jeudi 24 septembre 2020

NOUVELLE HISTOIRE VRAIE - CHAPITRE 7

 


Nouvelle Histoire vraie

Chapitre 7

Le roman de Célestine Buisson

 

Célestine Lavie avait apporté, dans sa corbeille de mariage, un enfant né d’un amour de jeunesse. Le petit Gaston, né à Pau en février 1896, avait grandi dans les Pyrénées où il était resté lorsque sa maman était montée à Paris.

En effet, Célestine avait confié son fils, ne pouvant l’emmener avec elle, car il lui aurait été bien difficile de s’occuper de lui tout en travaillant, d’autant plus que le petit était quasi-aveugle.

 

Célestine Lavie, parisienne d’adoption, ne resta pas longtemps célibataire. Elle rencontra Guillaume Buisson, un homme qui avait également connu les deuils, puisqu’il avait eu la douleur de perdre deux épouses[1].

Comme dans les contes de fées, ils se plurent et se marièrent, à la mairie du 13ème arrondissement, le 4 juillet 1905.

Seule petite différence avec les contes, ils n’eurent pas « beaucoup d’enfants ». Il serait même plus juste de dire qu’ils « n’eurent aucun enfant ».

 

Sept années après leurs noces, Célestine Lavie devint madame veuve Buisson.

Guillaume Buisson s’était éteint à l’âge de cinquante-neuf ans, le 12 décembre 1912.

Malgré le chagrin, il fallut bien à la veuve poursuivre son chemin. Elle s’installa alors dans un appartenant moins vaste au numéro 42 de la rue du Banquier, quartier de la Salpêtrière dans le 13ème arrondissement.

C’était au cours de l’année 1913, juste avant la déclaration de guerre et la mobilisation d’août 1914.

 

Seule, dans son appartement, son existence lui semblait bien fade.

Dans les durs moments du début de cette guerre que l’on avait cru brève et qui semblait vouloir s‘éterniser, elle aurait bien aimé avoir une épaule sur laquelle s’épancher.

 

Son fils, Gaston, était de la classe 1916. Son handicap allait-il l’exempter de ce chaos militaire ?

Bien sûr avec des lunettes, il pouvait se diriger, faire quelques tâches, mais nullement être pris comme soldat dans l’infanterie ou l’artillerie. Il n’irait donc pas au front, dans les tranchées, cela la soulageait, la réconfortait, mais il pouvait peut-être intégrer l’intendance[2].

 

Ce fut par hasard que Célestine prit connaissance d’une petite annonce. Un monsieur, aussi isolé qu’elle, cherchait à combler sa solitude en partageant sa vie avec une femme aimante.

« Pourquoi pas ? » se dit-elle.

 

Et elle répondit à cette main tendue, le 1er mai 1915.

"Monsieur. Excusez-moi, ayant vu votre annonce dans un journal. Je suis veuve, j’ai 12 000 F, j’ai quarante-quatre ans, j’ai un fils au feu, donc je suis seule et voudrais me refaire une situation."

 

Quelle insouciance d’étaler ainsi et immédiatement le montant de ses biens !!

 

Après un échange de deux ou trois correspondances, Célestine invita le monsieur de l’annonce à une première rencontre.

A quel endroit ?

Chez elle.

Chez elle !

Mais quelle imprudence !!!

Ne connaissait-elle que peu de choses sur cet homme ?

Seulement qu’il se nommait, mais c’était lui qui l’affirmait, Georges Fremyet, qu’il était ingénieur et demeurait au 152 de la rue Saint-Martin.

Elle ne savait même pas à quoi il ressemblait !!

 

Rapidement,  le couple devint très intime.

 

Monsieur Georges Fremyet possédait, assurément, un charme époustouflant.

Un charme époustouflant, c’était le cas, car ce que ne savait pas Célestine, c’était que son nouvel amoureux entretenait de nombreuses liaisons, et qu’il maniait, à merveille, le mensonge.

 

Un matin, donc, Georges Fremyet avertit Célestine que ses affaires le demandaient en Tunisie et que, de ce fait, hélas, ils devaient s’absenter au moins six mois.

Six mois !!

