Le 2 septembre, Françoise Fontaine fut sortie de sa cellule afin d’entendre la messe dans l’église Notre-Dame de Louviers. Elle était sereine. Au moment de la communion lorsque le prêtre présenta l’hostie sacrée, une ombre obscurcit les vitraux du lieu saint, un des losanges du vitrail proche de l’autel vola en éclats, un souffle éteignit tous les cierges.
Un murmure de stupéfaction et quelques cris parcoururent
alors l’assemblée des fidèles qui virent tout à coup se soulever de terre, Françoise
qui peu de temps avant, agenouillée devant le prêtre, attendait de recevoir la
communion. Six personnes de forte stature se cramponnaient à elle, afin de la ramener
sur le sol.
Ce fut à ce moment que certains paroissiens pris de
terreur se sauvèrent en se bousculant. Certains autres agenouillés sur les
pavés de l’église priaient avec une ferveur redoublée.
Le curé aspergeait abondamment d’eau bénie les
personnes proches en psalmodiant des prières dont lui seul connaissait les
paroles.
Un grand moment de panique.
Le lendemain, Françoise Fontaine subit un nouvel
exorcisme. Étaient présents à ce rituel religieux d’une extrême délicatesse, le
curé Belet, bien évidemment, le médecin du Roussel, un barbier et un
apothicaire ayant leur échoppe à Louviers et également le prévôt. L’envoûtée réagit
violemment, se tordant de convulsions, se retrouvant en lévitation tête en bas,
pieds en l’air.
Le démon qui la tourmentait ne voulait pas lâcher sa
proie. Que fallait-il faire ?
« Les cheveux ! s’exclama le prévôt. Ne
dit-on pas que les maléfices s’accrochent aux cheveux et aux poils du corps ?
Il faut raser cette femme et tout envoûtement disparaîtra ! »
À ces mots, Françoise ne sourcilla nullement. Elle
se laissa raser la tête calmement. Par contre,
lorsqu’il fut question de raser tous les poils de son corps, ceux de ses
aisselles et ceux de ses parties intimes, dites honteuses, elle se redressa,
assurant avec aplomb :
« Je me sens beaucoup mieux..... comme libérée.
Le démon a quitté mon corps ! »
Et aussitôt, les traits du visage de la jeune femme
se détendirent et, en effet, elle semblait être au meilleur de sa forme.
Mais, le démon appelé « malin » pouvait encore
jouer un tour à sa façon et réintégrer l’enveloppe charnelle de la femme
Fontaine dans les jours suivant. Afin de s’assurer que tout était rentré dans
l’ordre, la possédée-exorcisée fut mise en observation dans une chapelle, sous
bonne garde : un prêtre, sans doute muni d’un rasoir, et quelques gens
d’armes prêts à intervenir.
Le prévôt, toutefois, demeurait perplexe, convaincu
que Françoise Fontaine avait simulé.
Mais pourquoi toute cette mise en scène ?
En ce mois de septembre 1591, la justice classa
l’affaire, et les cloches de l’église Notre-Dame n’avaient jamais résonné aussi
joyeusement après l’office au cours duquel Françoise Fontaine, enfin délivrée
du démon, avait communié.
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