jeudi 9 juillet 2020

HISTOIRE VRAIE - DES SIÈCLES D'EMPOISONNEUSES

LES EMPOISONNEUSES

L'AFFAIRE LACOSTE



Chapitre 9

Et voilà, c’était reparti !.....
Danse des bocaux et flacons contenant des morceaux des divers organes du pauvre défunt.
Les dames de la bonne société s’approchaient pour voir, observer, écœurées par avance, le cœur au bord des lèvres, tamponnant un mouchoir parfumé d’eau de senteur sur leur nez pour contrer les mauvaises odeurs.
Mais, elles s’empressaient toutes, se bousculant presque. Elles s’en mettaient plein les yeux afin de tout raconter, avec moult détails, à leurs connaissances lors d’un repas ou d’une collation.
Mais, à leur grande déconvenue, aucune odeur nauséabonde ne s’échappait, juste quelques relents un peu fades. Dommage ! Elles auraient moins à dire....

Lorsque la cour entra de nouveau en séance, chacun reprit sa place et la parole fut donnée aux experts, les docteurs Devergie, Flandin et Pelouze qui ne manquèrent pas de faire un rapport des plus détaillés, comportant grand nombre de termes techniques, affirmant la présence d’arsenic dans les diverses parties du corps de feu Henry Lacoste et notamment dans le foie, les muscles, l’intestin .......
Toutefois, ces hommes de science ne pouvaient attester que la mort était due à un empoisonnement, mais supputaient que les doses d’arsenic avaient pu être prises – ou données – pendant de nombreux mois.
Prenant en compte l’évolution des symptômes de la courte et fulgurante maladie, il était fort peu probable que la cause du décès fut une indigestion, mais aurait pu survenir suite à  l’étranglement de la hernie dont souffrait le défunt depuis des années. Mais là encore, cette hypothèse ne pouvait être qu’écartée.
Alors ?
Et bien, il ne restait que la mort par empoisonnement !!!.... Quoique .....
Le docteur Molas, médecin à Auch fit la remarque suivante :
« ... Mais toutefois, la dose constatée après l’autopsie était bien minime – environ cinq milligrammes.... D’autre part, monsieur Lacoste était atteint de plusieurs pathologies et toutes les causes réunies ont pu entraîner la mort....»

Monsieur Cambrenon, autre médecin, ne prit aucun risque en affirmant que le sieur Lacoste était, assurément, décédé suite à l’ingestion d’une substance vénéneuse. »
Cette remarque, fort judicieuse, déclencha, parmi les personnes présentes dans la salle d’audition, bien des rires moqueurs.
Avait-on besoin d’avoir fait des années d’étude pour en arriver à cette conclusion ?

Monsieur Molas prit de nouveau la parole :
«  On peut penser que si monsieur Lacoste absorbait un traitement à base d’arsenic, l’accumulation a pu se faire insensiblement et arriver à une proportion telle que la mort s’ensuivit. »
Et voilà, Monsieur Devergie tout à fait en opposition avec son collègue Molas.

En fait, les avancées de la science, en cette année 1844, ne pouvaient rien affirmer, d’autant plus que chacun se trouvait dans l’ignorance la plus totale de la composition des remèdes ingurgités par le défunt, sauf que ces remèdes auraient pu contenir de l’arsenic. Auraient pu !!!!

Alors, nouveaux débats :
Si Monsieur Lacoste n’avait pris ces médications qu’en application ou en friction, cela aurait été fort peu probable qu’il ait pu s’empoisonner.
Par contre, si il avait bu quelque portion et en avait exagéré la dose, cela aurait pu en être autrement.

Des pommades, Lacoste en appliquait sur ses dartres. Mais ne prenait-il pas, également, de cette liqueur de Flower, délivrée en flacon ?

Monsieur Devergie, d’ailleurs, confirma qu’une petite cuillérée à café de cette liqueur suffisait à donner la mort à dix personnes. Par contre, en petite dose, le corps éliminant les toxines jour après jour, il n’y avait aucun danger.
Un malade, impatient de guérir, forçant exagérément la dose, allait vers une mort à brève échéance. 

Il fut demandé l’avis de Monsieur Filhiol, professeur de chimie à Toulouse.
Cet homme déclara : « Même à petites doses, mais sur une longue durée, l’arsenic, par accumulation, peut provoquer des accidents quelquefois mortels. »

Et voilà !! Peut-être, il se pourrait, il serait possible .....

Bien difficile de faire la différence entre :
Décès dû aux  prises médicamenteuses, par petites ou grandes doses, sur un long terme.
Décès dû à un acte d’empoisonnement intentionnel.

Alors ?
La justice se trouvait dans l’impasse !!

Le réquisitoire de Monsieur le Procureur du Roi s’appuya sur l’horreur d’un tel crime, car pour lui, il y avait bien eu crime.
Et pourquoi ?

Euphémie Vergès, veuve Lacoste, était une jeune femme qui avait épousé un homme beaucoup plus âgé qu’elle. Et le couple, aux dires de certaines déclarations, ne s’entendait pas si bien que cela.
La jeune femme ne se plaignait-elle pas des infidélités de son mari ?
Se plaignait-elle, cette jeune épousée des avances faites à ses servantes, ou de l’argent proposé par son mari à ces dernières ?

Et puis, ce Meilhan, proche du couple. Quel rôle joua-t-il en réalité ?
Bien trouble et équivoque tout cela !
D’autant plus qu’entre Meilhan et la veuve, circulaient des sommes d’argent......
Pourquoi Meilhan donna-t-il ou prêta-t-il de l’argent à Mme Lacoste alors que celle-ci se trouvait à la tête d’une fortune de plus de 700 000 francs ?
Don déguisé ? Mais alors, pour quels services rendus ?

Et la maladie du mari pendant laquelle personne ne pouvait lui rendre visite ?
En raison de la volonté du malade, semblait-il.
Foutaises !!
N’était-ce pas plutôt pour dissimuler quelques mauvaises actions ?

Car ..... le sieur Lacoste n’avait-il pas confié à certains de ses amis qu’il craignait que sa femme ne l’empoisonnât, pour en épouser un autre ?... Plus jeune, évidemment !!!
Jalousies infondées ?
Soupçons justifiés ?
Pensées prémonitoires suivies de faits ?

Tout n’avait été que calculs de la part de cette jeune femme, pour  rapidement se débarrasser d’un vieux mari gênant et jouir en toute liberté de la fortune incommensurable des Lacoste.

Et cet homme, Procureur du Roi, d’achever par :
« Rappelez-vous enfin que sans les principes de moralité, la société ne saurait exister et que la plus grande garantie de son maintien repose souvent sur un verdict sérieux, portant le cachet d’une sévère exemplarité. »

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire

Merci de votre commentaire. Il sera lu avec attention.