Quand Marie Éloïse[1]
annonça à sa mère qu’elle était enceinte, celle-ci s’écria :
« Faut t’marier, et
vite ! »
Juste le temps de publier les
bans et la jeune fille se retrouva devant le maire et le curé.
Mais en ce 1er octobre
1844, jour des noces, au bras de son mari, Pierre Bruno Julien, elle n’était
pas pleinement heureuse. Sans l’enfant qu’elle portait, elle ne se serait jamais
mariée. En acceptant cette union, elle se sentait piégée.
Deux mois plus tard, Marie
Delaye, la mère de Marie Éloïse, décéda brusquement, plongeant son époux,
Nicolas Valentin Chauvet dans la plus grande détresse.
Ne lui restaient à présent que sa
fille, son gendre et l’enfant à venir.
Ah, cet enfant ! Comme il le
souhaitait doublement à présent. Sûr qu’il lui redonnerait l’envie d’avancer.
Et si c’était un garçon, il
pourrait lui transmettre son savoir.
Il s’y voyait déjà, Nicolas Valentin,
en grand-père aimant.
Marie Delaye avait quitté ce
monde le 1er décembre 1844, à son domicile, à Bosc-le-Hard. Son
corps à peine enseveli, Marie Éloïse parla héritage. Seule héritière, les biens
de ses parents lui revenaient de droit.
Elle se faisait insistante, mais
juste ce qu’il fallait, mettant en avant la prochaine naissance et le besoin
d’argent. N’avait-elle pas toujours obtenu ce qu’elle souhaitait ?
La naissance survint le 10
mai 1845 au Bocasse.
Ce fut une fille, baptisée Éloïse
Damarée[2].
Pas un garçon ! Une
fille !
Tant pis, elle était la
bienvenue.
Joies et peines. La vie en est
parsemée.
Ce fut ainsi que le 17 janvier
1850, arriva au foyer Julien une autre petite fille. Elle reçut les prénoms d’Eugénie
Clara.
Un petit ange qui s’envola au
paradis deux mois plus tard[3].
Un choc pour Marie Éloïse qui
peina à s’en remettre, plusieurs années durant.
Les années passèrent...
Entre Marie Eloïse et son père,
les rapports étaient tendus. Toujours cette question d’héritage qui fut un temps
reléguée au second plan, car....
Dès les premiers symptômes, Marie
Éloïse, ne voulut pas y croire.
Entre joie et inquiétude, elle
n’osait en parler.
Sa fille Éloïse Damarée venait de
fêter ses seize ans et voilà qu’une nouvelle naissance s’annonçait.
Non, ce n’était pas possible,
elle devait se tromper.
Pas à son âge !
Peut-être que ses périodes
cessaient tout bonnement, plus tôt que d’ordinaire. C’était possible après
tout.
Toutefois, Marie Éloïse dut
admettre, quelques semaines plus tard, qu’elle était bien enceinte et cette
nouvelle ne la réjouissait pas vraiment.
« C’est une fille !! s’écria
la matrone venue pour la délivrance, et bien membrée avec ça ! »
Une fille qui reçut les prénoms
d’Orangine Louise[4].
La différence d’âge entre les deux sœurs était telle que la petite dernière-née
n’eut pas une maman et une sœur, mais deux mamans. D’autant plus que Marie
Eloïse se déchargeait largement des soins de sa dernière fille sur l’aînée.
Quant à Nicolas Valentin Chauvet,
il n’avait toujours pas eu de petit-fils. Pas grave, il avait deux adorables
petites-filles. Son plus grand chagrin résidait dans le fait que son unique
fille, lui battait froid, et tout cela pour une question d’argent. Il ne
pouvait tout de même pas vendre tous ses biens, se séparer de son passé ?
Un crève-cœur que ce différend
qui allait s’amplifier après un autre événement tragique, le décès de Pierre
Bruno Julien[5],
laissant Marie Éloïse seule avec ses deux filles.
[1] On trouve également « Héloïse » sur certains documents.
[2] Tout comme pour sa mère, le prénom est aussi orthographié « Héloïse » sur certains documents.
[3] Eugénie Clara décéda le 16 mars 1850.
[4] Orangine Louise fut appelée « Louise » tout au long de sa vie. Elle naquit le 20 août 1862 à Bosc-le-Hard.
[5] Pierre Bruno Julien décéda à son domicile, à Bosc-le-Hard, le 6 mai 1869. Il était né le 24 août 1913 à Frichemesnil (76). Il exerçait le métier de menuisier.
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