mercredi 9 novembre 2022

Les derniers condamnés à mort dans l'Eure et en Seine-Maritime - Marie-Ernest Gilles - première partie

 


 

Quatrième condamné, un nommé Marie-Ernest Gilles

Première partie



 

En sortant de son domicile dans le village de Saint-Mards-de-Fresne[1], un voisin du sieur Jacques Gagneur aperçut de la fumée sortir du domicile de celui-ci.

« Tiens, étrange », pensa-t-il craignant qu’un incendie était en train de se déclarer.

 

Voulant en savoir plus, il se dirigea vers le logis et s’aperçut que la porte était fermée. Il appela à plusieurs reprises et, sans réponse, se mit à vouloir défoncer la porte.

Il avait bien du mal ce voisin charitable, car il venait de prendre soixante-deux ans et ses forces n’étaient plus celle d’antan et, d’autre part, la serrure montrait quelques résistances.

 

Quelques autres voisins étaient accourus et avec l’acharnement des uns et des autres, la porte céda dans un grand bruit de bois arraché.

 

Dans la maison, régnait une odeur âcre et une épaisse fumée qui venait d’une pièce sur le côté, devant être la chambre à coucher.

En effet, c’était bien la chambre à coucher et il y fut trouvé, étendu sur le plancher, roulé dans une peau de chèvre, le corps du propriétaire du lieu, Jacques Gagneur.

La tête du pauvre homme portait les marques de six profondes blessures, faites assurément par un objet contondant, sans doute le tisonnier de la cheminée de la cuisine.

 

Les coups, le corps enroulé dans une peau de chèvre à laquelle on avait mis le feu qui avait déjà calciné le bras du cadavre, tout laissait à penser qu’il s’agissait d’un acte meurtrier.

Quand ?

Le corps était vêtu d’une chemise. Le sieur Gagneur avait-il été surpris dans son sommeil ?

 

Un autre indice sur les circonstances du drame, le désordre qui régnait sans le logement, placards ouverts, tiroirs retournés, objets épars sur le sol.

Le mobile avait été en toute évidence le vol, car Jacques Gagneur avait vendu dernièrement un bœuf et une vache et le fruit de cette vente n’avait pas été retrouvé.


 

Il était donc aisé de reconstituer les événements de la manière suivante :

A la faveur de la nuit, le malfaiteur s’introduisit dans la maison, commença à fouiller, mais faisant trop de bruits réveilla le propriétaire. Surpris, le voleur s’empara du tisonnier de la cheminée de la pièce principale et frappa. Afin de masquer son meurtre, pris de panique, il enroula sa victime dans la peau de chèvre se trouvant dans la chambre et y mit le feu, pensa ainsi, par l’effet du feu qui aurait embrassé la demeure, dissimiler son acte.

 


Mais, pour ce voyou, l’affaire prit une autre tournure.

 

Une enquête fut diligentée, et une autopsie établit que la mort était due au coup qui avait été donné au-dessus de l’œil droit.

 

Qui était la victime ?

Jacques Simon Gagneur[2], fils de Simon Célestin et de Victoire Gueroult, né le 13 janvier 1829 à Drucourt. Le 14 décembre 1852, dans le village de Drucourt où il avait vu le jour, il avait épousé Victorine Livet.

Victorine qui, née le 10 août 1834, décéda le 28 mars 1878, à l’âge de quarante-trois ans.

 

 

Une enquête commence toujours par cerner les proches, avant de s’élargir à l’entourage.

Les proches furent en premier un des frères de Jacques Simon Gagneur, Constant, et plus précisément son épouse, une certaine Armande.

 

Constant Gagneur, né le 20 septembre 1836, avait épousé une demoiselle Armande Odienne, le 16 février 1860.

Cette jeune femme n’avait, mais on dit tant de mauvaises choses, pas bonne réputation. On la voyait souvent chez son beau-frère, sans raison apparente et cela faisait jaser.

Que se passait-il entre eux ?

 

Voilà pourquoi, le Parquet de Bernay avait demandé l’arrestation des époux Gustave Gagneur, qui furent immédiatement écroués à la prison de Bernay, pendant que l’enquête suivait son cours.

 



[1] Fait divers trouvé dans le journal « le Courrier de la Rochelle », en date du 19 janvier 1893.

[2] Les différents actes notes des diverses orthographes : Gagneur – Legagneur – Lagaigneur...

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