Mais puisqu’il le fallait !!

 

Le retour fut festif !

Les deux amants reprirent leur vie commune et Célestine Lavie était aux anges lorsqu’elle présenta son futur époux (eh oui, il y avait eu promesse de mariage !) à sa famille. 

Georges Fremyet fit donc la connaissance des sœurs de Célestine, nées du mariage de sa mère avec Pierre Lacoste :

·         Marie Lacoste, la dernière de la fratrie, née en 1886, toujours demoiselle.

·         Catherine, née en 1881, épouse de Pierre Paulet[3].

D’un de ses futurs  beaux-frères, Pierre Paulet, l’époux de Catherine, et de leurs deux enfants :

·         Yvonne Andrée Louise[4]

·         André Maurice[5]

 

 

Georges Fremyet eut même le privilège, en était-ce réellement un pour lui, de rencontrer le fils de sa future, Gaston, venu trois semaines à Paris, en juin 1916, avant de repartir pour Bayonne où il résidait.

 

Tout était pour le mieux et aurait été parfait, sans les échos de cette guerre qui s’intensifiait.

 

Le couple Lavie-Fremyet déménagea pour un appartement plus spacieux, au numéro 113 du boulevard Ney. Les clefs de leur petit « chez eux » leur furent remises le 30 avril 1917.

Le 12 mai, petite promenade à la campagne dans la ville de Gambais. Plusieurs séjours suivirent à la fin de ce même mois.

 

Un drame familial survint. Catherine tomba malade et dut être hospitalisée à la Piété. Malheureusement, elle ne devait pas quitter cet hôpital, car elle y décéda le 21 juillet.

Un rude coup pour le mari qui se retrouvait seul avec deux enfants.

Georges Fremyet, compatissant, soutint le jeune veuf, l’aidant même dans les démarches administratives.

 

Les deuils !! Il y en avait tant surtout en ces années de guerre... ce n’était pas pour autant qu’il fallait s’empêcher de vivre, malgré la douleur.

C’était ainsi !

Il fallait faire avec.....

 

Le 17 août 1917, Célestine et Marie allèrent  se recueillir sur la tombe de leur sœur Catherine..... Depuis ce jour, Marie Lacoste ne revit jamais Célestine.

Cependant, elle reçut quelques cartes postales au texte banal, tout comme certaines autres personnes, telles madame Moynat ou encore madame Simon, amies de Célestine.

Ces cartes étaient datées du 1er septembre........ 

 

Et puis, ce fut le silence le plus complet.

 

La police fit des recherches sans succès..... Cette jeune femme, majeure, avait le droit de refaire sa vie, ailleurs, et de n’en rien dire.

Elle avait vidé ses comptes !  Elle avait vendu ses biens !

Voilà la preuve qu’elle souhaitait tourner la page !

 

Mais pour la famille, c’était inconcevable, ils étaient tous unis, jamais Célestine ne les aurait laissé sans nouvelle, et puis..... il y avait Gaston, son fils.....

 

La vérité fut dévoilée...........

 

 



[1] Guillaume Buisson, né le 23 octobre 1853 à Saint-Germain-l’Herm (Puy-de-Dôme) – veuf en premières noces de Eugénie Rodier, décédée le 20 février 1886 à Paris et en secondes noces de Marie Poinson (mariage le 13 juin 1887 à Saint-Catherine dans le Puy-de-Dôme – décès de Marie le 13 juin 1887 à Paris).

[2] La fiche militaire de Gaston Lavie – né le 13 février 1896 à Pau – nous renseigne sur le sérieux handicap dont il était atteint : « forte myopie : OD 2/10 – OG 1/20 » - En avril 1920, il reçut une pension d’invalidité 100% pour cécité. Autre précision : il mesurait 1, 59 m, avait les yeux châtain-vert et les cheveux châtains.

[3] Catherine Lacoste et Pierre Paulet s’étaient unis le 26 décembre 1903, dans la mairie du 9ème arrondissement.

[4] Yvonne Andrée Louise avait vu le jour le 19 septembre 1904 dans le 13ème arrondissement.

[5] André Maurice était né le 9 août 1905 dans le 13ème arrondissement.

 

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