lundi 4 décembre 2017

Une étrange maladie

Une étrange maladie


Il naquit un jour d’orage et de pluies diluviennes, dans une toute petite case d’un village de savane.
Les enfants aussitôt leur venue au monde poussent toujours des cris, de satisfaction ou de mécontentement, qui le sait en réalité !
Mais, lui, resta silencieux, les yeux grands ouverts, d’une étrange fixité. Il semblait attendre….. Mais attendre quoi ?
Tous s’étaient penchés au-dessus de lui, interloqués, inquiets de ne pas l’entendre se manifester.
Quand soudain, le nourrisson, le visage grimaçant commença à se tortiller, et …….. sortit de sa gorge un son en deux temps, sorte de gargouillis, qui souleva son thorax et se poursuivit, régulier, comme le rythme des tamtams.

« Mais il a le hoquet ! s’écria sa maman qui, aussitôt, s’empara du bébé pour essayer d’arrêter ce  désagréable trouble. Mais, rien n’y fit. Le nouveau-né hoquetait même en tétant.

Lorsqu’un petit venait au monde, dans la vaste Afrique, son prénom lui était attribué par le sorcier du village qui réfléchissait parfois plusieurs jours avant de prendre une décision. Il s’agissait de ne pas se tromper. Un prénom se portait toute une vie et devait symboliser le caractère de celui qui le porterait.

Le sorcier, pourtant, ce jour-là, après avoir examiné le beau petit garçon, potelé à souhait, n’eut aucune hésitation. Ecoutant attentivement les sons que produisait le petit corps, bruit continu et régulier, il ne trouva qu’un seul prénom. 
« Il s’appellera Zouglou ! déclara-t-il solennellement.
-          Zouglou ! s’exclamèrent en chœur les parents. Mais, ce prénom ne risque-t-il pas d’attirer encore plus la curiosité des autres sur le mal dont il est atteint ?

Mais le sorcier fut intraitable. Comment osait-on contester sa parole qui était sacrée ?

« N’y-a-t-il pas un remède contre ce hoquet ? demanda timidement la maman.
-          Je connais ce phénomène, déclara le sorcier toujours solennel, mais il est vrai que celui-ci ne durait jamais bien longtemps. Il faut donc attendre, en grandissant, peut-être……..

Les parents s’en retournèrent donc avec leur petit Zouglou qui zougloutait sur un rythme monotone et régulier, mais hélas perpétuel.


Attendre, il fallait attendre ! Mais combien de temps encore ?
Le zougloutage du bébé, n’avait pas l’air d’empêcher le petit Zouglou de dormir, par contre, ses parents ne pouvaient fermer l’œil de la nuit, et cela nuit après nuit.
Vous imaginez, le zouglou de Zouglou résonnait encore plus fort, dans le silence nocturne !
Alors, même avec beaucoup de patience, cela devenait agaçant.

Mais il n’y avait pas que cela. Comment voulez-vous que Zouglou puisse apprendre à parler ?
Lorsqu’il prononça ses premiers mots, ceux-ci étaient entrecoupés par l’horrible bruit.
Prenons un exemple :
Un enfant non atteint de  ce mal disait : « Maman, je veux jouer. »
Pour Zouglou, cela donnait : « Ma – zou - man – glou – je – zou – veux -  glou – jou – zou  - er – glou. »

La moindre petite phrase prenait un temps infini, et comme personne ne comprenait le petit garçon, on lui faisait répéter !!!
Insupportable !

Il fallait faire quelque chose et rapidement !

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Il y avait à l’hôpital de la grande ville un médecin, spécialiste fort réputé. Assurément, il aurait une solution.
Maman emmena donc son petit Zouglou zougloutant qui zouglouta tout au long du chemin.

Pour une fois, ce « Zou – glou » eut un effet bénéfique, car il rythma la marche de maman qui fit le parcours deux fois plus vite.

Dans l’escalier du grand hôpital, le zouglou du bambin prit une résonnance telle que les malades patientant dans la salle d’attente prirent peur et s’enfuirent, pensant qu’une bête de la brousse s’était introduite dans l’hôpital. Le grand spécialiste, lui-même, prit ses jambes à son cou……
N’allaient-ils pas, tous, se faire dévorer ?

