mercredi 13 septembre 2023

Un crime des plus horribles - Chapitre 7 – Les aveux

 


C’était un des gendarmes de Lisieux qui avait arrêté Alphonse Caillard rue d’Orival, ce fut ce même gendarme qui le conduisit à la gendarmerie de cette ville où le prévenu fit des aveux. Il expliqua sa journée d’avant le crime, les crimes, pour ne pas dire le massacre. Il relata les événements, calmement, comme on conte une histoire.

Voilà[1].....

Il lui fallait, avait-il commencé, trouver de quoi subsister, lui et sa maîtresse, puisqu’on lui refusait l’ouvrage qui lui aurait permis de gagner de l’argent, et aussi et surtout, pour que la misère dans laquelle il vivait cesse.

Alors, il avait emprunté cinq francs à la sœur de sa compagne. Cette somme lui permit d’acheter des cartouches chez un armurier de Lisieux.

« Six cartouches à plomb, numéro 5, avait-il précisé au capitaine de gendarmerie.

     Pourquoi ces cartouches, vous aviez déjà l’intention de tuer ?

     C’était pour braconner.

     Après, j’ai pris un billet de train pour Brionne.

     Pourquoi Brionne ?

     Je connaissais l’ coin et il y avait un bois, non loin.

     Vous aviez des cartouches, mais pas d’armes ?

     Bah non ! C’est bien pour ça  qu’ j’ai fracturé la vitrine de l’armurerie de Brionne. C’était facile, y avait pas de volet.

     Vous avez pris deux fusils de chasse, une carabine et deux revolvers, lança le capitaine de gendarmerie. Un vrai arsenal ! Et tout cela pour chasser du gibier ? Et après ?

     Après, j’ suis allé dans le bois de Beauficel. J’ai erré toute la journée. J’ réfléchissais.

     À quoi donc ?

     J’avais travaillé à la sucrerie et y avait une maison pas loin de l’entreprise, à quatre cents mètres environ, à la Rivière-Thibouville. Elle était isolée. Quand j’ travaillais là, les habitants avaient d’ l’argent, à c’ qu’on disait. J’ suis arrivé devant la maison vers huit heures et quart du soir.

     Votre décision de tuer était prise ?

     Non ! J’ voulais prendre l’argent.

     Vous êtes entré comment dans la propriété ?

     J’ ai fait plusieurs fois l’ tour et j’ai escaladé la haie du jardin où elle était la moins haute. J’ me suis dirigé vers la porte vitrée où y avait de la lumière. À travers le carreau d’ la porte, j’ai vu un homme assis devant une table. Il lisait l’ journal. Je l’ai visé à la tête. Raide mort du premier coup, alors j’suis entré dans la maison. Une femme est arrivée et j’ lai visé. Puis deux gamins attirés par le bruit que j’ai tiré comme des lapins......

 

Caillard s’arrêta un moment. Le capitaine de gendarmerie n’osait rien dire de peur d’interrompre cette confession. Le récit que faisait l’homme, face à lui, le choquait fortement et pourtant, il en avait vu et entendu dans sa carrière. Mais ce qui était horrible, c’était la manière dont Caillard parlait de ses crimes. Oui, il en parlait comme d’une bonne partie de chasse. À la limite de la gaudriole.... C’était abject !!

Mais le capitaine malgré son énorme malaise face à cet assassin ne dit rien, il attendait la suite. Et elle vint. 

«  Après ça, comme j’avais rien mangé d’puis la veille au soir, j’ai eu un p’tit creux. Comme y avait encore les restes du repas sur la table, j’ai cassé une petite croûte et j’ai bu un coup, tranquillement. C’est à c’ moment qu’une petite fille est apparue, alors comme je tenais encore le couteau à la main, l’ l’ai égorgée. J’étais tranquille à présent. Plus personne pour me déranger alors j’ai fouillé la maison. »

Le capitaine, malgré son calme apparent, serrait les dents et les poings. Il avait, à ce moment précis, une envie de tabasser Caillard.

« Tuer quatre personnes dont deux jeunes garçons et égorger une fillette, pensait-il en écoutant la confession de l’homme devant lui, et prendre le temps, devant les cinq cadavres encore chauds de boire et manger ! Cet homme est un monstre ou un fou !! »

Mais il prit sur lui et, pour relancer l’horrible révélation, il demanda :

«  Et vous avez retourné toute la maison ?

     Oui, ouvert armoires et tiroirs dans toutes les pièces. Mais en arrivant dans la pièce du fond, j’ai vu une vieille femme couchée dans un lit. J’ai tiré à bout portant. Ensuite, j’ai continué à fouiller afin de récupérer l’argent.

 

Le capitaine de gendarmerie n’était pas là pour juger, mais pour recueillir les aveux. Il demanda simplement à la fin de cette confession :

« Pourquoi avoir fait ça ? Avoir tué toutes ces personnes, ces enfants ? »

À cela, Caillard répondit :

«Eh bien quoi ! C’était pour voler. Il faut bien vivre. J’avais besoin de voler pour vivre ! »

 

Le Capitaine de gendarmerie se leva, sortit de son bureau et demanda à un factionnaire debout dans le couloir :

« Amenez-le à la prison, pour y attendre le jour de son jugement. »

Et il sortit dehors. L’air lui manquait. En boucle, le récit de l’assassin lui revenait, apportant avec lui les images des corps ensanglantés.

 



[1] Les éléments du récit qui suit ont été trouvés dans divers articles de journaux dont : Le courrier de Metz – la Charente ....

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