mercredi 28 juillet 2021

HISTOIRE VRAIE – LA MAUVAISE REPUTATION DU LOUP - Chapitre 22

 

Les loups qui ont fait parler d’eux.......

La bête du Gévaudan – chapitre 7

 

Revenons un peu en arrière.....

Qui étaient les Chastel ?

 

En 1765, au moment des premières attaques, Jean Chastel avait cinquante-sept ans.

De petite taille, trapu, les cheveux blancs légèrement bouclés, il affichait continuellement un air bourru, peu avenant. Mais il fallait bien avouer qu’il en imposait.

Né à Darnes, paroisse de la Bessière-Saint-Mary, le 31 mars 1708[1], il avait épousé le 22 février 1735, Anna Charbonnier et depuis, il régnait en patriarche, en chef de clan incontesté, sur son épouse et  ses neuf enfants, dont quatre garçons.

Jean Chastel savait lire et écrire. Chasseur depuis son plus jeune âge, il était un fin tireur.

La vie lui avait réservé quelques déboires et revers de fortune, exerçant un temps la profession de cabaretier, il était à présent cultivateur. Ces soucis pécuniaires l’avaient rendu amer.

On murmurait aussi qu’il avait le mauvais œil...... d’où ce surnom qui lui avait été attribué de « la masque », se traduisant par « fils de sorcière ».  Comme il n’y avait jamais de fumée sans feu, on soupçonnait cette famille d’avoir des pratiques occultes en matière de sorcellerie et chacun évitait d’en rencontrer les membres.

Le fils aîné des Chastel, Pierre, avait vingt-six ans au moment des premières attaques meurtrières. Il vivait au Besset avec son épouse, Catherine Chabanel, qu’il avait épousée le 23 février 1762[2]. Pierre était garde-chasse des bois de Tenazière, sur le Mont Mouchet, domaine appartenant à la seigneurie d’Apcher.

 

Antoine Chastel, fils cadet des Chastel et frère d’Antoine, avait lui vingt ans lorsque la bête fit son apparition. Sur ce jeune homme couraient des bruits bien étranges, car, disait-on, il avait baguenaudé ici et là.....

  • ·         Tout d’abord, aux côtés des Huguenots, dans le Vivarais.
  • ·         S’accoquinant avec des galériens à Toulon.
  • ·     En Afrique du Nord, où prisonnier des Barbaresques, il avait soigné des animaux sauvages dans une ménagerie.

Pendant sa captivité, il avait, toujours selon les « on-dit », subi maltraitances et tortures, voire mutilations.

De retour au pays, il en voulait à la terre entière et s’en alla vivre en ermite dans la forêt avec pour seuls compagnons deux mâtins féroces. Il vivait de chasse et aidait son frère, Pierre, sur le domaine de Ténazière.

Antoine avait tout de l’homme des bois. Des cheveux noirs longs et sales, une barbe foncée, hirsute, qui lui mangeait le visage. Tout cela faisait qu’on se méfiait de lui et lui attribuait certains pouvoirs, comme ceux de meneur de loups, voire de loup-garou.

Voilà tout ce qu’il fallait au qu’en-dira-t-on pour faire le rapprochement entre cet homme et ses chiens, au moment des attaques, surtout qu’il était de notoriété publique que Antoine Chastel connaissait mieux que quiconque la forêt et ses multiples lieux de cachettes.

Lorsque Antoine descendait au village, ce qui était fort rare, il était toujours accompagné de ses chiens dont la femelle, une bâtarde courte sur pattes, possédait un pelage roux.

Bonnes gens, gardez-vous bien de croiser son chemin !!!

  

Des fortes têtes les Chastel, il n’y avait qu’à se remémorer l’épisode du 16 août 1765....

Ce jour-là, grande chasse générale  sous la responsabilité de François Antoine de Beauterne.

Bien évidemment, tous les hommes de la paroisse des trois Monts avaient été réquisitionnés dont faisaient partie les Chastel, père et fils.

Ces derniers semblaient peu motivés. Fusil en mains, tous trois étaient assis sur une grosse pierre, ne bougeant pas le petit doigt, se moquant allégrement d’un garde qui avait quelques soucis avec sa monture dont les quatre fers étaient embourbés. L’animal se démenait pour retrouver son équilibre, le garde, du nom de Pélissier, fulminait essayant de ne pas être désarçonné ce qui aurait été des plus honteux....

Et ce fut honteux, en effet, car le garde se retrouva au sol, dans la plus épaisse des gadoues.

Les trois Chastel n’en pouvaient plus de rire, ce qui froissa au plus haut point le garde maculé de boue qui s’en prit aux trois hommes.

Le ton monta. Antoine fut le plus virulent, le plus grossier à l’encontre de Pélissier, allant jusqu’à le menacer de son arme. 

Ce furent bientôt trois fusils qui se dirigèrent vers le garde.

S’en suivit une mêlée qui fut bien difficile à démêler......

Voilà pourquoi, le lendemain père et fils furent emmenés à la prison de Sauges, un lieu vétuste aux cachots humides et malodorants, dans une cellule de sûreté de sept mètres sur deux.

Un petit séjour de plusieurs semaines.

 

Novembre 1765, Monsieur Antoine de Beauterne quittait le Gévaudan....... La vie reprit son cours, mais pas calmement, car les attaques reprirent également......

Quelle était donc cette malédiction qui rôdait ?

Malédiction pour certains.

Mascarade et supercherie pour d’autres, pensant que ces messieurs Antoine de Beauterne avaient tout  bien orchestré pour satisfaire le monarque Louis XV, impatient de voir la bête exterminée. En effet, une bête avait été abattue, mais pas LA bête !!

Et puis, les gens parlaient, le soir à la veillée.

Quelques-uns avaient fait le constat que les attaques meurtrières avaient recommencé quelques jours après la sortie de prison d’Antoine Chastel.

Coïncidence ?

Peut-être, mais peut-être pas !!!!

 

Avril 1767. Deux années déjà !!!

La bête sévissait toujours, pourtant, il semblait qu’elle se retranchait dans les vastes forêts du Mont Mouchet et plus particulièrement celles de la Tenazeyre.

Les messes, les processions  et les pèlerinages s’enchaînaient......

 

Ce jour-là, 14 juin 1767, pour la première fois depuis bien des années, Jean Chastel, la Masque, le mécréant, assista à l’office.

Il était accompagné de ses deux fils, Pierre et Antoine.

Oui, même Antoine !!!

 

A suivre .........

 

 



[1] Jean Chastel décéda le 6 mars 1789.

[2] Le couple eut huit enfants.  Catherine Chabanel décéda le 18 janvier 1781,  juste après la naissance de la petite Anne Marie, venue au monde le 10 janvier 1781. Un an auparavant, en 1780, une autre fillette, prénommée Anne Marie, avait vu le jour et était décédée aussitôt.

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