dimanche 17 mai 2015

CONCLUSION DU SUJET "SOUVENIRS D'ENFANCE"



Des souvenirs de nos nombreuses années d’écolier ou d’écolière, nous en avons tous d’avouables lorsque les moments étaient glorieux, et non avouables lorsqu’ils s’agissaient de punitions.
Ces punitions, à nos yeux d’enfants, étaient bien évidemment injustes !…..

Je n’ai pas eu le plaisir de vous lire. Personne ne m’a confié ses petits secrets.

Je vais donc vous proposer quelques extraits de textes d’écrivains qui se sont « répandus en mémoire » sur leur enfance sur les bancs de l’école.


Daniel Pennac nous conte dans son « CHAGRIN D’ECOLE », qu’il fut un cancre !!!
Si tous les cancres étaient comme lui, nous aurions le plaisir de dévorer bien des écrits intéressants !


…. Donc, j’étais un mauvais élève. Chaque soir de mon enfance, je rentrais à la maison poursuivi par l’école. Mes carnets disaient la réprobation de mes maîtres. Quand je n’étais pas le dernier de ma classe, c’est que j’en étais l’avant-dernier. (Champagne !) Fermé à l’arithmétique d’abord, aux mathématiques ensuite, profondément dysorthographique, rétif à la mémorisation des dates et à la localisation des lieux géographiques, inapte à l’apprentissage des langues étrangères, réputé paresseux (leçons non apprises, travail non fait), je rapportais à la maison des résultats pitoyables que ne rachetaient ni la musique, ni le sport, ni d’ailleurs aucune activité parascolaire…..
….J’ai toujours entendu dire qu’il m’avait fallu une année entière pour retenir la lettre « a ». La lettre « a », en un an. Le désert de mon ignorance commençait au-delà de l’infranchissable « b »….
Extraits de « Chagrin d’école» - de Daniel Pennac


Marcel Pagnol nous réjouit avec ses « souvenirs d’enfance ».
N’avait-il pas eu la chance, ou la malchance, d’avoir un père instituteur.


…..Lorsqu'elle allait au marché, elle me laissait au passage dans la classe de mon père, qui apprenait à lire à des gamins de six ou sept ans. Je restais assis, bien sage, au premier rang et j'admirais la toute-puissance paternelle. Il tenait à la main une baguette de bambou : elle lui servait à montrer les lettres et les mots qu'il écrivait au tableau noir, et quelquefois à frapper sur les doigts d'un cancre inattentif……
……….. J'approchais de mes six ans, et j'allais à l'école dans la classe enfantine que dirigeait Mlle Guimard. Mlle Guimard était très grande, avec une jolie petite moustache brune, et quand elle parlait, son nez remuait : pourtant je la trouvais laide, parce qu'elle était jaune comme un Chinois, et qu'elle avait de gros yeux bombés. Elle apprenait patiemment leurs lettres à mes petits camarades, mais elle ne s'occupait pas de moi, parce que je lisais couramment, ce qu'elle considérait comme une inconvenance préméditée de la part de mon père. En revanche, pendant les leçons de chant, elle disait, devant toute la classe, que je chantais faux, et qu'il valait mieux me taire, ce que je faisais volontiers.
Pendant que la marmaille s'époumonait à suivre sa baguette, je restais muet, paisible, souriant ; les yeux fermés, je me racontais des histoires, et je me promenais au bord de l'étang du parc Borély, qui est une sorte de parc de Saint-Cloud, au bout du Prado de Marseille.
……Deux années passèrent : je triomphai de la règle de trois, j'appris - avec une joie inépuisable - l'existence du lac Titicaca, puis Louis X le Hutin, hibouchougenou et ces règles désolantes, qui gouvernent les participes passés. Mon frère Paul, de son côté, avait jeté son abécédaire, et il abordait le soir dans son lit, la philosophie des Pieds Nickelés…..
Extraits de « la gloire de mon père» - de Marcel Pagnol


Quant à Per-Jakez Helias, dans « LE CHEVAL D’ORGUEIL », il nous raconte une « école Républicaine » bien sévère pour les petits Bretons, interdits de langue bretonne, la seule qu’ils connaissaient, la seule parlée à la maison.
Et les punitions tombaient ……  Mais n’était-ce pas le prix à payer pour s’ouvrir sur « l’autre pays », celui dont la capitale était Paris ?
Peu à peu, le parler breton disparut au profit de la langue nationale, le Français, ce qui est aussi un peu dommage !

