mercredi 16 avril 2025

Vous arrive-t-il d’être fourbu (e – us – ues) ?

 

Fourbu est un adjectif, participe passé du verbe fourboire (1400).

Que signifie fourboire ?

Boire fortement : boire avec excès et de là : se fatiguer de trop boire.

Il faut préciser que celui (ou celle) qui boit trop.... et surtout de l'alcool... risque d'avoir un bon mal de tête, ce qui fatigue énormément.

 

Fourbu qualifie une personne très fatiguée (1546). En cette année 1546, Rabelais utilisa ce terme dans ses écrits.

L’adjectif fourbu s’attribue également à un cheval atteint d’une inflammation des tissus du pied (1563).

Cette inflammation prit également le nom de fourbure (nom féminin - 1611).

 

Un article bien court qui ne m’a pas trop fatiguée. Je ne suis donc pas fourbue !


Pour cette petite histoire autour d’un mot,

Je me suis aidée du

                   « Dictionnaire historique de la langue française » Le Robert


Louviers 1591 – une histoire rocambolesque – chapitre 5

 

   

Le calme revint sur Louviers.

Françoise Fontaine demeura encore un temps dans la ville des drapiers, avant d’aller vivre à Rouen où elle trouva à se placer comme servante.

Ce fut dans une rue de Rouen qu’elle rencontra, par hasard, le prévôt. Elle alla vers lui avec un large sourire afin de le saluer. Lui, ne la reconnaissant pas se demanda ce que lui voulait cette femme.

Alors Françoise Fontaine lui dit :

 

« Mais je suis cette pauvre femme à qui vous avez sauvé la vie à Louviers. Maintenant, je suis mariée avec un tailleur d’habits et nous vivons grâce à Dieu en tout bien et honneur. »

À cela, le prévôt lui répondit :

«  Mon amie, Dieu vous fasse la grâce de vivre en femme de bien et priez Dieu qu’il vous assiste. »

 

-=-=-=-=-

 

Il y eut de nombreux cas semblables à celui de Françoise Fontaine.

Comment expliquer ces manifestations ?

 Reprenons les constats et explications de Palma Cayet (Pierre-Victor), né à Montrichard (Touraine) en 1525, mort en 1610. Disciple de Ramus. Protestant. Prédicateur de Catherine de Bourbon. Qui se convertit au catholicisme en 1595. En 1596, il enseigna l’hébreu au collège de Navarre.

 

Concernant notamment le cas de Françoise Fontaine, il écrivit :

         La scène de la nuit du 16 août : Hallucinations, impulsions, elle jette tout par les fenêtres. Le                 
démon lui parle, lui impose certains actes.

Françoise Fontaine présente des attaques de grande hystérie : couchée sur le dos, les bras en croix  ou bien rejetée en arrière. Les assistants ont pu croire par moments qu’elle était soulevée de terre, alors qu’elle se tenait sans doute sur la pointe des pieds. Elle a de la rigidité cataleptique.

 

Parfois Ie corps reposant sur la tête et sur les pieds, le tronc en cercle, Ia poitrine paraît gonflée et la malade semble suspendue horizontalement, au-dessus du sol. Les yeux sont relevés en haut. À côté de ces attaques, elle a des crises convulsives avec délire hallucinatoire, pendant lesquelles l’intelligence n’est pas abolie.

 

Concernant les poils et les cheveux :

De tout temps, ils étaient considérés comme impurs. Ils jouèrent souvent un grand rôle dans les histoires de possédées. Le diable s’y logeait, disait-on. Voilà pourquoi, les différentes religions ordonnaient à leurs prêtres de se raser.

 

Françoise Fontaine ne fut pas brûlée, comme de nombreuses autres pauvres femmes atteintes des mêmes manifestations. Une réelle chance !

 

 

 

À lire :

Sorciers, sorcières et possédés en Normandie

Procès en sorcellerie du Moyen Age au XVIIIe siècle

D’Yves Lecouturier

Éditions Ouest-France.

