu pendant huit mois.

 

Retour à Evreux, à l’hospice, pour quelques jours.

Puis, direction la Croix-Saint-Leuffroy, chez le père de Monsieur Lecoeur où il avait passé plus de deux années. Chez ce nouvel employeur, il resta trois mois, comme domestique.

 

De nouveau l’hospice où l’on commençait à se lasser de son instabilité.

 

François eut ensuite, encore, divers employeurs.

Chez monsieur Amiot, Firoteau fut second charretier, pendant une année.

Il fit ensuite un apprentissage de conducteur de chevaux, chez un meunier à Averville près de Grisolles qui se nommait Ginesseux.

Puis, suite à cet apprentissage, François trouva de l’embauche chez Monsieur Cail à Navarre-Evreux. Il resta dans cette place dix-sept mois.

 

Retour à l’hospice où il lui fut proposé une place comme infirmier.

 

Après cette errance professionnelle, François Firoteau décida de signer un engagement dans l’armée pour une période de cinq années.

 

 

mercredi 5 octobre 2022

S'ébaudir.... ou s'éclater !!

 

Ebaudir

 

Mais ne disait-on pas s’esbaldir vers 1080, puis ensuite s’esbaudir ?

Ce verbe prend sa racine dans l’ancien adjectif français, bald – balt – baud, qui signifiait, joyeux.

 

·         Esbaudir – ébaudir : mettre en allégresse

Ce verbe peut se conjuguer à la forme pronominale :

  • ·         S’esbaudir – s’ébaudir : se réjouir – s’égayer.

 


Un mot qui n’engendre pas la mélancolie et qui donne aussi :

  • ·         Un esbaudissement (1200)
  • ·         Un ébaudissement (1762)

 

Un mot joyeux qui malheureusement n’est plus utilisé de nos jours.

Est-ce en raison de la nostalgie face à la morosité ambiante ?

 

Non, pas vraiment. Les mots vont et viennent au fil des ans.

Peut-être réapparaîtra-t-il...... un jour.

En attendant et comme disait Jean-Sébastien Bach : Que la joie demeure !!

 

Alors, soyons fous, allons nous esbaudir dans les prés comme de jeunes poulains....

 


Pour cette petite histoire autour d’un mot,

Je me suis aidée du

« Dictionnaire historique de la langue française » Le Robert

Les derniers condamnés à mort dans l'Eure et en Seine-Maritime - François Firoteau - première partie

 


Troisième condamné, un nommé François Firoteau


Première partie

 

 



Ce fut le 4 octobre 1850.

En déposant son bébé au tourniquet de l’hospice d’Evreux, la jeune femme venait de sceller le destin du nouveau-né.

Ce n’était pas sûrement de gaieté de cœur.

C’était assurément pour que l’enfant mange à sa faim.

Elle avait de bonnes raisons cette maman, la vie difficile en était la première.

 

Lorsqu’il fut recueilli à l’aube, par Cécile Frédéric, sœur hospitalière, concierge de l’hospice, le nourrisson, vêtu d’une brassière en cotonnade rouge, d’un bonnet de la même marchandise garni de dentelle noire et enveloppé d’un linge de mauvais tissu, semblait de toute évidence né du jour ou de la veille[1]. Alors sur le registre de l’Etat civil, il fut noté : « Enfant de sexe masculin, né le 4 octobre 1850. » Et il fut attribué les nom et prénom de François Firoteau.

 

François Firoteau fit alors partie de cette horde d’enfants livrés aux bons soins de l’hospice, sans affection, avec le minimum de nourriture et d’attention.

Pendant les premières années, il était enseigné à ces petits le catéchisme. Ne sachant pas de quels ventres ils venaient, il fallait leur inculquer la morale et le droit chemin. Chaque déviation aux règles était punie sévèrement : châtiments corporels et privation de nourriture. De quoi endurcir le caractère le plus docile !

Bien évidemment, comme il fallait mériter la nourriture qui était généreusement donnée, de petites tâches étaient demandées aux pensionnaires, en fonction de leur âge, jusqu’à ce qu’ils soient placés dans une ferme ou chez un artisan.

 

François Firoteau apprit ses prières, s’appliqua négligemment aux leçons de catéchisme – il le fallait bien si il voulait manger – et, vers ses onze ans, fut placé dans une ferme, celle d’un nommé William Lecoeur, à Cailly. 

Domestique de ferme, il avait en charge douze bêtes à cornes.

Une journée qui commençait à 4 heures du matin, avec la première traite. Puis venait le nettoyage de l’écurie. Ensuite, le jeune François menait les vaches au champ. A 11 heures, de retour à la ferme, il effectuait diverses tâches avant le repas de midi, suivi du lavage de la vaisselle.

L’après-midi, il le passait au champ, puis ensuite de nouveau la traite avant le repas du soir......

 

Il y avait dans cette ferme une servante prénommée Hortense originaire d’Emanville. Une bien méchante femme qui avait pris en grippe le jeune commis de ferme, lui assénant régulièrement des volées de claques.

François s’en plaint au charretier, un homme bon et sensible. Honoré, c’était son nom, demeurait à Evreux rue Saint-Sauveur.

« Faut point t’ laisser faire, lui avait-il conseillé. C’est une mauvaise femme qui a que de la rancœur. Elle a même abandonné deux enfants. »

Une femme qui, comme sa mère, avait abandonné ses petits !!!

Le jeune garçon avait aussi appris que cette femme fricotait  avec le patron pendant que la patronne dormait paisiblement. Le jeune garçon fit tout pour que ces secrètes retrouvailles arrivent aux oreilles de Madame Lecoeur.

Grâce à cela, il eut quelque temps de tranquillité.

 

Mais le patron le renvoya, sans doute en raison des désagréments que lui avaient causés sa dénonciation......

Voilà ce que c’est que de se mêler d’affaires un peu scabreuses !

 

Retour à l’hospice où il resta une quinzaine de jours.....

 



[1] Ainsi noté sur le registre.