La maman et le petit Zouglou revinrent tous deux au village, maman sanglotant et Zouglou zougloutant, sans plus d’espoir qu’à l’aller.
En chemin, le soleil tapait très fort. A l’ombre des branches d’un baobab, la maman s’assit afin de prendre un peu de repos.
Elle était désespérée ! Aussi se remit-elle à sangloter.

Zouglou, lui, poursuivait, imperturbable, son zougloutage qui lui était naturel.

Ce fut à ce moment, que la pauvre mère sentit un léger souffle. Un souffle chaud, mais qui la fit frissonner.

Etrange !

Le souffle se fit de plus en plus fort, de plus en plus chaud et faisait de plus en plus frissonner la jeune mère qui, frigorifiée, finit par grelotter
Grelotter de froid sous un soleil de plomb !
Etrange, certes, mais surtout inquiétant, très inquiétant. Non ?

La maladie de Zouglou n’était-elle pas contagieuse ? Aussi, la jeune femme pensa qu’elle avait de la fièvre et s’attendit à être prise de zougloutage.

Soudain, le baobab agita ses branches. Quelques feuilles tombèrent.
Une voix s’éleva douce, tendre, tel un murmure, un murmure apaisant.

« Ne pleure pas ! disait la voix. Ne pleure pas ! Ton petit guérira, mais il te faut encore un peu de patience...... »

Interdite, la maman pensa que son imagination lui jouait des tours, à moins que ce ne fut la faim qui commençait à la tenailler ou es oreilles qui sifflaient...... ou encore, la fièvre qui la faisait délirer.

Mais la voix reprit :

« Ne pleure pas ! Ne pleure pas ! Ton petit guérira, mais il te faut encore un peu de patience...... »

Alors, dominant sa peur, elle demanda :
« Qui me parle ?
-          Je suis l’esprit du baobab. Ne crains rien, je ne te veux pas de mal. Ton chagrin m’a ému et je veux te venir en aide.
-          Que dois-je faire pour que mon petit guérisse.
-          Rien, je viens de te le dire...... rien...... patiente, et tout rentrera dans l’ordre......
-          Patienter, mais combien de temps ?
-          Un temps..... mais ne crains rien, l’esprit du baobab veille sur Zouglou..... ton petit guérira et aura un destin fabuleux......
-          Un destin fabuleux ? s’étonna la pauvre femme incrédule.
-          Ne pose pas de question, fais confiance aux esprits....... Patiente .......

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Patienter... Patienter, toujours et encore patienter !

Et pendant ce temps, Zouglou grandissait en zougloutant..... toujours autant !


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Dans la cour de récréation de l’école, Zouglou était la cible de toutes les moqueries. Tous imitaient le zouglou de Zouglou.
Imaginez un peu....  On se serait cru dans une basse-cour emplie de dindons..... « zou ou  zou ou zou ou glou - zou ou  zou ou zou ou glou - zou ou  zou ou zou ou glou - zou ou  zou ou zou ou glou - ...... »

Il y avait une petite fille qui recevait, également, tous les lazzis de ses camarades. Myope comme une taupe, elle portait sur le petit bout de son nez une paire de lunettes qui lui faisait des yeux de hibou. Aussi, les autres enfants l’avaient affublée du surnom de « Hou – Hou » !

Zouglou et Hou-Hou, cibles de leurs camarades, finirent, en raison de leur différence, par devenir les meilleurs amis du monde.

Un matin, Hou-Hou, afin de surprendre son ami, s’approcha de lui sans bruit, et lança, sonore et joyeux, un retentissant « Coucou ! ».

Zouglou sursauta, puis s’immobilisa. Interdit, retenant son souffle, les yeux agrandis, tout ronds et fixes, il semblait observer ce qui venait de se produire au fond de lui.

Que se passait-il ?
Et bien, rien, justement, et c’était bien ce qui était étrange !
Zouglou ne zougloutait plus !

Et grâce à qui ? Au « coucou » de Hou-Hou !

L’esprit du baobab avait eu raison de recommander la patience. Zouglou était guéri !

Quant au destin fabuleux destin prédit par l’esprit du baobab, il fallait encore avoir un peu de patience pour découvrir en quoi il consistait !

      

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