 

vendredi 11 avril 2025

Louviers 1591 – une histoire rocambolesque – chapitre 4

 


Le 2 septembre, Françoise Fontaine fut sortie de sa cellule afin d’entendre la messe dans l’église Notre-Dame de Louviers. Elle était sereine. Au moment de la communion lorsque le prêtre présenta l’hostie sacrée, une ombre obscurcit les vitraux du lieu saint, un des losanges du vitrail proche de l’autel vola en éclats, un souffle éteignit tous les cierges.

Un murmure de stupéfaction et quelques cris parcoururent alors l’assemblée des fidèles qui virent tout à coup se soulever de terre, Françoise qui peu de temps avant, agenouillée devant le prêtre, attendait de recevoir la communion. Six personnes de forte stature se cramponnaient à elle, afin de la ramener sur le sol.

Ce fut à ce moment que certains paroissiens pris de terreur se sauvèrent en se bousculant. Certains autres agenouillés sur les pavés de l’église priaient avec une ferveur redoublée.

 

Le curé aspergeait abondamment d’eau bénie les personnes proches en psalmodiant des prières dont lui seul connaissait les paroles.

Un grand moment de panique.

 

Le lendemain, Françoise Fontaine subit un nouvel exorcisme. Étaient présents à ce rituel religieux d’une extrême délicatesse, le curé Belet, bien évidemment, le médecin du Roussel, un barbier et un apothicaire ayant leur échoppe à Louviers et également le prévôt. L’envoûtée réagit violemment, se tordant de convulsions, se retrouvant en lévitation tête en bas, pieds en l’air.

Le démon qui la tourmentait ne voulait pas lâcher sa proie. Que fallait-il faire ?

 

« Les cheveux ! s’exclama le prévôt. Ne dit-on pas que les maléfices s’accrochent aux cheveux et aux poils du corps ? Il faut raser cette femme et tout envoûtement disparaîtra ! »

 

À ces mots, Françoise ne sourcilla nullement. Elle se laissa raser la tête calmement. Par contre,  lorsqu’il fut question de raser tous les poils de son corps, ceux de ses aisselles et ceux de ses parties intimes, dites honteuses, elle se redressa, assurant avec aplomb :

« Je me sens beaucoup mieux..... comme libérée. Le démon a quitté mon corps ! »

Et aussitôt, les traits du visage de la jeune femme se détendirent et, en effet, elle semblait être au meilleur de sa forme.

Mais, le démon appelé « malin » pouvait encore jouer un tour à sa façon et réintégrer l’enveloppe charnelle de la femme Fontaine dans les jours suivant. Afin de s’assurer que tout était rentré dans l’ordre, la possédée-exorcisée fut mise en observation dans une chapelle, sous bonne garde : un prêtre, sans doute muni d’un rasoir, et quelques gens d’armes prêts à intervenir.

Le prévôt, toutefois, demeurait perplexe, convaincu que Françoise Fontaine avait simulé.

Mais pourquoi toute cette mise en scène ?

 

En ce mois de septembre 1591, la justice classa l’affaire, et les cloches de l’église Notre-Dame n’avaient jamais résonné aussi joyeusement après l’office au cours duquel Françoise Fontaine, enfin délivrée du démon, avait communié.

mercredi 9 avril 2025

Franquette !

 


Franquette
est un nom féminin employé encore de nos jours, mais uniquement dans la locution : « à la bonne franquette », locution apparue vers 1741.

Au XVIIème siècle, franquette était employée pour franchement.

Aujourd’hui, il signifie « sans cérémonie – sans façon ».

 

À la bonne franquette pourrait être rapproché de à la fortune du pot.

La fortune du pot : ce qui reste dans le « pot », dans le chaudron, sans façon également.

 

Encore une locution : Faire des chichis (faire du chichi) ou ne pas faire de chichis ! Les chichis étant des « manières ».....

Le mot chichi est rapidement passé dans le domaine de la coquetterie.

  • ·         Chez le coiffeur : boucles de cheveux postiches
  • ·         Chez la couturière : fanfreluches en tout genre !

