dimanche 6 décembre 2015

CHILDERIC, LE FANTOME - Chapitre 4



L’escalier qui conduisait au second étage, était en bois, plus modeste que celui qui prenait naissance dans le somptueux hall d’entrée.
A ce niveau du château, avaient été aménagées des chambres d’hôtes, plus simples celles-ci, mais très agréables avec un petit cabinet de toilette individuel. Ces chambres avaient abrité les préparatifs minutieux et le sommeil réparateur des invités, après les longues festivités où la danse avait enchanté les cœurs et meurtri les pieds.
L’activité domestique dans les couloirs était intense dans ces moments-là, pour répondre aux besoins de chacun.
Cet étage avait été l’endroit le plus fréquenté par Childéric. Il aimait y découvrir de nouveaux visages, de nouveaux parfums ainsi que de nouveaux secrets et confidences. Lorsque toutes les lumières s’étaient éteintes, il se faufilait de chambre en chambre et, à cet instant, il était le maître, fouinant, examinant et se faisant un malin plaisir à cacher, déplacer les objets ou réveillant les dormeurs d’un frôlement ou d’un murmure. Jamais il n’effraya ces pauvres dormeurs, son plaisir se bornant à quelques friponneries insignifiantes, des gamineries tout simplement.
Il aimait trop l’animation et la joie des fêtes, les cancans mondains, les dentelles des jupons, les parfums enivrants, les lumières des multiples bougies, les concerts de musiques de chambre et les représentations théâtrales pour faire fuir de frayeur les pauvres humains.

De plus en plus volubile dans la description de tous les détails, Childéric inondait de paroles le pauvre Archibald, multipliant les anecdotes croustillantes.

Pour accéder à l’étage supérieur, il fallait emprunter un tout petit escalier masqué derrière une porte au fond du couloir. Ce dernier étage était réservé à la valetaille.
Il était constitué de petites pièces mansardées, aménagées en chambrettes propres, mais sans aucun confort. Ici, pas de haute cheminée où l’hiver les flammes d’un bon feu réchauffaient l’atmosphère. Non, ici aucune source de chaleur. Il fallait vite se mettre au lit pour espérer trouver un peu de chaleur sous l’unique couverture. Mais, les longues et fatigantes journées de labeur aidaient à un endormissement rapide. Le sommeil accordé n’était pas bien long, et aucune grasse matinée n’était permise, même le dimanche matin.
Valets, soubrettes, femmes de chambre, cuisinières, maîtres d’hôtel étaient debout aux aurores et couchés bien après les occupants des lieux. Une longue vie de servitude, emplie de grognements, de mécontentements, de révoltes face aux exigences incessantes,  mais aussi de moments heureux et de fous rires devant les excentricités des maîtres et de leurs invités ou encore, devant les farces des enfants.
La vie ? Ils la prenaient comme elle venait, qu’elle soit bonne ou mauvaise.
Childéric déambulait souvent dans ce troisième étage, sous les combles, surveillant le sommeil réparateur du personnel, mais jamais il ne se serait permis le moindre bruit, la moindre farce. Il se sentait le gardien de ce repos.

Un instant perdu dans ses songes, Childéric se remémora, avec délice, quelques jolies servantes au sourire engageant, à la chevelure abondante aux reflets de feu et à la démarche ondulante qu’il aimait à voir passer dans les couloirs. Oui, Archibald avait raison, il y en avait pour qui il avait eu le béguin, en tout bien tout honneur, bien évidemment. N’était-il pas un fantôme ? Et un fantôme-gentleman, en plus !

Tout au fond du couloir, après cette enfilade de petites cellules presque monacales, se trouvait une grosse porte derrière laquelle se cachait un immense grenier, dernière demeure d’objets cassés devenus inutiles, de vieux tableaux tombés en disgrâce, de vieux vêtements usés ou démodés et tout un bric-à-brac innommable.

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