jeudi 6 avril 2023

L’aubergiste de Sotteville-lès-Rouen - Septième : Dérapages.

 

Le 5 décembre 1878, en la mairie de Sotteville-lès-Rouen, Émilie Adélaïde Sénéchal, Veuve Bénard, et Félix Joseph Alavoine se prenaient pour époux.

Présents auprès d’eux et signant comme témoins :

·         Eugène Picard, père de la première épouse du nouveau marié.

·         Benony Picard, ancien beau-frère du nouveau marié.

·         Augustin Sénéchal, frère de la nouvelle mariée.

·         Alfred Rosay, ami de la nouvelle mariée.

 

La lune de miel fut, hélas, de courte durée. Devenu le chef de la famille, Félix Joseph tenait à obtenir obéissance de la part de son épouse. Mais Émilie Adélaïde ne l’entendait pas de cette oreille. Devant l’attitude de son époux qui, de tendre et attentif, était devenu directif, la nouvelle épousée commençait à se demander si elle avait eu raison de dire « oui » devant Monsieur le maire. Les disputes, de plus en plus violentes, se multipliaient au foyer.

Et puis, pour compléter l’ambiance, les affaires commencèrent à décliner entraînant un manque de revenus non-négligeables.

Félix Joseph admit alors qu’il fallait redresser les finances, mais au lieu d’avancer la possibilité qu’il travaille davantage, il annonça la solution suivante :

« Le commerce est mal situé, voilà pourquoi les clients ne sont pas nombreux. Il faut s’installer ailleurs. »

Mais Émilie Adélaïde ne souhaitait pas quitter la grande rue. Pour elle, l’emplacement était idéal. Si les revenus du ménage baissaient, c’était essentiellement parce que Félix Joseph devenu patron du lieu avait quitté son emploi aux Chemins de fer.

Et Félix Joseph de poursuivre en observant attentivement la réaction de son épouse :

« Dans la rue du cimetière, y a un terrain à vendre. On pourrait l’ach’ter et faire construire. »

Aucune réaction de la part de l’épouse qui restait impassible, le visage fermé. Alors, Félix Joseph poursuivit, timidement, comme marchant sur des œufs :

« T’as l’argent, n’est-ce pas, alors, y a pas de souci ! »

Voilà, la phrase était lancée. Félix Joseph se dévoilait enfin. Toutes ses simagrées de tendresse et d’amour étaient feintes dans un seul et unique but, celui de s’accaparer de l’argent de son épouse. Faire construire et ainsi le nouveau commerce serait à son nom en tant que chef de famille.

Émilie Adélaïde se sentit piégée. Comment n’avait-elle pas pressenti cette manœuvre ? Comment s’était-elle laissé berner ? Ah, si c’était à refaire, sûr qu’elle le mettrait dehors cet homme sans scrupule !

Mais il était trop tard, elle était devenue par le mariage Madame Alavoine et en plus de devoir obéissance à son époux, tous ses biens lui appartenaient.

Pourquoi n’avait-elle pas pensé à faire établir un contrat de mariage lui laissant la jouissance de son argent ?

Voilà pourquoi, il fut construit quelques mois plus tard un bâtiment, débit de boissons et logement, rue du cimetière à Sotteville-lès-Rouen. Dans la rue, se trouvaient déjà d’autres estaminets qui, implantés depuis longtemps, avaient gardé leur clientèle ce qui laissait aux nouveaux installés peu de chance de s’en créer une fidèle. Bien sûr, au début, il y eut les curieux, venus prendre un verre pour voir….. Et puis les habitudes des uns et des autres avaient été reprises désertant le nouveau commerce.

Après l’engouement de l’installation dans ce nouveau quartier, ce fut le désenchantement. Les scènes se multiplièrent au foyer Alavoine. Des cris, des hurlements plutôt, dont les voisins profitaient largement.

Aux coups de Félix Joseph, Émilie Adélaïde répondait :

« Non, tu n’auras plus un sou !! »

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