mercredi 11 octobre 2023

Courdemanche, une triste affaire. Chapitre 1 – les années bonheur.

 


Courdemanche, une triste affaire.

Chapitre 1 – les années bonheur.      

 

Adolphe Émil[1] l’avait remarquée et en était tombé follement amoureux.

Elle avait si belle tournure. Son visage  charmant, ses yeux malicieux, son sourire gracieux, tout en elle n’était que ravissement.

Elle se prénommait Marcelline.

 

Après s’être fréquentés un moment, ils avaient décidé de se marier.

La cérémonie eut lieu le 21 novembre 1867. Les travaux des champs étant achevés, c’était le moment idéal pour les épousailles.

·         Lui, Adolphe Émil Fez[2], né le 13 novembre 1846 à Courdemanche,

·         Elle, Marcelline Bâton, née le 13 avril 1849 dans la même commune,

s’unirent pour « le meilleur et pour le pire ».

 

Les premières années de mariage furent, pour le couple, un vrai bonheur. Adolphe Émil cultivait ses terres et Marcelline s’occupait des soins de son ménage. Et il y avait à faire entre le potager, le poulailler, la lessive et l’entretien de la maison. Une charge de travail importante, amplifiée par l’arrivée de deux enfants :

·         Adolphe Gilbert, le 18 septembre 1868

·         Émilien Marcellin, le 6 juillet 1870

Deux petits garnements plein de vie qui faisaient le bonheur de leurs parents.

 

Tout semblait aller au mieux.

Le couple vivait bien, l’argent rentrait régulièrement.

Sauf que l’humeur d’Adolphe Émil changea peu à peu. Il devint soupçonneux à l’égard de son épouse, la surveillant sans cesse, le reproche toujours aux lèvres et surtout l’accusant de tromperies.

Avait-elle le temps de penser à la gaudriole avec les petits et le travail de la maisonnée ?

Il n’avait qu’à effectuer, un seul jour, les tâches dont elle s’acquittait, et il verrait un peu si elle avait une seconde à elle !

Fin 1874, l’époux jaloux commença par proférer des insultes.

Comment pouvait-elle arrêter le flux d’autant de violences verbales ?

 

Puis, ce fut une première gifle, puis une deuxième. Vinrent ensuite les coups.

 

«  J’sais qu’ tu m’ trompes, hurlait-il tel un dément, pas la peine de nier ! »

 

L’amant ! Il savait qui c’était. Il le voyait rôder autour de la maison aussitôt qu’il avait le dos tourné. C’était le Jules Clairet[3] !

 

Marcelline ne savait que faire. Son mari ne devenait-il pas fou ?

 

Les actes de violence allaient crescendo. Un jour, Adolphe Émil avait voulu la frapper avec un couteau à betteraves, Marcelline avait de justesse paré le coup.

Et puis, Adolphe Émil avait fait l’acquisition d’un revolver. Le soir, alors que les garçons étaient couchés, il sortait l’arme, la manipulait devant le visage de son épouse et d’un air méchant lui disait :

« Est-ce aujourd’hui que je vais l’étrenner ? »

 

Marcelline n’en pouvait plus. Elle avait le ventre qui se serrait lorsqu’elle entendait son mari rentrer au logis.

La peur la tenaillait.

Les voisins tout proches du domicile du couple, entendaient souvent les cris. Ils conseillaient à Marcelline de partir et de retourner vivre chez ses parents.

« Il me retrouvera vite et me ramènera à la maison. Si je m’enfuis, je devrai me cacher toute ma vie avec mes enfants. »

 

Il était vrai qu’une femme n’avait pas le droit de quitter le domicile conjugal. La justice lui donnerait aussitôt tous les torts.

 



[1] Les documents d’état civil (naissance – mariage..) notent l’orthographe du second prénom Émil, sans le « e » final.

[2] Noté sur l’acte de mariage : Adolphe Émil Fez de la classe 1866, exempté du service militaire par le conseil de révision. Les recherches n’ont pas abouti à la fiche militaire, mais d’autres documents révélèrent : estropié (ou encore infirme) du bras gauche, deux cicatrices au menton, sans plus de précisions. Avait-il eu un accident ? Quand ? Assurément avant l’âge de vingt ans, âge légal du recensement militaire. Une question qui restera sans réponse.

[3] Aucune information sur le dénommé Jules Clairet.

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