 

Petite conversation entre deux personnes :

- Dans ce jardin, nous allons manger à la bonne franquette !

- Manger à la fortune du pot, alors ! Mais dans ce lieu, je crains de froisser les chichis de ma robe. Et puis, il y a du vent, les chichis de mes cheveux vont s'envoler !

- Mais arrêtez donc de faire autant de chichis !!

 

Pour cette petite histoire autour d’un mot,

Je me suis aidée du

                   « Dictionnaire historique de la langue française » Le Robert

mercredi 2 avril 2025

La pommade

 



Mot constaté dans notre langage depuis 1539, provenant de l’italien pomada : crème utilisée pour les soins de la peau.

Mot dérivé de pomo : fruit et pomme.

Les anciennes pommades étaient parfumées avec de la pulpe de pomme d’api.


  Pomme d'api : variété de pomme de petite taille de forme légèrement aplatie, dont un côté est rouge vif.    

Pommade : préparation onctueuse composée d’un corps gras et d’essence parfumée. Onguent médicinal (1611).

Les pommades n’ont pas toutes la même composition en fonction de la pathologie à soigner.

 


Quelques locutions :

  • ·         Coup de pommade ou jeter de la pommade (1878) : flatter – amadouer. Locution abandonnée au profit de ....

o   Passer de la pommade à quelqu’un (1893).

  • ·         Pommader (1581)          : enduire de pommader.
  • ·         Un pommadin                : garçon coiffeur (1859)  puis                                                        élégant ridicule (1872).
  • ·         Se pommader (1888)    : argot s’enivrer.
  • ·         Un pommadier (1878)  : coiffeur.
  • ·         Un pommadier (1903)  : mortier de pharmacien. 


Le pommadin après avoir, dans un pommadier, préparer une pommade, pommada un client tout en lui passant de la pommade.

Avec tout cet étalage de pommade, attention aux glissades !!!

Pour cette petite histoire autour d’un mot,

Je me suis aidée du

                   « Dictionnaire historique de la langue française » Le Robert

 

Louviers 1591 – une histoire rocambolesque – chapitre 3

 

 La geôle !


C’était une grande salle commune, avec de la paille sur le sol et un seau dans un coin.

Ce pouvait être aussi un petit espace individuel, avec une petite ouverture munie de barreaux et sans vitre, aux murs sales, au sol recouvert de paille changée peu souvent, sauf si le prisonnier payait pour avoir de la paille fraîche au moins tous les cinq jours. Un seau pour les besoins, vidé normalement tous les jours. Normalement !! Dans ce réduit, une forte odeur d’urine, d’excréments, d’humidité. Un lieu glacial en hiver, étouffant en été.

 

Le soleil d’août dardait ses rayons et malgré la chaleur suffocante, Françoise Fontaine hurlait, tapait du pied et des poings sur la porte et cela nuit et jour. Tout ce tapage résonnait dans les couloirs et empêchait les autres prisonniers de dormir. Ceux-ci d’ailleurs se révoltèrent. Le gardien lui-même menaça de démissionner. Il n’arrivait pas à maintenir l’ordre dans la prison.

Quant au prévôt, il était parti en service du roi et ne devait revenir qu’à la fin du mois d’août.

Aussitôt revenu, il fut averti des troubles provoqués par la prisonnière Fontaine.

Il ne fallait donc pas perdre de temps et régler cette affaire au plus vite afin que le calme revienne.

 

La jeune femme fut aussitôt sortie de prison et transportée au parquet, mais aussitôt arrivée, alors que l’interrogatoire venait de commencer, il se produisit des phénomènes des plus étranges.

Françoise Fontaine tomba sur le sol à plat dos, les bras étendus, la gorge enflée, les yeux exorbités. Puis son corps fut comme traîné en tous sens, balayant le sol, avant de s’élever à deux pieds de hauteur.

Le prévôt effrayé sortit de la salle du parquet et referma précipitamment la porte sur laquelle des coups violents étaient portés.

