mercredi 17 mai 2023
L’aubergiste de Sotteville-lès-Rouen - Treizième partie : Le verdict
Les jurés quittèrent leur box afin
de délibérer sur le sort de l’accusé.
Le condamner ?
L’acquitter ?
La salle d’audience se vida
lentement des personnes venues en grand nombre entendre les débats dans un
brouhaha de commentaires. Parmi les personnes présentes quelques voisins
habitant le quartier du cimetière à Sotteville-lès-Rouen, les membres de la
famille de la victime et de celle de l’accusé. Tous heureux de pouvoir se
dégourdir les jambes dans l’attente du jugement, en espérant toutefois qu’ils
ne devraient pas arpenter trop longtemps la salle des pas perdus du palais de
justice.
Mais pour que justice soit faite,
il fallait donner aux jurés le temps nécessaire à leurs débats.
Lorsque ceux-ci revinrent dans la
salle d’audience, le public avait déjà repris place.
À ce moment, le premier juré
annonça la sentence que chacun pressentait :
Sur les questions posées, il fut
répondu :
Oui, sans
circonstances atténuantes.
Sauf toutefois en ce
qui concernait l’attentat à la pudeur.
Alavoine était
condamné à la peine de mort.
En entendant l’arrêt de la cour,
le condamné resta de marbre.
Il était onze heures du soir,
lorsque la salle d’audience du palais de justice se vida à nouveau, mais cette
fois, pas le moindre commentaire, seulement le bruit des pas et le froissement
des étoffes.
Un mois plus tard, le 24 décembre
1881, le journal La Liberté notait en
page 3 :
Condamnation à mort –
rejet de pourvoi.
La Cour de cassation
a rejeté hier le pourvoi de Félix Joseph Alavoine, condamné à la peine de mort
par arrêt de la cour d’assises de la Seine-inférieure du 22 novembre, pour
crime d’assassinat.
Le 27 décembre 1881, les lecteurs
du journal Le Rappel pouvaient lire
ces quelques lignes :
Nouvelles
judiciaires.
Dans son audience d’hier, la Cour de cassation,
présidée par M. le président Barbier, a rejeté le pourvoi de Félix Joseph
Alavoine, condamné à la peine de mort par la Cour d’assises de la
Seine-Inférieure, le 22 novembre dernier, pour assassinat.
Le même article se retrouvait
dans divers autres journaux, comme Le
Temps, le 24 décembre 1881 – La
Petite Presse, le 25 décembre 1881 ......
Le 23 février 1882, alors que
Félix Joseph attendait au fond de sa cellule de la prison de Bonne-nouvelle, la
date fatidique de son exécution, il apprit qu’il était gracié et que sa peine
était commue en emprisonnement à vie. Il serait déporté au bagne.
Félix Joseph Alavoine venait
d’avoir la vie sauve, mais la vie au bagne jusqu’à sa mort n’avait rien de
réjouissant.
La fiche de bagne
d’Alavoine donne les renseignements suivants :
Condamné le 22
novembre 1881 par la cour d’assises de Seine-Inférieure pour homicide
volontaire et incendie volontaire
Par décret du 23 février
1882, le président de la République a commué la peine de mort en celle de
travaux forcés à perpétuité.
Écroué au dépôt le 6
avril 1882.
Embarqué le 10 mai
1882 sur le Fontenay à destination de la Nouvelle-Calédonie.
Puis également ce qui suit :
Félix Joseph Alavoine mesurait
1.71 mètre, avait le visage ovale, le teint coloré, les cheveux et les yeux
châtains, le nez moyen et la bouche également, un menton à fossette.
Il portait une cicatrice à la
joue gauche, une autre au-dessus de l’oreille droite et une troisième sur le
bras droit.
Ces deux bras portaient des
tatouages, mais aucune précision les concernant.
Félix Joseph fut effilocheur. Sa
tâche consistait à effilocher des déchets de laines ou de chiffons destinés à faire
de la pâte à papier.
Par la suite, il devint
concessionnaire, un privilège donnait aux bagnards ayant déjà purgé une peine
d’au moins dix à quinze années et ayant eu une bonne conduite.
Concessionnaire ? La
possibilité à un bagnard de pouvoir exploiter à son compte une parcelle de
terre ou d’exercer un métier hors de l’enceinte du bagne.
Alavoine, lui, disposa d’une
terre à Fonwhary, le 22 novembre 1891.
Un peu de liberté retrouvée.
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