mercredi 8 avril 2020

HISTOIRE VRAIE - LES EMPOISONNEUSES

DES SIÈCLES D'EMPOISONNEUSES



L’AFFAIRE BODIN - BOURSIER





CHAPITRE  4

La séance reprit et ce fut au tour de Kostolo d’être interrogé.

Les réponses que cet homme fit apprirent à l’auditoire qu’il était en France depuis six années. Il était venu se réfugier dans ce « Pays de la Liberté », après avoir combattu les Turcs
Ce fut une réelle épopée !
Avec une quarantaine de Grecs, il avait effectué le voyage par mer,  sur une frêle embarcation.

« N’avez-vous pas porté le nom de « Brouski » ? s’enquit le président de séance.
-          Non, jamais, je me nomme Kostolo depuis toujours.
-          Connaissez-vous une femme Olivereau ?
-          Oui. Je suis venu à Paris avec un prince turc, le prince Kayarky[1]. Je me suis rendu avec lui à Marseille, puis je suis revenu seul à Paris. Ce fut à ce moment que je l’ai rencontrée.

Concernant la « femme Olivereau », elle avait été la maîtresse de Kostolo jusqu’à la rencontre de celui-ci avec la femme Boursier dont il avait fait la connaissance, comme nous l’avons appris précédemment, par l’intermédiaire de M. Charles, domestique de Mme Flamand, la tante de Mme Boursier.
Mme Flamand logeant au-dessus du commerce des Boursier, il fut facile à Kostolo de venir à l’épicerie à chaque fois qu’il rendait visite à la vieille dame.

Bien sûr, la maison lui était ouverte.....
Et puis, il y eut le baptême du bébé de la nièce de Mme Boursier. Au-dessus des fonts baptismaux, Mme Boursier et Kostolo tenaient l’enfant en leur qualité de marraine et parrain. Ce lien religieux en créa un autre, moins catholique.....
Puis vint le premier prêt d’argent, puis les autres, sans que le pauvre Boursier, le mari, ne s’en douta.

« A combien se montèrent ces prêts ? demanda le président.
-          La totalité des prêts s’élève sept cents francs, affirma Kostolo.
-          Et cette demande en mariage que vous auriez faite ?
-          Ce ne fut qu’une plaisanterie, je n’ai jamais eu le désir d’épouser Marie Adélaïde Boursier.

Visiblement, Marie Adélaïde n’avait pas senti la nuance entre la sincérité et la plaisanterie.
Il est vrai qu’il y a des sujets sur lesquels on ne doit jamais plaisanter avec une femme, et le mariage, justement,  en est un.

Nicolas Kostolo expliqua ensuite le déroulement des deux jours précédant la mort du sieur Boursier.

« Le 28 juin, je me suis rendu chez le couple Boursier, sur les trois heures de l’après-midi. J’ai parlé quelques instants avec le malade qui m’a rassuré en me disant que son malaise n’était que passager. J’ai trouvé Mme Boursier très abattue et fatiguée. J’ai donc proposé de passer la nuit auprès du malade, ce qui m’a été accordé. J’ai veillé toute la nuit et j’ai donné, sur sa demande, plusieurs fois à boire à M. Boursier.
-          Par qui ces boissons étaient-elles préparées ? demanda le président.
-          Par Mme Boursier.
-          Vous n’avez pas quitté le malade ?
-          Non, uniquement après son décès.
-          Qu’avez-vous pensé de cette maladie soudaine ?
-          J’avoue avoir eu quelques soupçons d’empoisonnement. Les ongles du malade étaient devenus tout bleus.
-          Avez-vous eu des relations intimes avec la veuve après le décès de son époux ?
-          Oui, nous avons eu des relations intimes, quinze jours après le décès.

Puis, revenant sur la demande en mariage, Kostolo confirma pour la énième fois :

« Non, je n’ai pas fait de propositions de mariage. Est-ce que j’aurais voulu épouser une femme qui a cinq enfants, et surtout une femme que je n’aime pas ! »

A cette remarque, des murmures d’improbation parcoururent la salle d’audience.
Kostolo était bien un profiteur, doublé d’un mufle.

Le président, suite à cette réponse, fort indélicate, mais qui avait le mérite d’être franche, ajouta :
« Cependant, vous lui montriez  des témoignages d’attachement, vous receviez d’elle de l’argent, continuellement vous l’engagiez à se livrer à vous. Votre conduite annonce, non seulement de l’immoralité, mais encore la plus grande bassesse. » 

En son for intérieur, Kostolo pensa :
« Qu’avais-je le choix. Je vivais bien des bienfaits des femmes, alors je m’en accommodais et puis, cette veuve Boursier allait avoir l’argent de son mari, alors pourquoi ne pas en profiter !! »


Il ne restait plus à présent qu’à entendre les témoins, soit quarante-huit à charge et six (seulement !) à décharge. De nombreuses auditions qui se dérouleraient sur plusieurs jours.



[1] Aucune information sur ce personnage.

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