 

On alla quérir d’urgence le curé de Louviers (M. Belet), un médecin (L. du Roussel) qui était de confession protestante, un apothicaire et un barbier.

Ce fut donc en force que tout ce petit monde pénétra dans la salle d’audience.

 

Devant l’état de la femme, le médecin du Roussel diagnostiqua : « assurément, elle est possédée du malin esprit ».

 

L’apothicaire suggéra : « pour empêcher le sorcier de mal faire, il faut le battre avec un balai neuf de bois de bouleau. »

On frappa alors la prisonnière par-dessus ses vêtements et elle revint à elle, mais à la première question formulée, une nouvelle crise la prenait.

Le remède manquait d’efficacité durable.

 

Le curé Belet essaya l’exorcisme, commençant celui-ci  par une aspersion d’eau bénie. L’effet fut immédiat, la possédée revint à elle, disant : « Je suis lasse. »

Elle semblait n’avoir aucun souvenir de ce qui venait de se passer.

Le curé lui montra alors un crucifix. Aucune réaction, si ce ne fut qu’un léger soupir.

 

Le calme était-il enfin revenu ?

L’eau bénie et le crucifix avaient-ils effrayé le démon au point de l’expulser du corps de Françoise Fontaine ?

C’en était assez pour aujourd’hui, demain serait un autre jour et les interrogatoires reprendraient.

 

De retour dans sa geôle, la prisonnière s’endormit aussitôt, rompue de fatigue.

mercredi 26 mars 2025

Louviers 1591 – une histoire rocambolesque – chapitre 2

 


Les deux femmes, penchées par la fenêtre, regardaient, tour à tour, les objets éparpillés au sol, brisés sur la chaussée au pied de la maison et les personnes rassemblées la tête levée vers elles, l’air interrogateur.

Un moment de calme qui sembla durer des heures avant qu’elles n’osent le rompre en criant : « À l’aide ! Un esprit maléfique s’est emparé de la maison !».

Il n’en fallut pas plus pour que les forces de l’ordre dispersent les badauds, leur intimant l’ordre de rentrer chez eux au plus vite. Ce qu’ils firent rondement devant la menace démoniaque.

 

Diacre et quelques-uns de ses hommes grimpèrent les deux étages et commandèrent aux deux femmes d’ouvrir la porte de leur logis sans tarder.

La pièce où vivaient les deux malheureuses se trouvait dans un désordre sans nom. Tout était sens dessus dessous. Mais aucune présence décelable d’un quelconque « mauvais esprit ».

Un planton fut laissé sur place et Diacre donna l’ordre d’aller dormir en attendant le lever du jour.

Si démon il y avait, il pouvait bien attendre quelques heures.

 

Le lendemain, dès potron-minet, débarquèrent dans les lieux Louis Morel, prévôt général de Louviers, suivi de Diacre qui n’avait pas fermé l’œil de la nuit. Dans la seule pièce, rien depuis la nuit n’avait bougé. Toujours le même désordre et deux femmes le regard perdu serrées l’une contre l’autre.

Louis Morel posa quelques questions sur le déroulement des événements.

 

« C’est vers minuit, expliqua la plus âgée, un esprit est passé par la cheminée.

        Un esprit, répéta le prévôt, vous pouvez préciser ?

        C’était comme un brandon de feu qui a tourné dans la pièce. Il poursuivait la Françoise, ma servante, et la frappait avec une hallebarde.

 

La plus jeune, nommée Françoise Fontaine, possédait en effet des marques de coups sur le visage. Confuse dans la narration des faits, celle-ci montrait aussi un comportement étrange qui n’échappa pas au prévôt.

« Pourquoi cet esprit poursuivait-il cette jeune femme ? se demanda-t-il. Prudence ! Tout cela sent le soufre et cette fille semble mener la dance ».

Il n’était pas question pour Louis Morel de faire un faux pas. Ne pas froisser le desservant de la commune, ni l’opinion publique était son credo, surtout dans les cas de suspicion de maléfices.

 

Voilà pourquoi, Françoise Fontaine fut mise sous les verrous et interrogée.

