mercredi 13 mai 2020

HISTOIRE VRAIE - DES SIÈCLES D'EMPOISONNEUSES


LES  EMPOISONNEUSES
Affaire Lacoste -  Vergès






Chapitre 1
 
Euphémie[1] vit le jour le 20 décembre 1818 à Mazerolles, dans les Hautes-Pyrénées.
Son père se prénommait Bernard et avait trente-trois ans au jour de la déclaration de naissance. Sa mère était une demoiselle Marie Jeanne Lagleise.
Etre une fille, en ce début de siècle, n’avait rien d’enviable. Une fille se voyait souvent promise (voire monnayée) en mariage, contre son gré.
Et ce fut le cas pour la jeune Euphémie que ses parents avaient donnée à son grand-oncle qui était de quarante-six ans son aîné.
Ce fut donc une toute jeune femme de vingt-deux ans qui s’unit, le 23 mai 1841 à Mazerolle,  à un vieux monsieur de soixante-huit ans.

Quelle joyeuse perspective pour Euphémie qui n’eût, hélas, pas son mot à dire.

L’acte de mariage nous apprend ce qui suit :
Henry Lacoste, rentier, né à Riguepeu dans le Gers, le 8 juillet 1773, était veuf de Louise Doucet, décédée à Tarbes, le 25 avril 1838[2].
Il était le fils de Jean Sancerre Lacoste, décédé à Riguepeu le 21 septembre 1773 et de Elizabeth Tezan, décédée également à Riguepeu, le 20 décembre 1787.

Parmi les personnes présentes, les quatre témoins :
·         Marcel Duffard, âgé de trente-huit ans, cultivateur à Mazerolles.
·         Sébastien Vergez, trente-huit ans également, et cultivateur à Mazerolles.
·         Jean-Pierre Vergez, trente-et-un ans, sans autre précision.
·         Jacques Coussié, âgé de quarante-cinq ans, cordonnier de son état et exerçant dans la commune de Mazerolles.

Le couple vint s’installer à Riguepeu, dans la propriété appartenant au marié et où n’étaient reçues que les quelques connaissances de son époux.

Euphémie s’appliqua à être une bonne épouse, supportant les manies et écarts d’humeur du maître des lieux.
Une bonne épouse !!!
En fait, une servante corvéable à merci, nuit et jour, devant se plier aux caprices de celui  qu’elle venait d’épouser ; acceptant de vivre chichement alors qu’elle savait, Euphémie, que celui-ci avait une fortune considérable qu’il dépensait largement quand l’envie lui en prenait.
Elle savait aussi, Euphémie, qu’elle ne représentait pas grand-chose aux yeux de son mari.
N’était-elle pas uniquement un ventre se devant d’accueillir le futur héritier tant attendu par le sieur Lacoste ?
Car c’était bien là le principal but de cette union, car pour la gaudriole, le sieur Lacoste avait toujours eu recours à certaines de ses servantes ou à des jeunes filles peu farouches du village.
Ce n’était pas médisance, loin de là, chacun le savait, et il payait bien, assurait-on.

Il y avait eu, notamment, depuis l’arrivée de la nouvelle dame Lacoste, Marie Dupuy, servante, qui rejoignait son maître, certaines nuits, dans sa chambre ou l’inverse.....
Lorsque Euphémie apprit ce qui se passait sous son toit, elle renvoya la fille Dupuy avec perte et fracas.
Et également la très jeune  Jacquette Larrieu qui s’était vu proposer de l’argent pour servir de « ventre géniteur ». Ayant un fort caractère, elle avait refusé et était restée au service de Henry Lacoste.

Toutes ces frasques au grand jour, au su de l’épouse, qui elle n’avait pas le droit de sortir seule. Même pour se rendre à l’église, elle était accompagnée de sa servante.
Car, en plus, elle recevait les reproches incessants de son époux qui lui reprochait d’avoir quelques amants.....
Un couple bien mal assorti pour des tas de raisons et qui ne résidaient pas uniquement dans la différence d’âge !!
Un couple qui vivait mal cette union et s’en plaignait.
Lui, le mari, à ses amis Dupany et Lespère, auxquels il avait exprimé, en avril 1843, son regret d’avoir nommé son épouse légataire universel par acte testamentaire[3].
En effet, selon ses dires,  Henry Lacoste souhaitait, à présent, déshériter l’épouse devenue insoumise, mais surtout stérile, puisqu’aucune grossesse n’était annoncée.

Elle, la jeune femme, s’épanchait sur l’épaule du seul ami qui fréquentait son foyer, le sieur Joseph Meilhan.

16 mai 184. Il y avait foule sur la place de la petite commune de Riguepeu. C’était jour de foire.
Henry Lacoste s’y rendit, avec à son bras, sa jeune épouse, Euphémie.


[1] Sur son acte de naissance, l’enfant est prénommé « Ufini ». On trouve  aussi : Eugénie sur certains autres documents.  Nous adopterons, au fil du récit, « Euphémie », prénom utilisé lors du procès sur les dossiers de justice.
[2] Période manquante dans les registres en ligne.
[3] Testament en date du 1er juillet 1841. Les biens de Lacoste, à cette époque, étaient évalués à 700 000 francs.

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