L’entrée à l’école ne se fait pas sans appréhension le premier jour. A peine la barrière franchie, nous voilà dans un autre monde. C’est un peu comme à l’église, mais beaucoup plus déconcertant. A l’église, on parle, on  chante en breton, le catéchisme est en breton. Si le curé débobine du latin, du moins ne nous demande-t-il pas de l’apprendre. A l’école, nous n’entendons que du français, nous devons répondre avec les mots français que nous attrapons. Sinon, nous taire. Nous lisons, nous écrivons en français. Si nous n’avions pas chez nous des livres de messe, de catéchisme et de cantiques en breton, outre la « vie des Saints », nous serions fondés à croire que le breton ne s’écrit pas, ne se lit jamais. Les maitresses n’ont pas de cornettes, mais des robes à la mode de la ville et des souliers de cuir sur la semaine. Les maitres ressemblent assez à des hommes ordinaires n’étaient ce col et cette cravate au-dessus d’un ridicule petit gilet à une seule rangée de boutons. Assez souvent on les voit marcher sur des semelles de bois, ce qui les rend moins intimidants. Et ces hommes et ces femmes vivent volontiers tête nue, ce que nos parents n’oseraient pas faire, nous non plus. Pourtant, il faut se découvrir en entrant dans la classe. Comme à l’église. Mais les leçons à apprendre sont plus difficiles et plus nombreuses que celles du catéchisme. Et il faut écrire tout le temps, gâcher du papier qui coûte cher. A la fin, il y aura le certificat d’études qui est bien plus dur que celui de la première communion…………
A l ’école, il est interdit de parler breton. Il faut tout de suite se mettre au français, quelle misère ! Au début, nous avons beau faire, nous entendons du breton dans les paroles de la maitresse des petits. Ou plutôt, nous essayons, vaille que vaille, de reconnaître dans la suite de son qu’elle émet des mots bretons connus. Ainsi, par exemple, elle veut nous apprendre une comptine en s’aidant du rythme. Des comptines, nous en connaissons tous, mais elles sont en breton. Si elle s’avisait de scander l’une d’elles, ce serait l’enthousiasme. Mais non. Elle débite :
                        Une poule sur un mur
                        Qui picore du pain dur
                        Répétez-le avec moi !

Ce que nous répétons est une cacophonie de barbotements sonores qui n’a de signification dans aucun langage sauf peut-être celui des animaux de l’Arche de Noé. Après mille peines, elle réussit à nous faire décalquer les sons à peu près dans l’ordre. Mais, sortis de l’école, voici ce que nous répétons, deux par deux et face à face, en nous frappant mutuellement la poitrine avec un doigt.
                        Menez Poullou, Sten ar Meur
                        Lapin koton leun al leur …..

……Lorsque l’un d’entre nous est puni pour avoir fait entendre sa langue maternelle dans l’enceinte réservée au français, soit qu’il écope d’un verbe insolite ou irrégulier, soit qu’il vienne au piquet derrière le tableau après le départ de ses camarades, une autre punition  l’attend à la maison. Immanquablement. Le père ou la mère, qui quelquefois n’entend pas un mot de français, après lui avoir appliqué une sévère correction, lui reproche amèrement d’être la honte de la famille, assurant qu’il ne sera jamais bon qu’à garder les vaches, ce qui passe déjà pour infamant, par le temps qui court, auprès de ceux-là mêmes dont une part du travail est de s’occuper des vaches. Le mot vache d’ailleurs (buoc’h, en breton) est l’injure que l’on adresse aux pauvres d’esprit, aux imbéciles fieffés, à ceux qui n’apprennent rien de rien et dont la vie quotidienne est un chapelet de bêtises à faire rougir Jean Dix-sept lui-même. Il n’y a pas d’âne dans la région, il faut donc se rabattre sur un animal familier dont l’intelligence n’est pas réputée très vive? Les longues cornes valent bien les longues oreilles.
Est-ce pour cela que la punition infligée, dans tout le pays bretonnant, aux écoliers surpris à parler breton s’appelle « la vache »  ! …….
Extraits de « Le cheval d’orgueil» - de Per-Jakez Helias


Je ne peux que vous conseiller de lire tous ses livres de souvenirs.
Il y a en bien d’autres  tels ceux de Michel Jeury, Yvon Collin, Colette bien évidemment, libre et féministe avant l’heure, qui est toujours d’actualité tellement ses idées étaient modernes pour son époque.

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