Le jeu des questions-réponses !

Des questions qui n’obtinrent pas toujours les mêmes réponses.

Il fut donc décidé de laisser mijoter la prisonnière au frais d’une cellule avant de reprendre les interrogatoires.

Une pitance

 



Ce mot est apparu vers 1120.

Deux origines possibles le concernant :

  • ·         Du français, pitié.
  • ·         Du latin médiéval, pietantia (nourriture donnée aux moines) :
  • Pietantia de pidantia (1124), mot dérivé du verbe pietare   (du latin pietas : piété – pitié).

 Piété-pitié : pitance, une nourriture donnée aux pauvres par pitié, par piété ?

 

Les deux origines se rejoignent un peu :

·         Pitance (1178) : portion de nourriture donnée à chacun dans les repas des communautés religieuses (essentiellement composée de pain).

Très rapidement, la pitance désigna la nourriture en général pour les Hommes, mais aussi pour nommer la ration de nourriture quotidienne des animaux. 


Les dérivés de pitance :

  • ·         Pitancer ou pitanchier (fin du XIIe siècle) - verbe transitif : boire, manger.

Ce verbe prit une connotation d’excès vers 1690, bien loin du repas monastique. Cette nuance a disparu.

  • ·         Un pitancier – nom masculin (1287) : moine chargé de l’achat des provisions de bouche.
  • ·         Une pitancerie (XIVe siècle) : dans un monastère, endroit où étaient entreposées les réserves de nourriture. Également, lieu où étaient pris les repas.

 

La pitancerie où le pitancier range les denrées alimentaires déborde de pitances.

 

Pour cette petite histoire autour d’un mot,

Je me suis aidée du

                   « Dictionnaire historique de la langue française » Le Robert

mercredi 19 mars 2025

Ripolinez-vous de temps à autre ?


Ripoliner : peindre avec de la peinture de marque Ripolin.

Les plus anciens d’entre nous se rappellent sûrement de l’affiche « Ripolin » placardée sur les murs des maisons en bordure de routes.

 

Mais connaissez-vous l’histoire de ce mot, Ripolin, qui a donné le verbe ripoliner 




Voilà... c’est une réelle aventure.

 

Un chimiste hollandais du nom de Carl Julius Ferdinand Riep[1], mit au point en 1888, une peinture à l’huile de lin vernissée ayant la propriété de sécher rapidement. Cette peinture prit le nom de Riepolin :

RIEP (nom de l’inventeur) – OLIN ( de OLIE - huile).

Une affaire qui devint rapidement productive et différentes usines furent implantées en France et en Angleterre.

 

Dix années plus tard, Carl Julius Ferdinand Riep lança un partenariat avec une maison française ayant pignon sur rue à Paris, vendant du matériel aux artistes et artisans. Cette maison bien connue portait de nom de « société parisienne Lefranc et Cie » (future maison Lefranc & Bourgeois)  qui  modifia un petit peu le nom en RIPOLIN.

L’usine près de Paris produisait en 1901, 450 litres de peinture par jour.

En octobre 1898, le chef-opérateur Félix Mesguich[2] de l’Agence nouvelle de publicité tourna le premier film publicitaire en montrant trois peintres dans une situation comique. Trois peintres ripolinant, bien évidemment.

Ce film publicitaire inspira l'affichiste Eugène Vavasseur[3] qui créa une affiche pour Ripolin (celle dont je parle en début de cet article) qui remporta un large succès.



Sur cette publicité, trois peintres en bâtiment, avec canotiers et amples blouses claires, se peignant le dos. Les trois peintres de l'affiche furent baptisés Riri, Polo et Lino.

Riri pour RI – Polo pour PO – Lino pour LIN. 

            Ce qui donne RI PO LIN !

Ingénieuse la publicité ! Même dans le plus petit détail.


Une unité de production fut installée à Issy-les-Moulineaux  - 21 – 31 quai d’Issy. Un bâtiment de trois étages où étaient fabriquées des encres d’imprimerie. 350 ouvriers et ouvrières y travaillaient.

