mercredi 4 octobre 2023

Courdemanche, une triste affaire - Prologue

 



En ce 7 février 1877, comparaissait à la cour d’assises de l’Eure, Alphonse Émile Fez, âgé de trente ans. Cultivateur à Courdemanche, il était accusé d’homicide volontaire sur la personne de son épouse, Marceline Augustine née Bâton[1], et sur un de ses voisins, Eugène Lemaire et accusé également de tentative d’homicide sur la personne de Joséphine Eulalie Modeste née Ruffin, épouse Lemaire.

 




Adolphe Émile Fez avait reconnu les faits, il ne restait plus à la justice d’établir les circonstances précises de ce drame et les responsabilités de l’inculpé.

Dans le box des accusés, Adolphe Émile Fez aurait aimé revenir en arrière.

Mais le pouvait-il ?

Sans cesse devant ses yeux la vision de son épouse qu’il aimait tant s’effondrant sur le sol telle une poupée de chiffon après avoir reçu la première balle tirée. Puis, le visage horrifié de son voisin essayant de le ramener à la raison. Pourquoi s’était-il interposé ? Il n’avait rien à voir dans cette affaire. Alors, le coup est parti, une balle qui ne lui était pas destinée.

Tout avait été si vite !

Son voisin Lemaire abattu à bout touchant s’affaissa, sans vie.

Adolphe Émile Fez entendit comme dans un brouillard les hurlements de la femme Lemaire, mais ces cris presque irréels pour lui ne le firent pas reprendre conscience, le fusil toujours en joue, il avait en point de mire celui dont il voulait ôter la vie, Jules Clairet. Celui qui était l’objet de sa colère, de sa jalousie démente.

Alors qu’il l’avait dans son viseur, son doigt appuya sur la gâchette. Ce fut à ce moment que dans un réflexe de protection, la femme Lemaire se plaça sur la trajectoire de la balle. La pauvre voisine fut touchée à l’épaule et sous le choc s’écroula inanimée, alors qu’une tache rouge s’élargissait sur sa blouse.

 

Il n’avait pu atteindre Jules Clairet.

Reprenant peu à peu ses esprits et devant les trois corps inertes sur le sol devant sa demeure, Adolphe Émile Fez, tout à coup conscient de ses actes meurtriers, avait pris la fuite et s’était caché dans la forêt toute proche.

Assis sur le banc des accusés, Adolphe Émile Fez se refaisait encore et encore le film de ce moment tragique, comme un cauchemar qui ne veut pas s’estomper.

 

Comment en était-il arrivé à tuer ?

Un moment de folie ?

Une jalousie extrême ?

Les deux sans doute.

 

Et puis ce n’était pas sa faute après tout.

La faute en revenait à cette femme infidèle qu’il avait épousée.

La faute en revenait à cet amant, ce  Clairet, qui venait jusque devant sa porte, pour le narguer.

Oui, sans cela, il aurait continué à vivre heureux.....

Et qu’on n’aille pas lui dire que c’était faux, que sa catin d’épouse lui était fidèle.

Elle lui avait avoué. Oui, avoué en le regardant droit dans les yeux.

 

La cour entra dans la salle d’audience.

Le procès allait commencer.

 



[1] Plusieurs orthographes sur les divers documents : Baston – Bâton – Batton......

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