Au printemps 1876, la famille Brard alla s’installer à Déville-Lès-Rouen.
Charles Nicolas Chauvet,
vieillissant, vit sa fille s’éloigner avec un pincement au cœur. Heureusement,
il avait des voisins charmants qui s’inquiétaient de lui et lui rendaient de
menus services et notamment la famille Desveaux[1].
C’était souvent avec eux que le père Chauvet s’épanchait sur les différends qui
l’opposaient à sa fille qui dernièrement lui avait fait signer des papiers
apposés du cachet d’un office notarial.
Il avait signé, sans poser de
questions.
« Qu’a-t-elle encore
inventé ? se lamentait-il. Elle a toujours besoin d’argent, mais le
porte-monnaie a un fond et l’argent s’ trouve pas sous les sabots d’un
cheval. »
Gustave Onésime et Gervaisine
Argentine l’écoutaient et au fil des discussions, face au mal-être de leur
voisin toujours au bord des larmes, ils avaient fini par nourrir quelques
animosités contre cette fille indigne.
Pendant ce temps, à
Déville-Lès-Rouen, Marie Adélaïde déchantait de plus en plus. Cette nouvelle
vie, dans cette nouvelle ville, n’apportait rien de nouveau dans le quotidien.
Les dettes s’accumulaient encore et encore..... Toujours et toujours....
L’idée de la mort paternelle se
faisait de plus en plus présente. Une seule issue, la provoquer et le plus vite
possible.
Seule possibilité à portée de
main, le poison.
Le poison, mais pour cela, il
fallait s’en procurer.
La manière de se procurer du
poison était devenue la conversation journalière du couple Brad.
Alexandre Frédéric Brard écoutait
son épouse, las de ses jérémiades.
« Tu m’ fatigues ! lui
répliquait-il à court d’arguments.
— Bien sûr, toi, tu lèverais pas le
petit doigt pour m’aider ! J’ vois pas pour quoi j’ t’ai épousé !!
— Et si t’as du poison, qu’en
feras-tu ? Tu te vois tuer ton père ?
— On peut payer quelqu’un.
— Le payer, mais avec quoi ?
— Avec l’argent d’ l’héritage,
pardi !
Alexandre Frédéric Brard haussait
les épaules. Il était épuisé face l’obsession de son épouse et craignait le
pire. Le pire ? Mais après tout, il n’y avait qu’à la laisser parler,
jamais elle irait jusqu’au parricide.
Alors pour la calmer, il entra
dans son jeu.
Un jeu dangereux, le jeu de la
mort.
Il alla acheter de l’arsenic,
soit disant pour tuer les rats qui
proliféraient dans la maison. L’apothicaire qui en vendait régulièrement
pour détruire les rongeurs recommandait simplement la prudence quant à
l’utilisation du produit.
Il alla aussi sur un chantier
voler de l’acide chlorhydrique dont les couvreurs se servaient pour désoxyder
le plomb.
« Voilà, pensa-t-il en donna
les deux poisons à Marie Adelaïde, elle va m’ laisser tranquille à
présent ! »
Mais le pauvre Alexandre Frédéric
Brard ne savait pas que sa femme, de son côté, cherchait à engager un tueur et
qu’elle s’était rendue pour cela à Fontaine-le-Bourg voir l’un de ses cousins
éloigné, Augustin Brard.
Début août 1876, sur les
insistances de son père, Marie Adelaïde décida de lui rendre visite.
Charles Nicolas Chauvet était
très heureux, pensant à des réconciliations.
Il en était tout autre dans
l’esprit de Marie Adélaïde.
[1] Gustave Onésime Desveaux né le 20 octobre 1839 et
Gervaisine Argentine Pointel née le 15 janvier 1846. Ils s’étaient mariés le 20
janvier 1866 à Le Bocasse.
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