Ce fut au premier étage du bâtiment, dans l’atelier « du mélange d’essences » que le 11 novembre 1904, un incendie se déclara provoquant une explosion. Les ouvrières et ouvriers œuvrant dans l’atelier furent rapidement entourés de flammes dans ce local dont les fenêtres étaient grillagées.

Article du journal l’Humanité parlant de l’événement

L'Humanité du 12 novembre apporte d'autres détails sur la catastrophe : " Il était exactement quatre heures vingt. Dans un vaste alambic, des préparateurs traitaient de l’éther et de l'essence de térébenthine. Une énorme colonne de feu envahit toute la pièce, puis une formidable explosion se fit entendre. Sous la poussée formidable des gaz enflammés, une grande partie de la façade s'écroula avec un bruit terrifiant. Affolés, les ouvriers et ouvrières, au nombre de quarante-huit, occupés dans le bâtiment, tentèrent de fuir. Mais déjà, les flammes barraient la route. Tous se ruèrent vers les locaux prenant jour sur le quai. De fortes barres de fer, scellées dans le mur, empêchaient toute fuite de ce côté. Ce fut alors une explosion de cris de rage et d'impuissance, immédiatement suivis de hurlements de douleur. "


"Les hommes en tête, toutes les victimes que les flammes avaient chassées s'étaient élancées dans le brasier, dans le dessein de gagner la cour. Atrocement brûlés par les flammes, aveuglés par la fumée, butant à chaque pas, les malheureux atteignirent enfin le quai. Dans un galop furieux, bousculant tout sur leur passage, ils fuirent éperdument, dans toutes les directions. Derrière ce groupe, apparut une femme, dont les vêtements flambaient. Un pompier la saisit au passage, l'enveloppa dans une couverture et la porta aux ambulances qui arrivaient au même instant.

"Puis, de la grille d'entrée, cachée par instant par la fumée, deux hommes surgirent. Leurs vêtements étaient également en feu. Ils traversèrent la chaussée en poussant des cris affreux, dévalèrent le contre-quai et allèrent se précipiter dans la Seine. MM. Gaudey, charbonnier, et Arthur, journalier, se jetèrent à leur suite dans le fleuve et les ramenèrent sur la berge. Une deuxième voiture d'ambulance les recueillit et les transporta à l'hôpital."

Les pompiers affluent de toute la banlieue parisienne, de Grenelle, d'Auteuil, de la Sainte-Chapelle. La foule des badauds aussi raconte le reporter :  "Par les gares de Mirabeau-Ceinture d'Issy et par les portes du Viaduc et de Versailles arrivaient continuellement de nouveaux curieux. Bientôt les quais, les contre-quais, les berges de la Seine et les rues avoisinantes regorgèrent de monde. Dans cette masse compacte de spectateurs, s'élevaient continuellement de nouveaux cris d'horreur et de pitié".

  
Au petit matin, treize victimes ont été recensées. Les pompiers continuent de fouiller les décombres, redoutant de retrouver des corps.
Après cette tragédie, l'usine Ripolin quitta Issy-les-Moulineaux.

 

Un petit aperçu, vraiment petit, de la vie de « Ripolin » qui appartient depuis 2011 à un grand groupe américain.

Maintenant, vous savez pourquoi vous RIPOLINER  et s’il existe le mot gribouillage, il existe aussi le mot RIPOLINAGE !!!



[1] Carl Julius Ferdinand Riep né à Küstrin (Oostenrijk) – décédé le 13 juillet 1898 à Hilversum (Pays-Bas) fils de Johann Riep et Charlotte Busse.

[2] Félix Mesguich, pionnier du cinéma, né le 15 septembre 1871 à Alger - décédé le 25 avril 1949 à Paris.

[3] Eugène Charles Paul Vavasseur né le 25 avril 1863 à Paris – décédé le 6 février 1949 à Clichy – affichiste, caricaturiste, graphiste  - pseudonymes : Merlet et Ripp.