jeudi 21 mai 2020

Pauvre Cadichon....



 
Un âne ..... Ce nom masculin désigne, depuis le Xème siècle, un mammifère domestique utilisé à diverses tâches, mais pas que, car depuis le XIIIème siècle, c’est aussi une personne un peu bête.
Pas sympa pour l’animal !!

De ce mot, en découlent bien d’autres dont la liste serait bien trop longue et fastidieuse à décliner présentement.
Prenons ceux qui, disparus, auraient, à mon avis, le droit de retrouver une place honorable dans notre langage.
Une « asnel », à tout de même plus d’allure qu’une ânesse. Et que pensez-vous de son petit, « l’anichon » ?
« Anichon, mot moins négatif que « ânon », non ? Ah, que oui alors !!



Reprenons.
L’ânon est dans le pré (écrit « asnon » au XIIème siècle).
Et on ânonne depuis 1606 –  ânonner : parler - réciter comme un petit âne, comme le fait aussi le cancre devant sa page de lecture (définition du dictionnaire..... mais je reste perplexe devant un ânon récitant ou parlant ....)
On pourrait dire : L’ânonneur ânonne, et son ânonnement est pénible.
Mme de Sévigné, au XVIIème siècle utilisait le terme « ânnement » à la place d’ânonnement.

Une ânerie (vers 1488) désignait une personne idiote, avant de nommer une parole ou un acte complètement stupide.
Et l’ânier me direz-vous. N’est-ce pas celui qui conduit, qui s’occupe des ânes ? Assurément !
Mais avant, le avant d’avant, vers 1200, ce mot était un adjectif. Son orthographe, en ce siècle lointain, était « asnier » et son féminin « asnière ». Deux siècles plus tard, être « asnier »  n’était en rien un compliment, car, tout comme en 1200, le terme renvoyait une image de stupidité à celui auquel il était attribué.

Pourquoi, en tout temps, s’est-on autant acharné sur cet animal si attendrissant ?
Car, ce n’est pas tout.....


Que pensez-vous du « bonnet d’âne », ce signe distinctif de l’ignorance.
Ce bonnet, posé sur la tête de celui qui ne sait pas, sur la tête du cancre devenu la risée de tous.
Cette « tradition de mauvais goût », heureusement abolie, vient de très loin.




Il faut remonter au XVIème siècle, à la cour des rois, où vivait celui, appelé « bouffon ».
Le bouffon, un homme souvent physiquement difforme et dont la fonction était « d’amuser la galerie ». Lourde tâche que de faire rire le roi, surtout lorsque l’atmosphère devenait pesante et tendue.
Il avait ce pouvoir, le bouffon. Il avait même le droit de proférer des vérités (pas toujours bonnes à dire) devant son monarque en toute impunité, recevant seulement quelques taloches royales lorsqu’il dépassait les limites acceptables.
Le bouffon était coiffé d’un bonnet à plusieurs pointes dont chacune était agrémentée d’un grelot qu’il faisait sonner lors de ses acrobaties. Ce bonnet était de couleur jaune.

L’enfant coiffé du « bonnet d’âne » n’amusait-il pas ses camarades de classe, tel le bouffon du roi ?
Ne disait-il pas, cet élève, des âneries ?
Les diverses pointes du bonnet du bouffon, réduites au nombre de deux, devinrent alors les deux oreilles de l’âne, justement en raison des « âneries » débitées à tort et à travers.

Mais le bouffon des siècles passés n’était pas si stupide que cela. Il avait le sens de la répartie, savait analyser les situations et, connaissant tout ce qui se passait à la cour devait faire preuve de beaucoup de diplomatie, domaine dans lequel il excellait.
Pour être accepté « bouffon du roi », il fallait faire preuve d’une très grande intelligence.
Certains bouffons avaient la confiance illimitée de leur monarque qui leur demandait conseil, loin des oreilles indiscrètes bien évidemment.

Je finirai, en disant qu’il en est de même du cancre qui est souvent un écolier très intelligent, refusant simplement le système scolaire....... Je pense que Daniel  Pennac ne me contredirait pas....


Pour cette petite histoire autour d’un mot,
Je me suis aidée du
« Dictionnaire historique de la langue française » Le Robert




Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire

Merci de votre commentaire. Il sera lu avec attention.