13 février 1902 – Premier interrogatoire de Manda
Le seul qui, curieusement
jusqu’à ce jour n’avait pas été appréhendé, était Manda.
Pourtant, dans chacune de ces rixes, il était bien présent, seul ou
avec sa bande.
Mais, toutefois, cela ne tarda
pas.
En ce 13 février 1902 eut lieu le premier interrogatoire de cet homme
dont les journaux étalaient généreusement le nom, enfin, le surnom.
Qui était-il ?
Né le 19 avril 1876 à Paris, il était le fils de Louis Philippe
Pleigneur et Jeanne Hagen.
Officiellement, il exerçait le métier d’ouvrier-polisseur sur métaux,
mais il était de notoriété publique qu’il avait quelques filles qui travaillaient
pour lui.
Il avait hérité du titre de « chef de bande », au moment où
le nommé Balet[1] avait
été dirigé manu militari, si j’ose dire, par la Justice dans les bataillons
d’Afrique afin d’expier ses méfaits. Une manière aussi de se faire oublier.
Un vote avait réuni les membres du groupe afin de désigner leur
nouveau meneur.
Joseph Pleigneur fut élu à l’unanimité sur les critères suivants, à
savoir que cet homme était doté d’une force incroyable, d’une cruauté sans
pareil ; qu’il possédait en plus un sang-froid hors du commun, ainsi
qu’une ahurissante dose d’audace.
Bien entendu, dès le retour du nommé Balet, Manda devait laisser sa
place à l’ancien chef. Un intérim, en quelque sorte !
A cette époque Manda et Leca, tous deux membres de cette bande,
étaient de très bons amis.
En février 1902, Manda possédait déjà, à son actif, plusieurs
condamnations.
18 décembre 1889
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Condamné pour vol
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28 août 1890
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Condamné pour vol
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26 août 1896
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Condamné pour vagabondage
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8 jours de prison
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11 mars 1897
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Condamné pour vagabondage
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4 mois de prison
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27 août 1897
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Condamné pour vol
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3 mois de prison
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29 avril 1898
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Condamné pour vol
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4 mois de prison
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9 octobre 1901
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Condamné pour outrage à agent
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16 francs d’amende
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Lors de cet interrogatoire, Joseph Pleigneur était assisté de maître
Léon Baylé, avocat de son état.
Tous les faits furent repris, point par point. A chaque fois, Manda
avait une réponse qui le dédouanait de toute implication.
Concernant sa rivalité avec Leca.
« Nous étions rivaux, c’est
entendu, j’en voulais à Leca qui longtemps fut mon ami, c’est encore vrai. Mais
c’est lui qui, toujours, a été l’agresseur et non moi. »
Concernant l’affrontement de la rue Popincourt.
« J’étais là par hasard. Je
passais, accompagné de trois femmes. Soudain, à l’angle de la rue du chemin
vert, j’ m’ suis trouvé face au Leca qui a tiré le premier des coups de
revolver. La preuve, c’est qu’ j’ai été blessé à la paume d’ la main
droite. »
Concernant l’affaire de la rue des Halles
« Rien à voir
là-dedans ! j’ suis tombé dans un piège qui m’a tendu l’ Leca, car c’est
lui qui m’a donné rendez-vous dans le bas de la rue Vitruve. Il voulait, qui
disait, qu’on s’explique une bonne fois. J’y suis allé, bien sûr, pensant qu’il
voulait faire la paix et me rendre Amélie. J’étais avec Poli, mon ami.
Personne, rue Vitruve ! J’ai pensé
qu’il avait dû s’ dégonfler l’ Leca. C’est en repartant qu’il m’a tombé d’ssus
avec les siens, et tout un arsenal. Des haches, des revolvers, des
poignards.........»
Concernant la tentative d’assassinat de la rue du Bagnolet
« C’est bien vous qui avez
frappé Leca ? demanda le magistrat, Monsieur Le Poittevin.
-
Qui
m’accuse ? rétorqua, étonné Manda.
-
Leca
lui-même, le renseigna Le Poittevin.
-
Alors,
confrontez-nous !
Manda refusa de poursuivre cet interrogatoire, mais avant de garder un
mutisme renfrogné, il précisa qu’au moment des faits qui lui étaient
reprochés :
« Ce peut pas être moi ! J’ suis resté bien tranquillement à Alfortville[2],
passant toutes mes journées à pêcher à la ligne, tout en lisant attentivement
ce que les différents journaux racontaient sur mon compte. »
Qui pouvait le prouver ?
Monsieur Le Poittevin, dans son ultime conviction, connaissant bien
l’individu qui se trouvait devant lui, pour sa fourberie, n’en resta pas là.
Manda fut mis sous mandat de dépôt.
Il ne lui restait, maintenant, qu’à prouver son innocence.
[1] Rien sur
ce « Balet », malgré de
nombreuses recherches.
[2] Manda
était domicilié à Alfortville – 66, rue des Rigoles.
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